Le 29 août 2017
Léger changement de cap pour le producteur de Detroit, modifiant sa recette pour s’adapter au rap de Planet Asia.



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Sorti le 25 juillet 2017
Notre avis : Tout juste un an après avoir délaissé partiellement ses drums boom bap pour ceux plus trap de sa collaboration avec Skyzoo, The Easy Truth, Apollo Brown change une nouvelle fois la recette qui a forgé sa réputation. Il semble que la phase de renouvellement chez le natif de la Motown passe forcément par une modification dans son travail des percussions. En soit, les ingrédients demeurent les mêmes, toute la différence réside dans leur dosage. Rien à noter du côté de l’usage des samples, le talent du producteur s’exprime une nouvelle fois par la construction de mélodies enivrantes imprégnées de références soul et jazz. Des productions comme Diamonds, Deep in the Casket ou encore Get Back constituent certains des meilleurs exemples allant dans ce sens, avec la combinaison de sonorités éparses engendrant des instrumentales uniques (notamment le travail des voix assez incroyables sur Get Back). On reste toujours assez stupéfait par la capacité d’Apollo à créer du nouveau avec de l’ancien tout en conservant une connotation artisanale, et ce même après ses 19 albums et une bonne connaissance de son univers.
D’autant plus qu’en se joignant cette fois-ci avec l’un des anciens de la West Coast, Planet Asia, l’artiste de Detroit délaisse ses drums percutantes qui conféraient, il faut quand même se l’avouer, une grande partie de la force de ses bangers comme How to Kill God, Neva Eva ou encore Nasty (en featuring avec Planet Asia soit dit en passant). Car Anchovies, de ses 15 titres, ne contient aucune lourdeur qui agite instantanément la tête, mais demande plutôt de la persévérance pour assimiler l’exigence de ce nouveau projet. A la première écoute, le plaisir n’est plus aussi instantané car il requiert une période d’habituation plus ou moins longue (selon les personnes) pour accepter les choix risqués du producteur, ce qui en fait indéniablement son album le moins accessible (si on excepte ses projets instrumentaux). Anchovies demande de l’attention, vis-à-vis des productions bien évidemment, plus subtiles car moins explosives par l’absence de drums puissantes, mais aussi du rappeur, Planet Asia, dont l’association flow / instrumentale ne constitue pas toujours une évidence.
Avec sa voix rauque et son phrasé assez rentre-dedans, le MC californien s’associe à la musique par un contraste étonnant qui finit par convaincre voire même emporter l’auditeur par la simplicité de ce hip-hop, une instru, une voix, un texte, et un mixage épuré de tout artifice. Une modestie se dégage alors de cet album très réfléchi et calme malgré le timbre grave et lourd de son parolier. Même le ton monotone, presque parlé, de Planet Asia sur certains morceaux contribue à cette atmosphère sage et reposante, si bien qu’elle en laissera pas mal sur le carreau, dont des aficionados d’Apollo Brown. Plus que jamais le producteur américain s’éloigne de la tendance très superficielle et spectaculaire actuelle. Avec Anchovies on se retrouve à l’écoute d’un objet intériorisant la maestria de sa musique pour laisser à l’auditeur tout le plaisir d’apprendre à la découvrir au fil des écoutes. Le pari était risqué, mais remporté haut la main.