Palimpseste
Le 17 décembre 2003
Sous forme de comédie légère, une dénonciation féroce du régime coréen des années 30 et de l’occupation japonaise.
- Auteur : Ch’ae Mansik
- Editeur : Actes Sud
- Genre : Roman & fiction
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Avec Sous le ciel, la paix, Ch’ae Mansik a réussi le tour de force de dénoncer le régime coréen des années 30 et l’occupation japonaise, à travers une comédie légère sur l’avarice d’un riche paysan. Une satire qui porte le poids de l’Histoire.
Maître Yun a quitté sa province pour s’installer à Séoul avec sa famille à rallonge. Une ribambelle de belles-filles, de belles-petites-filles, d’enfants plus ou moins légitimes, de domestiques... Une cour sur laquelle il règne en despote. Un despote sans cesse contrarié par ces proches qui essayent de lui extorquer de l’argent. Car ce paysan enrichi est très riche. À tel point que, quand il s’agit d’argent, le grippe-sou triche, ment et use de toute sa mauvaise foi. Mais le vieil avare a deux faiblesses : les plaisirs de la table et les jeunes filles sont autant de dépenses onéreuses. Comme les pots-de-vin qu’il verse à droite et à gauche pour assurer ses opérations frauduleuses.
En filigrane, le texte dresse un tableau de la situation précaire de la société coréenne pendant l’occupation japonaise. Alliances et spéculations douteuses, la fortune des uns se bâtit sur la misère des autres, les usuriers vivent des périodes fastes. Le vieillard de Ch’ae Mansik est un bouffon, certes, mais un bouffon réac et tyrannique, proche du fascisme japonais, et met le lecteur mal à l’aise.
Dans son pays, Ch’ae Mansik est un acteur important de l’histoire littéraire coréenne. Il a fait partie de ces écrivains qui ont réinventé le roman coréen après les années d’errance de ce genre dans un pays tiraillé entre deux langues politiquement connotées, le chinois et le coréen. Ch’ae Mansik et ses confrères ont ainsi choisi l’humour et la satire afin de ne pas s’attirer les foudres de la censure. Une censure à travers laquelle est passé miraculeusement Sous le ciel, la paix (titre ironique), critique acerbe du régime en place à l’époque où le roman a été publié (1934). Ce livre est un pamphlet très habile, à la proue duquel trône un personnage caricatural, emblématique de son temps, bête et méchant. Un grand bravo aux traducteurs, Ch’oe Yun et Patrick Maurus, qui ont réussi à restituer les jeux de langage et les différents dialectes en en faisant une œuvre facile d’accès pour les Occidentaux.
Ch’ae Mansik, Sous le ciel, la paix (T’aep’yong ch’onba, traduit du coréen par Ch’oc Yun et Patrick Maurus), Actes Sud, 2003, 270 pages, 21,90 €
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