Le 5 juin 2020
Une méditation désabusée sur la responsabilité de chacun dans le crime de guerre, doublée d’une réhabilitation en bonne et due forme du devoir de mémoire comme vecteur cathartique de nos plaies ouvertes. Kate Winslet est magistrale.
- Réalisateur : Stephen Daldry
- Acteurs : Ralph Fiennes, Kate Winslet, Susanne Lothar, David Kross, Alexandra Maria Lara, Hannah Herzsprung, Lena Olin, Karoline Herfurth, Burghart Klaußner, Claudia Michelsen, Sylvester Groth, Linda Bassett, Marie Gruber, Matthias Habich, Fabian Busch, Martin Brambach
- Genre : Drame, Historique, Romance, Film de procès
- Nationalité : Américain, Allemand
- Distributeur : Société nouvelle de distribution (SND)
- Durée : 1h53mn
- VOD : YouTube, PlayStore, Orange, Universciné, MyTf1 VOD, MyCanal VOD
- Date télé : 30 octobre 2024 20:55
- Chaîne : Arte
- Titre original : The Reader
- Date de sortie : 15 juillet 2009
Résumé : Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale. Michael Berg, un adolescent, fait par hasard la connaissance de Hanna, une femme de trente-cinq ans dont il devient l’amant. Pendant plusieurs mois et tous les jours, Michael rejoint Hanna chez elle. L’un de leurs jeux consiste à ce qu’il lui fasse la lecture.
Critique : C’est l’histoire d’un amour secret, d’un amour impossible, entre une ancienne gardienne du camp de concentration d’Auschwitz et un jeune adolescent allemand d’après-guerre. Hannah Arendt, grande philosophe et politologue juive-allemande naturalisée américaine, affirmait lors de sa couverture médiatique du procès du dignitaire nazi Adolf Eichmann à Jérusalem en 1963 son intime conviction quant à l’identité véritable du principal intéressé. Ce que l’on pensait être une bête furieuse sans foi ni loi se révèle, au cours de ses multiples interrogatoires, un petit fonctionnaire médiocre. Arendt, comme l’écrivain Bernhard Schlink, auteur du roman Le Liseur, adapté par Stephen Daldry en 2008, en conclut que le mal, dans sa nature la plus inhumaine, ne réside pas dans l’extraordinairement grotesque, mais dans les petites choses, une quotidienneté à commettre les crimes les plus ignobles. Elle appellera sa théorie la "banalité du Mal".
Cette banalité peut uniquement être appréhendée comme une façon de décrire les mécanismes psychiques par lesquels ceux qui recourent à la violence, comme ceux qui en sont témoins, usent pour mettre en sourdine leurs convictions morales au service de l’engagement personnel. The Reader semble être l’équivalent cinématographique de cette analyse. Ce que le jeune Michael Berg avait connu d’Hanna Schmitz durant cet été caniculaire, et qui semblait éternel, relevait d’une romance inter-générationnelle éphémère, presque onirique. Ils se retrouveront tous deux dix ans plus tard dans des circonstances malheureuses. L’une est accusée de crime contre l’humanité, l’autre est étudiant en droit venu assister au procès de celle-ci. Le choc émotionnel est inévitable. Que vaut l’expérience sentimentale et charnelle que l’on a vécue avec un conjoint, au regard des actes qu’elle a commis, a posteriori ? En quoi le passé de quelqu’un peut-il vous affecter de façon exponentielle ? Comment se consoler d’avoir aimé un monstre ? Ces questionnements constituent le principal attrait du film.
Déjà réalisateur du remarquable The Hours, Stephen Daldry signe avec The Reader un moment de cinéma qui ne cède jamais au manichéisme, son scénario, d’une sobriété infaillible, bravant moult thématiques passionnantes comme cette "banalité du mal", en passant par la culpabilité et l’enfermement psychologique. Le film possède cette intelligence rare et nullement artificielle de poser un regard juste, s’abstenant d’une réponse définitive sur la situation politique de l’Allemagne d’après-guerre, alors prise dans une tumultueuse tempête sociétale. Que faire de notre passé ? Que faire de notre avenir ? L’Allemagne tente tant bien que mal de se reconstruire moralement et d’introduire auprès de ses citoyens le devoir de mémoire. Cette entreprise, aussi louable soit-elle, suscite un paradoxe des plus problématiques. Se racheter une conscience, une nouvelle image est un acte méritoire... Mais à quel prix ? Toute la sève de The Reader se contemple dans le regard affectueux que le long métrage porte sur ses personnages, pris malgré eux dans les ravages de la grande Histoire. A voir absolument.
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Norman06 28 juillet 2009
The Reader - Stephen Daldry - critique
La première heure est une agréable romance, dont l’atmosphère sulfureuse et érotique rappelle Le Diable au corps. Le récit se noie ensuite dans l’académisme du mélodrame juridico-sentimental, avec ce qu’il faut de violons, de maquillage d’acteurs vieillis, de simplification historique et de coups de théâtre prévisibles. Mais rien que pour les acteurs et la photo, cette machine à oscars mérite le détour et permettra 2 heures de détente.
roger w 31 juillet 2009
The Reader - Stephen Daldry - critique
Académique, classique ou tout simplement beau ? Personnellement, je trouve qu’un film qui sait provoquer une telle émotion ne peut pas être réduit à de telles étiquettes. Plongeant dans les ambiguités de l’histoire, Daldry livre une excellente adaptation du roman, à la fois sensuelle et passionnante. La seconde partie nouspermet d’assister à une magnifique histoire d’amour, pudique et pas si simple que cela. Un grand moment de cinéma, porté par des acteurs impeccables.
esdez 31 juillet 2009
The Reader - Stephen Daldry - critique
Enfin du cinéma plaisir. Quel bonheur de ressentir la naissance de l’amour entre deux êtres simples qui, s’il n’y avait les aléas sociétaux ne devraient que se consacrer à l’Amour. Quel plaisir ensuite de constater que certains(dont le cinéaste) sont capables de respirer l’amour exacerbé par l’impossibilté de la présence et de nous le restituer par la grâce des acteurs totalement imprégnés par leur histoire.Qu’il est doux d’aimer un souvenir, qu’il est nécessaire aux vrais amoureux de penser la présence de l’autre par tous les moyens.Ceux qui aiment véritablement comprendront.
Pour ce qui concerne la période choisie, elle ne reflète que la vérité simple que nous tous et quelque soit notre condition sommes soumis aux aléas de l’histoire que notre société engendre et qu’il n’y a qu’une solution à choisir : la bonne (qui ne deviendra bonne qu’après le choix de la masse).
Amoureux, venez explorer le grand amour.