En bourreau il mourra
Le 25 août 2013
Une relecture dialectale, drôle et politique de la pièce de Victorien Sardou par un cinéaste qui n’a cessé de célébrer le peuple de Rome.
- Réalisateur : Luigi Magni
- Acteurs : Monica Vitti, Vittorio Gassman, Aldo Fabrizi, Umberto Orsini, Ninetto Davoli, Fiorenzo Fiorentini, Gigi Proietti, Marisa Fabbri, Gianni Bonagura, Goffredo Pistoni
- Genre : Historique, Comédie musicale
- Nationalité : Italien
- Durée : 1h44mn
- Titre original : La Tosca
- Date de sortie : 26 juin 1974
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– Sortie en Italie : 23 mars 1973
Une relecture dialectale, drôle et politique de la pièce de Victorien Sardou par un cinéaste qui n’a cessé de célébrer le peuple de Rome.
L’argument : Rome, 14 juin 1800. Le peintre Mario Cavaradossi recueille le patriote Cesare Angelotti, échappé du Château Saint Ange. Le baron Scarpia, qui dirige la police pontificale, se sert de la jalousie de la chanteuse Floria Tosca, amante de Cavaradossi, pour retrouver les traces du fugitif...
Notre avis : Le titre choisi en 1974 par le distributeur français du film de Luigi Magni le dit bien : cette adaptation de la pièce de Victorien Sardou se distingue des autres, à la fois de celles basées sur l’opéra (1900) de Giacomo Puccini (Carmine Gallone, 1956, avec le ténor Franco Corelli ; Gianfranco de Bosio, 1976 ; Benoit Jacquot, 2001) que de la Tosca réalisée en 1940 par Jean Renoir et Carl Koch dont elle se rapproche pourtant par certains parti-pris de mise en scène (les statues qui observent l’action, le soin apporté à la reconstitution historique).
- Gigi Proietti et Monica Vitti dans La Tosca (Luigi Magni 1973)
Mais c’est dans une veine bouffe et dialectale que le cinéaste, chantre inlassable du peuple romain, a relu le drame dont il respecte scrupuleusement la trame (final tragique compris) mais qu’il transforme en revue musicale brechtienne, jouant sur les changements abrupts de registres et l’incongruité des arrangements très années 70 qui jurent avec le cadre historique (sans parler de l’absence totale d’homogénéité vocale et stylistique entre les vrais chanteurs comme Gigi Proietti et les autres, ceux qui chantent quand même), laissant libre cours à une prolifération de jeux de langage le plus souvent intraduisibles en français, d’apartés, de commentaire et d’effets de distanciation avec un réjouissant sens du grotesque (le Scarpia de Gasman affublé d’une mantille noire ou face au miroir se rêvant en pape ; la reine de Naples, pimbêche aigrie) heureusement tempéré par des effets de jeu décalé que la Vitti maîtrise si bien (par exemple lorsque, face aux soldats venus l’arrêter à la fin, elle rectifie presque gentiment : Non casco, me butto / Je ne tombe pas, je saute !.
- Musique d’Armando trovajoli pour La Tosca (Luigi Magni 1973)
L’humour à l’oeuvre ici ne craint pas les facilités mais sait parfois être subtil et le message est clairement politique. Les représentants du pouvoir et leurs acolytes (les sbires Spoletta et Sciarrone prêts à toutes les bassesses) sont des pantins ridicules ou des monstres d’égoïsme cynique.
Tosca apparaît comme une artiste irresponsable (Faut-il les prendre aux sérieux ? demande le gouverneur, un Aldo Fabrizi en grande forme, à la reine) qui prendra conscience, trop tard, qu’il ne suffit pas de tuer les bourreaux et les oppresseurs d’un coup de couteau (Non basta ammazarli col coltello) pour les empêcher de nuire.
La mise en scène de belle tenue à défaut d’être toujours très inspirée, les dialogues pleins de verve caustique, des personnages secondaires hauts en couleur et la superbe photo de Franco di Giacomo font de cet hommage vibrant à l’insolence romaine un régal que seuls les italophones pourront pleinement savourer.
- La Tosca (Luigi Magni 1973)
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