Would you have sex with an Arab ? - La critique + le test DVD

La française Yolande Zauberman dresse le portrait d’une jeunesse israélienne coupée en deux, condamnée par un conflit qui semble sans fin. Malheureusement, l’ensemble manque de raisonnement.

L’argument : Un voyage dans la nuit, de rencontres en rencontres, des bars de Tel-Aviv aux ruelles de Jérusalem. On s’embarque sur un tapis volant. Dans les boites de nuit, on danse, on rit, on s’amuse. Le levé du jour sur le son techno d’une rave party en plein air. Et pour finir, un baiser inouï sur la plage. Un premier baiser. Des Juifs, des Arabes, tous citoyens d’un même pays. Israël. Aucun mur ne les sépare. Un Israélien sur cinq est arabe. Et pourtant… Une simple question vient prendre tout le monde par surprise.
Aux uns : "Would You Have Sex With an Arab ?"
Aux autres : "Would You Have Sex With An Israeli Jew ?"
Ils ne s’y attendent pas. Troublés, ils rient, hésitent, improvisent, s’étonnent de leurs propres réactions. Beaucoup n’y avaient même pas pensé. Etre ensemble ? Une barrière invisible apparaît. Le désir, aussi. Peut-être…
Notre avis : C’est par la puissance d’une question simple, voire désuète, que les langues se délient et qu’une réflexion nouvelle prend racine. Yolande Zauberman tend son micro, comme une perche, et filme les regards, les réactions, les arguments qui n’en sont pas. « Coucheriez-vous avec un Arabe ? » lance-t-elle sans prévenir, hors de tout contexte – dans une boite de nuit, un snack, sur une route, un trottoir – à des jeunes juifs habitant Tel Aviv. Certains s’étonnent quand d’autres s’énervent. « Tu coucherais avec quelqu’un qui a tué ta famille, toi ? » lui répond une jeune fille, âgée d’une vingtaine d’années. Les réactions sont les mêmes quand la question est posée aux israéliens arabes, qui représentent moins du quart de la population de la ville.
Le but de la française n’est donc pas de filmer le conflit, le vrai, pour lequel les interviewés sont finalement étrangers. Son ambition est plutôt d’exposer les nombreuses conséquences de celui-ci et son ancrage dans les esprits. Pour ce faire, la documentariste use du contexte de la nuit, où les consciences apparaissent souvent sous un jour nouveau, pour extirper des paroles vaines et rarement exprimées avec autant de franchise. La question qu’elle pose est naïve, et accouche souvent de réponses qui le sont tout autant. Une juive, par exemple, affirme avoir couché avec un arabe pour faire la paix avec ce peuple trop souvent stigmatisé : le sentiment de révolte rejoint ainsi celui de l’absurde. Au-delà de tout, c’est l’ambivalence de la condition sexuelle en Israël qui donne au film les pleins moyens de s’exprimer. Avec, en trame de fond, l’incapacité d’une société à l’altérité qui confère à l’ensemble un ton profondément fataliste. La manière dont les images sont montées rappelle que Would you have sex with an arab ? reste un documentaire fragile et modeste dans ses moyens. Le rythme est répétitif tandis que le récit, itératif, est satellisé par l’ambition impossible de son propos – questionner sans expliquer. Les images, elles, sont de piètre qualité, désaxées de leurs sujets, comme si ces derniers étaient, en définitive, impossibles à capturer. C’est d’ailleurs le principal défaut de l’œuvre, et non des moindres : rapidement, la dimension informative laisse place au sensationnel, porté par l’ampleur d’une question forcément provocatrice. Un témoignage, néanmoins, ouvre une brèche, celle de l’identité : un arabe avoue renier ses origines pour pouvoir vivre dans de meilleurs conditions. Las, ce ne sera que la seule tentative d’introduction de la question identitaire qui par la suite ne sera que peu abordée.
Compressé par les limites qu’il s’impose, Would you have sex with an arab ? devient alors un documentaire ordinaire, d’une paresse trop prononcée – une fois la question posée, que reste-t-il ? –, et qui n’existe que pour son sujet qu’il instrumentalise. Les réponses y sont totalement absentes.

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LE TEST DVD
Avare en suppléments, l’édition DVD déçoit. Les suppléments :

Quelques scènes coupées (des entretiens avec différents protagonistes) et une banale bande-annonce forment les uniques suppléments du DVD. Autant dire que ces derniers sont très faibles. Dommage car avec un tel sujet, et surtout avec une approche si originale, il aurait été intéressant d’en apprendre un peu plus sur la conception du film, sa genèse ou encore sur les difficultés rencontrées (surement nombreuses).

L’image :

A l’origine, les images sont d’une qualité médiocre (parfois pixélisées, souvent floues, et aux couleurs ternes). Cependant, cela ne relève en rien d’un défaut puisque c’est justement cette forme de marginalité qui lui donne un charme évident. En ce sens, cette édition DVD propose des images moyennes mais singulières.

Le son :

Documentaire oblige, difficile de juger la bande sonore. L’ensemble reste convaincant, les paroles des différents interviewés étant parfaitement capturées.