Le 4 avril 2019
Le grand succès de David Vann est un roman âpre, dont l’épilogue ouvre des abîmes.
- Auteur : David Vann
- Editeur : Gallmeister
- Genre : Roman & fiction
- Prix : MÉDICIS ÉTRANGER
- Date de sortie : 5 janvier 2010
- Plus d'informations : Le site officiel
Résumé : Une île sauvage du Sud de l’Alaska, accessible uniquement par bateau ou par hydravion, tout en forêts humides et montagnes escarpées. C’est dans ce décor que Jim décide d’emmener son fils de treize ans pour y vivre dans une cabane isolée, une année durant. Après une succession d’échecs personnels, il voit là l’occasion de prendre un nouveau départ et de renouer avec ce garçon qu’il connaît si mal. La rigueur de cette vie et les défaillances du père ne tardent pas à transformer ce séjour en cauchemar, et la situation devient vite incontrôlable. Jusqu’au drame violent et imprévisible qui scellera leur destin. Sukkwan Island est une histoire au suspense insoutenable. Avec ce roman qui nous entraîne au cour des ténèbres de l’âme humaine, David Vann s’installe d’emblée parmi les jeunes auteurs américains de tout premier plan.
Copyright Gallmeister, 2010
Notre avis : Dès le début, on subodore que ce huis clos, accentué par un espace claustrophobique -une île-, tournera au désastre. C’est peu de dire que le roman de David Vann surprend : il foudroie, non seulement car la mort frappe avec une violence implacable, aussi sèche qu’un coup de fusil, mais parce que cette tragédie n’engendre aucune rédemption pour celui qui la provoque.
Les faits d’abord : Jim, un homme divorcé et son fils de 13 ans, Roy, choisissent de s’exiler sur une île du Sud de l’Alaska. Ce séjour volontaire, conçu par le père comme une hypothétique renaissance au contact de la nature, épouse le cycle des journées, scandées par la chasse, la pêche, le bricolage, le souci de reconstruire à la fois de matière affective et matérielle un lien que les circonstances ont distendu. Pourtant, dès le début, quelque chose ne tourne pas rond : chaque nuit, Jim sanglote. Sur quoi ? Les ruines d’une faillite conjugale ? Son égoïsme qui lui a fait rater sa dernière relation ? Son incapacité à aimer son fils de manière sereine ? Plusieurs fois, le père manque d’achever son sinistre parcours : on le voit d’abord perdu dans les bois à la recherche d’un ours, puis remis d’une chute par miracle et par la volonté d’un adolescent obstiné, jusqu’à déjouer les lois naturelles : traîner un corps moribond, le ramener jusqu’à la cabane. Roy fera davantage : il le soignera, puisqu’il s’agit là d’un père malade. Après, tout a l’air simple : l’existence reprend son cours -comme si de rien n’était- et chacun s’efforce de suivre les tâches qui lui sont assignées pour survivre à ce milieu hostile. Mais tout de même, on se dit que le prochain événement laissera un orphelin.
C’est alors que l’improbable survient : validant la lâcheté de Jim, le récit ne lui accommode pas la possibilité d’une décision, aussi radicale soit-elle. Elle incombera à son fils. Au lieu de quoi, le père, devenu un homme dont le drame personnel n’engendre aucun nom, est condamné à traîner un corps et sa tristesse dans un itinéraire sans issue. Au final, Jim paiera cash la somme de ses faiblesses.
Inspiré de sa propre existence, mais prenant à rebours la relation au père disparu, David Vann liquide, dans un style à la fois âpre et précis, les fantômes d’une enfance maudite.
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Wivine Mathys 7 juillet 2019
Sukkwan Island - la critique du livre
Un livre magnifique, une belle plume. Le papa de David Vann s’est suicidé en Alaska où il vivait depuis longtemps, David Vann y est né mais après de divorce de ses parents, il a suivit sa mère en Californie, il passait les étés chez son père en Alaska. Un jour, lorsqu’il avait 13 ans, son père lui demanda de vivre avec lui dans une cabane éloignée de tout pendant une année, David a refusé. Son papa a toujours été très mal dans sa peau...Dans ce livre, David qui s’est toujours senti non pas coupable ( ou un tout petit peu ? ) mais bouleversé par la fin si triste et violente de son papa, imagine comment les choses se seraient passées si il avait suivit son papa et accepté de vivre toute une année en Alaska dans cette cabane éloignée de tout, il imagine les conséquences que cela aurait eu pour l’un comme pour l’autre...Je ne vais pas en raconter plus, je ne trouve pas les mots pour vous dire à quel point cet écrivain sait vous captiver de la première à la dernière page. Certains lecteurs le trouvent trop sombre, mais nous pourrions reprocher cela a un tas d’autres excellents écrivains comme Cormac McCarthy, Daniel Woodrell, Ron Rash, notre regretté William Gay ! David Vann fait aussi partie de ces écrivains qui ont un art tout à fait particulier et que j’aime chez eux : celui de faire de la nature un personnage à part entière avec des descriptions tout bonnement magnifiques !
Jérémy Gallet 7 juillet 2019
Sukkwan Island - la critique du livre
Entièrement d’accord avec votre commentaire.