Soy Cuba - Mikhail Kalatozov - critique

Critique : Soy Cuba a eu la chance d’être redécouvert, grâce à Francis Ford Coppola et Martin Scorsese en 1992. Ils lui ont alors redonné vie en lui trouvant un distributeur américain. Il sort à présent en France dans sa version d’origine, en espagnol.
Il ne s’agit pas là de n’importe quel film, et déjà en 1958, son réalisateur recevait une Palme d’or à Cannes pour Quand passent les cigognes. En 1961, Mikhail Kalatozov se lance dans le projet un peu fou de raconter la révolution cubaine. Le film, à sa sortie, n’est pas du tout compris, et surtout pas à Cuba. Pourtant, c’est un vrai chef-d’œuvre de mise en scène et d’esthétique. Ses images lumineuses rendent compte de toute la fièvre cubaine des années 1950. Son usage du noir et blanc met en valeur les contrastes d’un pays rural qui s’urbanise.

Soy Cuba réunit silences propres à la mort d’un régime et musiques contribuant à sa profondeur esthétique. Le film est empli de portraits poétiques. Derrière l’amour du communisme apparaît surtout la quête de liberté. Une voix off explique avec mélancolie entre chaque séquence ce qu’est Cuba. Dans des instants si forts, seuls les visages des personnages peuvent encore s’exprimer, leurs bouches se ferment devant tant de bouleversements. Un moment sublime. Encore plus poignant quarante ans plus tard, quand on sait combien ces espoirs ont été bafoués.

Les suppléments : Une très intéressante interview de Martin Scorsese qui revient, durant vingt-six minutes, sur les liens entre Soy Cuba et ses films et le cinéma russe classique. Trois scènes sont commentées par Samuel Blumenfeld, critique de cinéma sous la thématique suivante : "Quand l’esthétique prend le pas sur le politique".