Le 8 février 2020
Une île isolée, une nature étouffante, des luttes de pouvoir et une tension grandissante... Bob Sacochis met en scène un polar choral et touffu, pas toujours exempt de préjugés.
- Auteur : Bob Shacochis
- Collection : Totem
- Editeur : Gallmeister
- Nationalité : Américaine
- Traducteur : Sylvère Monod
- Date de sortie : 6 février 2020
- Plus d'informations : Le site de l’éditeur
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Résumé : Sur l’île antillaise de Sainte-Catherine se trouve un volcan en activité, au cratère recouvert d’un lac épais et chaud. Mitchell Wilson, un jeune expatrié américain, y mène des expériences pour le compte du Ministère de l’Agriculture. Mais voilà que la situation politique se dégrade, entraînant Mitchell au coeur des rivalités sanglantes du gouvernement. C’est aussi le moment que choisit la séduisante Johanna, son amour d’autrefois, pour réapparaître dans sa vie et détruire définitivement l’image paradisiaque de l’île. Désormais l’éruption devient inéluctable, car rien ne semble pouvoir contenir les forces de la nature ni les tensions humaines.
Notre avis : Bob Shacochis imagine une île volcanique, Sainte-Catherine, qu’il situe au cœur des Antilles et où il bâtit un huis clos étouffant – la nature paradisiaque devenant peu à peu un tombeau cauchemardesque.
Les personnages que l’auteur crée semblent être des cobayes qu’il aime à analyser, à étudier sous tous les angles. Il leur impose des situations plus ou moins complexes, fait grimper la tension, ajoute des ingrédients qui pourraient bien faire basculer le fragile équilibre sur lequel repose la vie insulaire. En effet, la hiérarchie raciale, entre blancs expatriés et noirs natifs, est au cœur de l’histoire (ou plutôt des histoires) qu’invente Bob Shacochis – le racisme n’étant jamais très loin… Était-il réellement nécessaire de différencier la manière de parler des insulaires de celle des immigrés ? Ces vies qui se frôlent, ces peaux de différentes couleurs qui doivent se supporter, voilà ce que choisit d’évoquer l’auteur, manquant parfois de tact et de finesse dans ses descriptions, ce qui s’avérera gênant à plusieurs reprises.
Shacochis, qui, en tant que membre des Peace Corps a été dépêché plusieurs fois dans les Caraïbes, sait, malgré tout, de quoi il parle. Son vécu est perceptible derrière les mots choisis, les situations qu’il décrit, tellement improbables qu’elles ne peuvent se fonder que sur un fond de vérité. Le style, outre ces imitations d’accent, caricaturales et flirtant avec un racisme prudent, a quelque chose d’indéniable. Les descriptions de la forêt, de la plage et de l’océan sont saisissantes et les métaphores tombent toujours là où il faut, conférant du lyrisme à la crudité la plus hardie.
Les luttes de pouvoir, les luttes d’influences aussi, tantôt cubaines, tantôt américaines, la corruption et les divergences culturelles forment la base de ce roman. Un brin de vaudou vient souligner les différences de croyances, de rapport à la vie et à la mort, à la sexualité. Richesse et pauvreté se superposent pour ne plus former qu’une seule communauté, isolée, soumise à une cohabitation forcée dans la moiteur de l’île. La touffeur fait s’échauffer les corps, monter les passions et les colères, excite le désir. L’homme est sur un fil, équilibriste qui oscille entre civilisation et bestialité, entre pulsion et instinct primaire et problèmes sociétaux. La moindre étincelle pourrait bien mettre le feu aux poudres, embrasant les arbres noueux et asséchant l’atmosphère humide, dévastant les relations de pouvoir et les couples établis, pour ne laisser qu’une traînée de cendres, semblable aux vestiges d’une cérémonie vaudoue étrange.
Bob Sacochis - Sur les eaux du volcan
Editions Gallmeister
688 pages
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