La relève de Miyazaki
Le 16 janvier 2011
Pour son premier film, Hiromasa Yonebayashi, jeune réalisateur du studio Ghibli, signe une œuvre intimiste mélancolique sous l’influence de Miyazaki.
- Réalisateur : Hiromasa Yonebayashi
- Genre : Animation, Film pour enfants, Manga
- Nationalité : Japonais
- Date de sortie : 12 janvier 2011
– Durée : 1h34mn
– Titre original : Karigurashi no Arrietty
Pour son premier film, Hiromasa Yonebayashi, jeune réalisateur du studio Ghibli, signe une œuvre intimiste mélancolique sous l’influence de Miyazaki.
L’argument : Shô, un jeune garçon âgé de 12 ans, convalescent, qui vient s’installer chez sa grand-mère et sa domestique. Les deux vieilles dames vivent dans une ancienne demeure, au jardin un peu à l’abandon, à l’ouest de Tokyo. C’est aussi là, sous le plancher, que résident les membres d’une famille pas plus haute que quelques centimètres, composée de Pod, le père, Homily, la mère, et de leur fille de 14 ans, Arrietty. Ils ont pour règle de ne jamais être vus par les êtres humains de taille normale. Cependant, le jeune garçon ne tarde pas à rencontrer Arrietty. À partir de là, commence entre eux une romance juvénile et il faudra bien du courage à la jeune fille pour parvenir à conserver son amitié avec le garçon appartenant au royaume des hommes, chose strictement interdite par les siens, sous peine de voir leur discrète survie compromise.
Notre avis : Bien que librement inspiré du premier tome de The Borrowers, la série littéraire de l’écrivaine britannique Mary Norton, Arrietty - Le Petit monde des Chapardeurs n’en reste pas moins une production Ghibli, dont on reconnaît immédiatement la patte. Esthétiquement d’abord, l’animation se montre toujours aussi fluide et élégante malgré une richesse graphique qui ne se dément pas film après film. Sur le fond, on reste aussi en terrain connu avec l’étonnante rencontre entre un garçon et une jeune fille dont la taille n’excède pas celle d’un doigt. Le point de départ de l’histoire débute ainsi par cette rencontre qui n’aurait jamais dû avoir lieu. Car si les petits êtres ont besoin des humains pour survivre (en leur chapardant diverses choses délaissées), ils ne doivent jamais leur donner la preuve de leur existence. Destiné aux enfants (mais pas seulement), le long-métrage surprend alors par son fatalisme, voire sa noirceur (la domestique effrayante, l’extinction des Chapardeurs).
Sans être non plus dépressif, Arrietty filme cette rencontre comme une malédiction dont les conséquences semblent inéluctables (les Chapardeurs doivent déménager pour se cacher des humains). Mêmes les bonnes intentions du garçon se révèlent plus désastreuses qu’autre chose. La très belle musique de l’harpiste bretonne Cécile Corbel souligne, elle aussi, par ses accents celtes, l’aspect mélancolique du premier film de Hiromasa Yonebayashi. A l’exception de la grand-mère du garçon (qui incarne une forme de sagesse toute Miyazakienne, le Maître signant ici le scénario), il est par ailleurs intéressant de remarquer que ce sont les vieilles personnes qui craignent les humains ou les Chapardeurs, là où la jeunesse tente d’abolir les barrières.
Nettement moins onirique que la majorité des œuvres de Miyazaki, Arrietty se rapproche davantage de Kiki et la petite sorcière (qui s’appuyait lui aussi sur un certain mal-être, celui de Kiki). On y retrouve également ce côté intimiste où le quotidien prend le pas sur le merveilleux. C’est pourquoi Arrietty donne parfois la sensation d’un film sans prétention. Et si cela constitue invariablement sa limite (toute relative), il en retire aussi toute sa force. Car même s’il se révèle moins ambitieux, moins visuellement époustouflant, l’épure de son récit forme comme une succession de mini-fictions du quotidien. En confrontant deux mondes (le macro contre le micro), le film crée aussi une sorte de vertige qui vient amplifier l’impossibilité de contact entre les deux. C’est de cette opposition, de ce contraste, qu’Arrietty réserve ses moments les plus émouvants.
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Jujulcactus 29 janvier 2011
Arrietty - Le Petit monde des Chapardeurs - la critique
Le dernier né du studio Ghibli semble marquer un tourant important pour un studio très traditionnel car plus international que d’habitude, Disney se chargeant de la distribution, une française étant aux commandes de la bande son, et une première réalisation pour Hiromasa Yonebayashi. Un vent de nouveautés souffle sur l’animation japonaise néanmoins le scénario est adapté et réécrit par le maître (Miyazaki) : une valeur sûre ! C’est l’histoire d’une jeune fille de 14cm qui vit avec ses parents sous une maison de campagne et qui va rencontrer par sa faute un humain, phobie de ces petits êtres. Mais les deux personnages lient une sorte de relation distante et secrète, qui tire sa force dans la complémentarité de leur caractère et de leur existence, le garçon est calme et malade, la chapardeuse volontaire et débrouillarde, il a besoin d’espoir, elle de gros bras mais les deux évoluent dans un monde qui leur demande beaucoup d’efforts... Une petite héroïne dans la lignée de celles de Miyazaki, intrépide et forte tête, à laquelle on s’attache très vite. Si le scénario est bien écrit, on le positionnera entre les oeuvres gentillette et poétique du maître (Ponyo, Totoro) et ses aventures riches et fantastiques (Chihiro, Château ambulant) pour son message engagé et sensible sous un récit assez simple et linéaire. Inutile de préciser la beauté des images et de la bande son qui envoûtent littéralement le spectateur, le font planer dans un autre monde aux milles couleurs ! Cette petite féérie queYonebayashi arrive a installer est magnifique, les petites touches d’humour toujours sympas, celles d’émotions toujours très justes. Il tire beaucoup parti du jeu d’échelle entre les maisons et avec les objets que les petits êtres utilisent. S’il le fait simplement, le studio nous livre là une bien jolie histoire prenante et touchante qui ne manque pas d’inspiration, ni d’âme, peut être un peu d’extravagances. A une distance respectable des chefs d’oeuvre de Miyazaki dont il ne renie pas l’influence (Totoro, même Chihiro quand elle s’en va à son premier chapardage...), Yonebayashi assure et rassure dans ce qui préfigure un passage de témoin important pour le studio (le fils Miyazaki n’étant pas réellement à la hauteur) : les qualités graphiques, la bande son, la poésie et l’émotion sont ici au rendez-vous. Reste une intrigue à étoffer pour donner davantage de dimensions et de complexité à l’ensemble et c’est tout bon ! Une pépite resplendissante et sensible à découvrir !
Frédéric de Vençay 11 février 2011
Arrietty - Le Petit monde des Chapardeurs - la critique
Un Ghibli d’une poésie et d’une beauté graphique renversantes, qui s’éloigne des mondes inhospitaliers de "Nausicaa" pour rejoindre le versant plus ensoleillé et plus optimiste (en apparence seulement) d’un "Totoro". Mais le film n’est mineur qu’en apparence : son discours de tolérance et de protection écologique est empreint d’une mélancolie plus profonde qu’on ne pourrait le croire. Sensible, inspiré : le nouveau venu Hiromasha Yonebayashi n’a pas à rougir de la comparaison avec maître Miyazaki.