Mort à Venise
Le 20 juillet 2006
Venise, personnage central du nouveau roman de Joseph Kanon, prétexte à une prise de conscience sur le rôle de chacun pendant la guerre.


- Auteur : Joseph Kanon
- Editeur : Belfond
- Genre : Roman & fiction

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Après le Berlin de 1945 dans L’ami allemand, c’est au tour de Venise de devenir le personnage central du nouveau roman de Joseph Kanon, prétexte à une prise de conscience sur le rôle de chacun pendant la guerre.
1946. Adam Miller, jeune officier américain en poste en Allemagne vient d’être démobilisé. Après avoir été affecté au service des renseignements, chargé de la dénazification, il aspire à un peu de sérénité. Parce que lui, contrairement à nombre de ses contemporains, a touché de trop près les atrocités de la guerre : il a vu les camps de la mort, les villes détruites par les bombes, les bourreaux ordinaires insoupçonnables... Alors pourquoi ne pas rejoindre Grace, sa mère, qui s’est installé à Venise sitôt la guerre terminée. Elle y loue un grand palais sur le Canal, entourée d’une société frivole au sein de laquelle gravitent politiciens, artistes, expatriés... Parmi ces parasites, il y a le docteur Gianni Maglione, un prétendant sérieux qui souhaite l’épouser mais en qui Adam ne voit qu’un coureur de dot. Jusqu’à sa rencontre avec Claudia, une jeune juive rescapée, Adam trompe son ennui dans une Venise brumeuse et glaciale qui le laisse indifférent. Et quand cette dernière affirme reconnaître en Maglione un collaborateur qui aurait trahi son père, la vie de Miller bascule. Son instinct d’enquêteur reprend le dessus et avec l’appui d’anciennes relations de l’armée, il part à la chasse aux preuves pour faire éclater la vérité dans une ville qui n’a de cesse de fuir son sombre passé.
Mais on ne remue pas le passé impunément et le plus cruel des dilemmes va se poser à lui : jusqu’où est-il prêt à aller pour ses convictions ?
Si l’intrigue policière d’Alibi est honnête et pourrait satisfaire le lecteur indolent de l’été, Joseph Kanon vaut surtout par son aptitude à mélanger les genres : thriller, histoire d’amour, roman historique, chroniques mondaines... A l’image d’une Venise ambiguë et nébuleuse, Ce roman surprend par les questionnements qu’il soulève : un meurtre est-il justifiable ? Comment transiger avec ses principes et sa conscience ? Quelle autorité détermine la légitimité d’une vengeance ? En quoi se distingue-t-elle d’un crime gratuit ? Autant de problématiques qui ont agité les différentes instances au lendemain de la victoire.
Joseph Kanon, Alibi (Alibi, traduit de l’américain par Michèle Valencia), Belfond, 2006, 464 pages, 21,50 €