Le 6 février 2018
Hip-hop, Punk, bohème, Melan se dévoile à travers un Abandon Sauvage très touchant et sincère.
- Date de sortie : 2 février 2018
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Notre avis : Il faut peu de temps à l’auditeur pour discerner l’authenticité qui se dégage du second album de Melan, tant l’auteur de Toulouse compose ses textes comme des confessions très personnelles et surtout sans filtres. Le MC alimente un courant de rap où le personnage et la personne qui l’écrit ne forme qu’un seul être, ici pleinement revendiqué par un rappeur qui se sert de son médium pour exorciser ses problèmes, comme il l’avait fait dans le très sombre La Vingtaine, son premier album. C’est qu’il s’agit de se distinguer avec ce qui nous caractérise, et Melan, sorte de punk à la voix cramée mais au visage angélique, clame dès son Salto de Mata ce qui le rend aussi unique dans le rap francophone. Il y parle de son aversion pour l’industrie musicale, d’une société gangrenée par l’argent, de l’absurdité de l’existence de beaucoup, posant les bases d’une mentalité de bohème anti-conformiste qui reviendra particulièrement dans le très beau Incompris. Désormais plus canalisé, jouant moins sur les pertes de voix parfois too much de La Vingtaine, le toulousain injecte une sagesse gagnée au fil du temps dans ce deuxième album fruit d’une très belle maturation.
Pas d’assagissement néanmoins de la part de Melan, mais le rappeur jongle bien plus avec différentes tonalités et présente de nouvelles facettes qu’on ne lui connaissait pas jusqu’à alors. Le délire Spotless arrive très vite sur cet album pour colorer cet univers globalement sombre d’un égotrip décomplexé assumé jusqu’au bout et Abandon Sauvage alterne naturellement entre ces diverses nuances. L’album se ponctue donc judicieusement de petites perles légères entrecoupant un ensemble mélancolique et conviant dans ce projet résolument hip-hop (toujours un plaisir d’entendre des scratchs lourds et bien placés) d’autres influences à aller chercher du côté de la musique hispanique et reggae. De ses origines catalanes Melan extrait un magnifique refrain unique, celui de Salto de Mata, et Alma, un morceau rappelant la festivité de la Mano Negra. Mais c’est également dans ses instrus que se véhiculent ces influences où les notes viennent définir non seulement l’ambiance de chaque morceau mais également la personnalité du rappeur, très proche de ses racines mais aussi d’une pensée bercée par la liberté et une tristesse douce-amère.
Dans l’attitude de Melan un rapprochement pourrait être établi, bien que l’univers rapologique diffère, avec la Bastard Prod, qui érige elle aussi, à tous les niveaux (dans les visuels et la musique), cet esprit de chien à trois pattes et fier de l’être, intimement lié à la musique punk qui tâche. Pas étonnant dès lors de retrouver chez Melan des relents puissants de ce genre musical collectif et communicatif. Le refrain de Spotless ou encore celui de Loubard, véritable chant dégénéré aboyé avec Don Choa, se chargent d’entraîner l’auditeur dans ces hymnes. L’esprit punk passe avant tout par une mentalité qui partage de nombreuses similitudes avec une mentalité plus « hip-hop » si bien que leur réunion entreprise par Melan ne choque jamais et sonne même constamment juste. Le nœud que réalise le rappeur pour lier ces diverses influences se fait par ses deux cordes vocales, rêches, adéquates à l’expression de ses sentiments bruts et sans cache. Il en va de l’intégrité de l’auteur de s’exprimer honnêtement à travers son art, de ne pas se trahir tant son personnage public repose intégralement sur l’authenticité de la personne derrière le micro. Melan parle vrai, dès lors il n’est guère étonnant de voir Pejmaxx poser sur Paradoxe, lui qui, il n’y a encore pas si longtemps, dévoilait son album éponyme où gravitait l’importance de ces valeurs-là, au point d’en faire des thèmes majeurs, une source essentielle de son écriture.
Et c’est dans cette humanité s’exprimant à travers ces paradoxes que Melan touche. Il serait partiel d’évoquer le rappeur sans mentionner sa force pour parler à l’auditeur, qu’il soit proche ou loin du type de vie que le MC mène. En s’ouvrant plus que sur La Vingtaine, le toulousain semble offrir par l’écriture un portrait plus dense et plus contrasté de sa personne, en même temps qu’elle lui permet la catharsis de ce qui le tourmente. Peut-être est-ce pour cette raison que sa musique sonne aussi vraie et parvient autant à toucher, car elle résulte directement de Manel. Le stylo est ce pont sans embûche entre le cœur et la feuille pour un rap qui sort des tripes et vient saisir celles de l’auditeur.
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