Salon du Livre 2014 - Les dragons de papiers rugissent au Salon du Livre

A la lecture de ce titre, d’emblée, vous vous dites « Prenons garde, nous risquons de nous faire déchirer, voire même dévorer par ces horribles bêtes venues tout droit d’Orient ». Ne vous inquiétez pas, le Salon du Livre ne risquerait pas vos vies et des désagréments avec la SPA en important des dragons, fussent-ils de papiers, sans autre forme de précaution.
Les dragons dont nous parlons ici sont les Golden Dragon Awards de Chine, la récompense ultime pour les auteurs du neuvième art outre-Sibérie.
Et le Salon du Livre leur rend un hommage en nous présentant 131 illustrateurs nommés ou vainqueurs aux Golden Dragon Award de 2004 à 2013.
Mon dieu, quelle folie nous attend donc ! Des dessins en pagaille, un dédale pour se perdre dans ces oeuvres si riches, une scénographie à transformer en carré les anneaux de Saturne ?
Euh... Bon, ne nous emballons pas. Outre les neuf parois grises de contreplaqué sur lesquelles seul un fou ou un saboteur oserait s’appuyer et une petite surface moquettée de noire, il n’y a pas vraiment d’espace pour que ce petit monde s’exprime.

Ah, sobriété du support, magie des images

Alors classement chronologique, et panneau pour Li Kun Wu, invité du Salon l’année dernière, qui a droit à des planches encadrées (attention, plusieurs planches, pas juste une ou deux) et zou !

Li Kun Wu, star de l’exposition avec huit planches !

Les 131 auteurs ont un dessin chacun, de tailles variées, allant de la carte postale au A2 spacieux. Et la messe est dite !
Et quand on voit la richesse des talents récompensés, la variété des extraits, l’originalité de certaines approches graphiques, on ne peut que regretter ce cadre si grisâtre et si petit.

Autant de talent sur si peu d’espace

« Vous comprenez, les murs gris permettent de faire ressortir l’impact des couleurs, la puissance graphique des œuvres ! »
Oui, et la moquette noire permet de ne pas voir les tâches...
Il est un peu triste de se dire qu’en hommage à la ville de Shanghai, invitée d’honneur de ce 34ème salon du livre, et pour les cinquante ans des relations Franco-chinoises, on offre neuf plaquo placardés de dessins.
Peut-être que cette ambiance grise et noire renvoie à la simplicité bouddhique et à la vanité des choses, nous rappelle que le contenant doit s’effacer et être négligé devant le contenu. Oui, peut-être sommes-nous trop éloignés des quatre – ou cinq- vertus bouddhiques pour saisir le sens de tout cela.

Il faut néanmoins reconnaître deux points importants :
Tout d’abord, la place fait cruellement défaut au Salon du Livre et les expositions ont peu d’espace pour s’exprimer. Aussi, le fait que cette expo existe est déjà un point fort.
Ensuite, le fait que le choix se porte sur le neuvième art est un autre point important, qui resserre encore les liens entre littérature et BD au Salon du Livre. Après tout, cela aurait pu être une expo d’oeuvres de calligraphies.

Maigre échantillon de la richesse des extraits exposés

Enfin, ne vous fiez pas à l’âpreté et à la mocheté – non, rectifions, rectifions - à l’absence de beauté du cadre, car le talent est là, perles à l’état brut, pépites brillant de mille feux, éclats d’étoiles tombés devant nos yeux. Alors ne boudez pas votre plaisir, car voir ces œuvres en vrai, profiter de ces couleurs, sentir le talent vibrer devant vos yeux, c’est une occasion à ne rater sous aucun prétexte si vous vous rendez au salon du Livre. C’est un moment rare où vous prenez conscience de l’énorme talent qui foisonne en Chine. Un talent qui n’a pas à rougir devant le Manga Japonais ou le Manhwa Coréen !