Les âmes grises
Le 19 décembre 2005
A la pointe sèche, Philippe Besson raconte une nouvelle fois la complexité des sentiments et ses conséquences.
- Auteur : Philippe Besson
- Editeur : Julliard
- Genre : Roman & fiction
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La mort d’un enfant, l’amour d’un homme... A la pointe sèche, Philippe Besson raconte une nouvelle fois la complexité des sentiments et ses conséquences. Une démonstration imparable.
C’est une photo en noir et blanc. Un jour d’automne bruineux et gris, un homme revient à Falmouth, un petit port de pêche austère des Cornouailles. En dépit des briques rouges et du néon du pub des pêcheurs, la ville et les vies sont sans couleur, sans bonheur. Seule une pointe de rose sur les joues d’une femme un peu compatissante réchauffe parfois le paysage. L’homme qui revient a également la peau rêche et grise et les idées en bichromie. Thomas Sheppard n’est pas attendu mais n’a jamais été oublié. Des années plus tôt, il est revenu d’une sortie en mer sans son fils de huit ans dont il a jeté le corps à l’eau. Infanticide ou accident, l’événement a entraîné le départ de Sheppard de Falmouth pour effectuer sa peine en prison. Paradoxalement, la mort de l’enfant va apprendre à Sheppard à faire des choix, accepter ou refuser et enfin rencontrer le bonheur.
Deux cent treize pages plus tard, le roman de Philippe Besson s’achève sur une photo couleur où le jaune d’un éclairage d’intérieur réchauffe un peu la nuit des Cornouailles.
Dépouillée, sans artifices, la prose de Besson est aussi austère que la vie à Falmouth. Les explications de Sheppard se succèdent tels les raisonnements d’une équation de mathématiques sans que jamais le narrateur ne s’appesantisse sur le superflu. Les formules tombent, inquiétantes mais toujours imparables. "Betty a raison : je ne lui ferais pas de mal. Je jette juste les enfants de huit ans par-dessus bord." Mais l’incompréhensible et l’inconcevable prennent peu à peu sens tandis que préjugés et analyses manichéennes volent en éclat. Il est en effet trop simple de juger un homme parce qu’il est revenu sans le corps d’un enfant, de même qu’il serait inepte de croire que la vie est peinte en noir et blanc. Ce dernier roman prouve encore une fois s’il le fallait le talent Besson pour graver à la pointe sèche la complexité des sentiments. Une démonstration littéraire imparable.
Philippe Besson, Un instant d’abandon, Julliard, 2005, 213 pages, 18 €
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