Adieu pays

Deux frères et une étrangère qui les sépare, sur fond de rivalité de clans : un vrai western dans la Bourgogne du nord. Sobre et charmant.

Philippe Ramos sait donner à la campagne française des allures de Far West, conformément d’ailleurs à son intention. Il y réussit avec poésie. Adieu pays est un film qui prend son temps - ce qui est devenu rare - sans en faire perdre au spectateur - ce qui est plus rare encore.

Le prosaïsme des situations est magnifié par un regard enfantin, celui du jeu : "Et si on faisait comme si on serait dans un western ?" L’histoire d’un homme qui va quitter son village se transforme en règlement de compte avec son frère, mais aussi avec les siens au sens large - c’est-à-dire le village tout entier. C’est d’ailleurs ce dernier point de vue qui a été choisi par le réalisateur. Le départ de Vincent est une affaire qui concerne la communauté. On se prend au jeu.

Et de fait, un village, ce sont des rivalités de clan, des bals, des bagarres, des poursuites. Il y a même des fusils qui ne servent pas qu’à tuer des faisans et des perdrix. Ajoutez à cela trois Calamity Jane (la mamie, Carole et la petite-fille), une femme médecin et un tonton qui vit dans une cabane, et vous obtenez un condensé de quelques figures mythiques, de Lucky Luke à Johnny Guitar. Pour autant, il ne s’agit pas de caricatures. Les personnages sont finement ciselés, même lorsque les acteurs incarnent de bons gros paysans mal dégrossis.

L’image, les couleurs, les lumières et les plans abritent la vie de ces personnages comme un nid douillet. Mais le paysage est aussi parfois le théâtre d’orages, au sens propre (la catastrophe naturelle de la première séquence) et au sens figuré (la dispute sur la falaise). Et puis il y a aussi l’appel d’autres espaces à découvrir, loin là-bas, en Amérique. "Go West", dans Adieu pays, ça veut dire "vole de tes propres ailes". Un premier métrage prometteur.