Le 23 janvier 2021
Une comédie douce amère, profondément new-yorkaise, aux accents dandys, qui, derrière ce récit d’apparence légère et futile, raconte le désarroi et les faux-semblants d’une certaine bourgeoisie américaine. Une nouvelle fois, Woody Allen fait la démonstration de son immense talent de cinéaste.
- Réalisateur : Woody Allen
- Acteurs : Jude Law, Liev Schreiber, Diego Luna, Rebecca Hall, Elle Fanning, Selena Gomez, Cherry Jones, Timothée Chalamet
- Genre : Comédie dramatique
- Nationalité : Américain
- Distributeur : Mars Distribution
- Durée : 1h32mn
- Date télé : 21 février 2024 20:55
- Chaîne : Arte
- Titre original : A Rainy Day in New York
- Date de sortie : 18 septembre 2019
Résumé : Deux étudiants, Gatsby et Ashleigh, envisagent de passer un week-end en amoureux à New York. Mais leur projet tourne court, aussi vite que la pluie succède au beau temps… Bientôt séparés, chacun des deux tourtereaux enchaîne les rencontres fortuites et les situations insolites.
Critique : Le cinéma de Woody Allen prend ses racines à New York. Entretemps, il a fait voyager sa caméra dans les plus grandes métropoles romantiques d’Europe. Mais il revient de nouveau à ses amours premières, à sa ville fétiche, qu’il filme comme personne d’autre, depuis près de soixante ans. En quelque sorte, Allen est à New York ce qu’Almodóvar est à Madrid ou Barcelone. Il connaît ses couleurs, ses habitants et ses sonorités. Il sait capter les instants précis du poumon de Big Apple, comme un photographe à l’affût d’un cliché touristique. Du coup, cette mégalopole pluvieuse devient presque universelle aux yeux des spectateurs. On y reconnaît Central Park, les avenues bourdonnantes de magasins, et il se dégage de l’ensemble une incroyable sensualité. Ce n’est donc pas un hasard si le titre du film donne la vedette à la ville de New York, qui constitue une sorte de personnage lumineux à part entière, aux côtés de ses jeunes héros, Gatsby et Ashleigh. Mais plus que New York, c’est sur ses communautés bourgeoises et désinvoltes que le cinéaste pose son regard. Certes, et le reproche est facile, le metteur en scène, habitué à l’argent et aux éclats, décrit son propre milieu social et culturel, mais l’autocritique, le cynisme prennent le pas sur la facilité de l’autofiction.
- Copyright 2019 Gravier Productions
Plus Allen vieillit et plus son cinéma simplifie les effets, pour se concentrer sur l’écriture et une réalisation quasi minimaliste. Il n’y a plus de travellings, les portraits sont simples, et l’épure stylistique devient le leitmotiv principal. En fait, l’auteur de Manhattan est plus écrivain que cinéaste. Les dialogues recèlent des trésors de langage et l’on se surprend à penser que finalement, le film pourrait être remis en scène à l’infini, à la façon d’une pièce de théâtre. Allen cultive avec beaucoup de pudeur et de drôlerie, une écriture littéraire. Son jeune héros, Gatsby, est lui-même étudiant en lettres, se transformant ainsi en une sorte de double du réalisateur. On entend dans ses textes des grands auteurs comme Shakespeare certes, mais surtout la facétie moqueuse d’Oscar Wilde. Force est d’ailleurs de constater que le long métrage Un jour de pluie à New York est plus anglais qu’américain. Il y a chez tous ces personnages le célèbre flegme britannique et une sorte de suffisance bourgeoise, tout aussi drôle que désolante.
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Le film d’Allen sort quasiment en même temps que celui de Tarantino Once Upon a Time… in Hollywood. Ce n’est pas une coïncidence. Les deux monstres de cinéma signent en effet une sorte d’œuvre testamentaire, qui rend hommage au septième art, mais règle aussi des comptes avec le petit milieu protégé et insupportable des artistes reconnus. Le sujet principal est l’amour. Qu’on soit jeune, riche, célèbre, ou tout le contraire, le vrai désir qui traverse l’homme est de donner un sens à son existence, à travers le regard de ceux qu’il aime. Ici, les personnages s’adonnent aux mensonges, aux faux-semblants, sans pour autant céder à la schématisation outrancière. Il n’y a jamais de lourdeur dans le propos et le réalisateur ne faillit pas, en évoquant la caricature d’une jeunesse dorée. Allen aime ses personnages, et conséquemment les comédiens qui les incarne. Timothée Chamalet, Elle Fanning et Selena Gomez jouent ces jeunes gens avec délicatesse et drôlerie, aux côtés d’artistes plus affirmés, comme Jude Law et Diego Luna. Il n’y a aucune fausse note dans cette comédie plus cynique que romantique.
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Et bien sûr, comme souvent chez le cinéaste, il y a le jazz, susurré comme un souffle venu du cœur de la ville de New-York. Assurément, quand Timothée Chamalet s’installe derrière un piano et feint de jouer un morceau à la perfection, c’est la petite musique de Woody Allen qui surgit sur l’écran. Véritablement, Un jour de pluie à New York est le meilleur des films de Woody Allen, depuis une décennie.
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ceciloule 22 septembre 2019
Un jour de pluie à New York - Woody Allen - critique
Très fin, empli de nostalgie et de romantisme, il est vrai, ce film m’a néanmoins quelque peu déçue. Le spectateur reste un peu sur sa faim et assiste aux flâneries des personnages, déambulations qui ne mènent nulle part (à part dans les confins de New-York, de son milieu intellectuel et du jazz). Cette langueur travaillée satisfera sans aucun doute les rêveurs mais on regrette peut-être le manque de crédibilité ou de cohérence de certains passages... (plus d’infos ici : https://pamolico.wordpress.com/2019/09/18/lunaire-et-melancolique-un-jour-de-pluie-a-new-york-woody-allen/)