Le 9 décembre 2022
L’entrée fracassante de Steven Soderbergh dans la cour des grands réalisateurs. Un film trouble et vénéneux.
- Réalisateur : Steven Soderbergh
- Acteurs : Andie MacDowell, James Spader , Peter Gallagher, Laura San Giacomo, Ron Vawter
- Genre : Drame
- Nationalité : Américain
- Distributeur : AMLF Distribution
- Editeur vidéo : MGM/United Artists
- Durée : 1h39mn
- Date télé : 20 mai 2024 21:00
- Chaîne : France 4
- Titre original : Sex, Lies and Videotape
- Date de sortie : 4 octobre 1989
- Festival : Festival de Cannes 1989
Résumé : Graham Dalton collectionne les interviews video de femmes qui racontent sans embages leur vie sexuelle. De retour dans sa ville natale il retrouve un ancien copain de fac qui a "reussi" et sa femme. Cette rencontre va avoir pour tous des consequences surprenantes.
Critique : Contrairement à ce que l’on pense, Sexe, mensonges et vidéo n’est pas tout à fait le premier long métrage de Steven Soderbergh. Après avoir travaillé comme monteur à Hollywood à la sortie du lycée, celui-ci a en effet dirigé en 1986 le film-concert du groupe Yes avant de se lancer dans la fiction par un court métrage intitulé Winston. Puis c’est (déjà) la consécration avec une Palme d’or à 26 ans (il détient d’ailleurs toujours le titre honorifique de plus jeune cinéaste primé de la sorte à Cannes) pour le film dont il est ici question et qui remportera également un joli succès auprès du public.
Tout au long de sa prolifique carrière, Steven Soderbergh oscillera ensuite entre succès public et critique, entre œuvres exigeantes et films plus légers. Après Sexe, mensonges et vidéo, il enchaîne avec deux films à petit budget qui ne rencontrent pas le même succès : Kafka (1991), tourné en partie en noir et blanc, et King of the hill(1993). Après le succès d’estime de A fleur de peau (1995) et l’ovni Schizopolis (1996), Soderbergh réussit à marier exigences commerciales et style personnel pour s’imposer définitivement à Hollywood avec un triptyque gagnant : Hors d’atteinte (1998), qui réunit George Clooney et Jennifer Lopez, Erin Brokovich avec Julia Roberts (2000) et Traffic (2001), qui obtient l’Oscar du meilleur film. Mais il n’abandonne pas pour autant ses ambitions formelles, comme le prouvent le très beau L’Anglais (2000) et surtout Full frontal (2003). Il décroche son plus beau succès public en 2002 avec Ocean’s eleven (dont il écrit actuellement la suite), et s’attaque avec moins de bonheur à la science-fiction avec Solaris, remake du film de Tarkovski.
Sur une partition moderne de l’éternelle rengaine "la femme, le mari et l’amant", Steven Soderbergh déconcerte et séduit à travers un style personnel, épuré et troublant. Un peu à la manière d’un Jarmusch, il bâtit le film sur des petits détails et des atmosphères, le faisant basculer de la comédie au drame psychologique en un plan. Il filme également magnifiquement James Spader et Andie McDowell à l’intérieur des murs blancs de la grande maison de Graham. La rencontre entre les deux personnages vaut d’ailleurs à elle seule de voir le film. Soderbergh est également à l’origine de l’utilisation grandissante de la caméra comme personnage à part entière dans le cinéma d’aujourd’hui. Il questionne ainsi à sa façon le rôle du spectateur au cinéma, ainsi que les relations troubles existant entre réalisateurs et actrices (Ann devenant à son tour actrice dans le "film" dirigé par Graham).
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catA 19 novembre 2019
Sexe, mensonges et vidéo - Steven Soderbergh - critique
Merci pour cette belle critique qui resitue le film dans une trajectoire. C’est un grand souvenir, un film d’émotions et de sensations qui peut-être ne gagne pas à être revu. Je n’ose pas de peur d’être déçue ! Le mélange de désir et de frustration sexuelle peut rappeler certains personnages de David Lynch, un peu étranges, en marge du monde, l’observant de côté.