Le 27 février 2020
Un essai qui prône la décroissance, le retour à la terre et une meilleure redistribution des richesses produites. Sa particularité ? Il a été écrit par un écrivain anglais, publié en 1887, qui a lui-même quitté le confort de sa classe bourgeoise pour une vie paysanne. Son livre est un plaidoyer pour vivre en harmonie avec soi-même.
- Durée : 186 pages
- Auteur : Edward Carpenter
- Collection : Le Pas de côté
- Editeur : L’Échappée
- Genre : Essai
- Nationalité : Anglaise
- Traducteur : Pierre Thiesset
- Titre original : England's Ideal
- Date de sortie : 21 février 2020
- Plus d'informations : Site de l’éditeur
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Résumé : En neuf petits chapitres, Edward Carpenter démontre les avantages d’une vie plus simple : moins d’encombrement, d’ennui, de faux besoins non satisfaits. Un traité de philosophie pratique qui colle à l’actualité sociétale, fondé sur l’Angleterre capitaliste de la fin du XIXème siècle.
Notre avis : Dans la lignée des pensées utopistes qui ont accompagné le progrès, notamment industriel, ce petit essai caresse le capitalisme à rebrousse-poil. Il égratigne le modèle qui prône l’accumulation des richesses pour une meilleure vie oisive, en démontrant les inconvénients de l’entre-soi et de l’accumulation des biens - qui a vraiment envie d’épousseter des dizaines de bibelots sur une étagère ? - et les bienfaits du partage. A l’inverse du marxisme ou du communisme, Carpenter ne pense pas que cette nouvelle société viendra de l’Etat, mais qu’il revient aux individus d’adopter une vie simple, apprenant à subvenir à leurs besoins, s’enrichissant davantage à la rencontre des autres travailleurs. Il bâtit l’identité non pas sur le travail pour la collectivité, mais bien sur la capacité des individus à apprendre les travaux manuels nécessaires à leur subsistance. Cette idée ne surgit pas ex-nihilo : Edward Carpenter est issu d’une famille de pasteur anglican et lui-même comptait le devenir. La pensée anglicane, qui souligne l’immoralité de l’accumulation des richesses fiduciaires, peut être considérée comme sous-jacente à son propos philosophique.
A une époque où le survivalisme (en réponse aux théories de l’effondrement) prend de l’ampleur, cet essai résonne étrangement avec notre époque, où l’action individuelle est devenue la valeur cardinale de notre société. Bien sûr, l’Angleterre n’est plus dans un développement industriel tel que les inégalités sont autant visibles, mais cela signifie-t-il pour autant qu’elles aient disparu ? L’amélioration des conditions de vie de la population anglaise dans son ensemble, par rapport à la fin du XIXème siècle, n’a pas aboli les classes, créant par ailleurs la peur du déclassement, que Carpenter pressent dans ses écrits, si le « socialisme » tel qu’il le définit ne devient pas l’idéologie dominante. Dans son idéal, l’auteur compte sur un volontarisme de chacun : là encore, on ne peut s’empêcher de penser aux mouvements citoyens qui ont émergé sur la planète, notamment en raison de l’urgence écologique. Cette résonance n’est cependant pas complète : dans un monde concurrentiel et mondialisé, il ne suffit plus de faire travailler les autres pour s’enrichir et le travail de la terre n’est plus le travail dominant dans la société. Comme ses contemporains, Carpenter n’a pas imaginé la société de services qui domine aujourd’hui en Occident. Cependant, la pensée qui repose sur l’opposition entre deux classes, tant dans les modes de vie que dans les habitudes de consommation, perdure, mais s’avère beaucoup plus diffuse. La colonne vertébrale de la pensée, à savoir l’anti-industrialisation à grande échelle, paraît de nouveau redevenir un idéal, mais davantage pour des questions environnementales qu’économiques ou philosophiques. A la fin du livre, Edward Carpenter se demande si « toute humanité a disparu de ce monde ? » (p.180). Certes non, mais les enjeux de sa survie ne sont peut-être plus les mêmes. Le « retour à la terre » fut utilisé comme un modèle à la fois par l’extrême droite conservatrice, mais aussi par l’extrême gauche dans un esprit collectif. Ici, on retrouve davantage la pensée anglo-saxonne dans la promotion de l’individualisme pour le bien-être de soi-mêmei, avant celui de la société.
Découvrir ce texte aujourd’hui revient à s’interroger sur nos modes de vie. Le style simple de l’écriture (amélioré par la traduction contemporaine), le découpage en chapitres et les exemples nombreux rendent cet essai accessible au plus grand nombre. La démonstration remarquable de l’écrivain, aux accents anarchistes, contribue aux questionnements de nos sociétés modernes, à l’ère post-capitaliste.
Auteur : Edward Carpenter
Traduction : Pierre Thiesset
Editions : L’échappée
Collection : Le Pas de côté
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