La confusion des sentiments
Le 22 octobre 2003
Une disparition, des amours plurielles et tout vacille. Le retour de Philippe Besson avec un huis clos aussi sombre que palpitant.
- Auteur : Philippe Besson
- Editeur : Julliard
- Genre : Roman & fiction
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En trois romans, il a gagné les bonnes grâces de la critique, obtenu quelques prix dont le Grand Prix RTL-Lire, bénéficié d’une adaptation à l’écran par Patrick Chéreau mais aussi et surtout il a conquis un public qui lui est désormais fidèle. Philippe Besson serait-il le nouveau petit prince de la scène littéraire contemporaine ? Tout le porte à croire mais comme toutes les notoriétés rapidement acquises, l’écueil n’est jamais très loin des sommets atteints. Les Cassandre devront néanmoins se taire car cet auteur âgé de trente-six ans continue de travailler imperturbablement à une œuvre de qualité pour le plus grand plaisir de ses lecteurs. En témoigne son quatrième et dernier ouvrage, Un garçon d’Italie, petit bijou de mécanique fine que ne renieraient en aucun cas les maîtres de l’horlogerie suisse.
Un jeune homme est retrouvé mort sur les rives de l’Arno. Sa compagne, Anna Morante, a le triste privilège de devoir reconnaître le corps à la morgue. Son amant, Leo Bertina, devra attendre quant à lui quelques jours pour apprendre dans la presse la disparition de celui qui a peut-être été le seul amour de sa vie. Fidèle supporter de la Fiorentina et amoureux désinvolte, Luca Salieri était en apparence un jeune homme charmant et tranquille. Sa mort va déchirer le voile sur ses affections, ses proches à commencer par Anna devant peu à peu ouvrir les yeux et percer les mystères du disparu. Du fond de sa tombe, Luca reste pourtant éminemment vivant et parle. Il pressent la tourmente à venir pour Anna et Léo qui relatent également, chacun à leur tour, les étapes de cette descente aux enfers.
Les monologues de Luca, Anna et Léo se font écho et tissent l’intrigue. Il ne s’agit plus seulement pour les héros comme pour le lecteur de comprendre les raisons d’une telle disparition, qu’elle résulte d’un suicide, d’un meurtre ou d’un accident. Il leur faut surtout cerner la véritable identité d’un être capable à lui seul de relier les êtres qui l’aimaient à la vie. Chacun peu à peu constate la dissolution inexorable de ce lien et s’enfonce dans la solitude. Léo se laisse de nouveau porter dans "ces lieux où ne se croisent que ceux qui ne possèdent plus rien, plus d’attaches, qui ont dû tout abandonner". Ses certitudes évanouies, Anna trébuche dans les méandres des supputations car "comment être tranquille quand on reçoit en héritage l’ambiguïté, l’équivoque, l’obscurité ?". Les sentiments se délabrent ainsi inexorablement tandis que le corps de Luca se décompose dans la terre de Florence.
Tel le médecin légiste qui dissèque le corps de Luca, Philippe Besson pratique une autopsie précise et approfondie de la psychologie de ses personnages. Les doutes comme les états d’âme permettent une analyse aussi neutre que possible. L’expression pudique de ces amours plurielles prime ainsi sur ce qui aurait pu prêter à une débauche de détails de mauvais goût. Animé d’un véritable souffle romanesque, ce sombre huis clos confirme le talent de Philippe Besson pour narrer sur un ton aussi âpre que palpitant la confusion des sentiments et ses conséquences.
Philippe Besson, Un garçon d’Italie, Julliard, 2003, 221 pages, 18 €
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