Scoop - la critique du film

Critique : Scoop se présente comme un polar marchant sur les traces de l’excellent Meurtre mystérieux à Manhattan, œuvre incontournable de la filmographie allénienne.
Les investigations sont menées par un des ces duos dont raffole Woody : la jeune intrépide un brin naïve et le pusillanime décalé, un brin gaffeur. Dans le film-retrouvaille avec la muse Keaton, sorti en 1993, l’actrice menait l’action tambour battant quand son mari, incarné par Allen, ne cessait de traîner les pieds, de jouer à rebours, contre sa fonction d’adjuvant. Cet attelage, à l’efficacité comique redoutable, le réalisateur en exploite à nouveau les ressources, même si l’on peut reprocher cette fois-ci la dimension -quelque peu- illustrative de l’histoire, alors que Meurtre mystérieux à Manhattan offrait une énigme plus indécise, réellement hitchcockienne. Qu’à cela ne tienne, devinant l’issue bien avant qu’elle ne se produise, le spectateur a le loisir d’apprécier le jeu des masques auquel se prêtent les deux protagonistes, notamment pour infiltrer la famille noble dont est issu le présumé meurtrier. La dualité -un des motifs récurrents des films de Woody Allen- s’incarne ici dans une série de scènes où la magie, l’usurpation d’identité, la duplicité mènent la danse... jusqu’aux montages parallèles qui juxtaposent la vie et la Mort, allégorie vivante menant les âmes sur un fleuve, comme Charon sur le Styx (la représentation de cette Faucheuse rappelle évidemment un autre film du réalisateur, Guerre et Amour, sauf qu’il n’existe pas, ici, de relation primesautière, comme si la perspective du trépas s’était considérablement assombrie).
Ainsi, l’œuvre offre une diversité d’interprétations -c’est le lot des créations artistiques les plus intéressantes-, ce qui la rend aussi plaisante pour les néophytes que pour les cinéphiles avertis, lesquels ne manqueront pas d’apprécier le clin d’œil à M. le Maudit, à travers l’usage de Peer Gynt dans le générique de fin. Le binoclard new-yorkais connaît ses classiques.