Le 8 mai 2018
Aérien et sombre, le tout premier projet de Zamdane étonne par sa richesse musicale productrice de sens.
- Durée : 29mn
- Date de sortie : 27 avril 2018
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Notre avis : Si on devait présenter le premier véritable projet de Zamdane par un morceau, on se dirigerait sûrement du côté de Disaster (et on n’est pas les seuls, le son étant le premier à avoir été dévoilé pour annoncer l’album). Alors non pas pour jouer sur le titre du morceau (on n’est pas des salauds quand même), mais parce qu’à travers ce court morceau se distingue les deux facettes majeures du jeune marseillais, son côté lumineux et son côté obscur. La force de ce projet et par glissement du rappeur réside dans ses tentatives fructueuses d’allier des contraires dans l’enchaînement des morceaux. Ne passant même pas par la case mixtape pour directement présenter (un très court) album, Zamdane courait le risque de soit manquer de cohérence, soit être trop unilatéral. Mais ni l’un ni l’autre, malgré la belle générosité qualitative du marseillais, son 20’s constitue un bloc solide riche et surprenant, dont les contradictions assez nombreuses se distinguent comme un indicateur de l’esprit versatile et mélancolique de son auteur. Alors qu’on connaissait plutôt bien sa maîtrise de l’egotrip, évoluant dans un milieu imagé et sombre, on découvre grâce à ce premier véritable projet un versant pop aussi inattendu que casse-gueule, et n’est-ce pas là également l’objectif d’un premier album ?
Les contradictions dans le rap sont monnaie courante, qu’elles soient involontairement révélées par les artistes ou bien mûrement réfléchies par ces derniers afin de les exposer à son public. Zamdane joue dans cette deuxième catégorie-là et pense réellement ses paradoxes à travers toutes les strates de sa musique, dans ses textes, dans ses mélodies ou encore dans la structuration de son album. Ce pilier sur lequel repose son rap prend aussitôt forme lors du premier morceau, Deadstar, introduction insolite à bien des niveaux. Déjà parce que venant d’un kickeur on n’attendait pas forcément une ouverture d’album aussi pop et chantonnée, mais également parce que Zamdane pose un texte bien ambivalent et fataliste sur une instru’ joviale et entraînante. Le Marseillais y aborde sa mort et à l’héritage qu’il laissera (à 20 ans), pour un premier titre qui figure jusque dans son blaze un double sens sur la mort, celle d’une icône, mais aussi celle prématurée (en référence à un jeu vidéo tombé dans l’oubli). Le ton est donné, et même si quelques égotrips plus "légers" parsèment 20’s (notamment la patate Mektoub, que l’on pourrait traduire par... fatalisme, voilà, mic drop), l’entièreté du projet semble dicté par cette réflexion sur soi et ses contradictions. Même dans la construction assez classique du projet se glisse un prolongement révélateur de sa personnalité, avec le diptyque Quand j’Fume / Synchtene. Le premier évoque les effets de la défonce quand le second évoque l’envie de l’arrêter, comme pour signifier qu’à chaque fois qu’il touche la verte il pense ensuite à la lâcher, ou bien qu’il fait passer la drogue avant sa volonté de s’en débarasser, comme le pense MxthildeTx (deux interprétations assez éloignées mais pas incompatibles).
Zamdane montre une grande maturité dans ce premier projet, parce qu’il propose une véritable recherche de sens à travers sa musique. Les textes sont une chose (primordiale dans le rap), mais le marseillais délivre également un travail maîtrisé sur les musicalités et la manière dont elles apportent une valeur ajoutée conséquente aux textes (comme les textes apportent une valeur ajoutée aux musicalités). Cette complémentarité se fait alors que Zamdane brille également par sa polyvalence. Ça kicke salement, ça rappe calmement, ça chante, avec pour seule sortie de route le couplet et refrain de AvE sur Rolling Up, qui piquent un peu les oreilles (mais même cette sortie ne peut pas être directement imputée à Zamdane). Avec ou sans autotune, le rappeur déploie une grande aisance à explorer différentes mélodies, et surprend beaucoup par l’émotion transmise par des titres comme Nil et Oh Mama, profitant tous les deux de refrains chantés puissants. Visant très souvent juste, le jeune marseillais assume ses parti-pris pop et peut, grâce à cette assurance, nous transporter aisément dans son vaisseau spatial (« la concu’ est dans l’rétro j’la graille, easy, j’les bala... » pardon je m’emporte un peu). Le voyage passe très vite, mais il reste dans les esprits.
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