Une violence indicible
Le 3 mai 2006
Un roman sombre où la souffrance endosse le rôle de personnage principal.
- Auteur : Sherko Fatah
- Editeur : Métailié
- Genre : Roman & fiction
- Nationalité : Allemande
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L’auteur de En zone frontalière signe un second roman sombre, en partie situé en Irak, et où la souffrance endosse le rôle de personnage principal.
De façon fortuite, par curiosité ou par erreur, Michael, jeune étudiant oisif, s’immisce dans la vie de clandestins irakiens cachés en Allemagne. Happé, il se heurte à un monde qui lui est fondamentalement étranger. C’est en partie pour le comprendre qu’il traverse l’Europe pour rejoindre l’Irak, alors à feu et à sang.
Dès le départ, Michael tombe sous le charme d’une histoire qui n’est pas la sienne. Amoureux d’une femme qui l’éconduit mais le fascine, séduit par un charismatique ami qui l’aimante et le rejette, et pris de pitié pour un vieillard qui ne semble pas si sénile, il est en butte à des situations d’échec. Au gré de balades le long des chantiers, dans les ateliers, les cours d’immeubles ou les musées, Michael se retrouve en proie à sa propre incompréhension, dépassé par son propre comportement. La première partie du roman, située en Allemagne ne dit rien d’autre que ce désarroi de l’attirance et du rejet, de part et d’autre de ces deux mondes. Le récit est alors aussi gris que la ville.
Mais quand, ballotté par ses sentiments et sans vraiment savoir pourquoi, Michael accepte d’acheminer un 4x4 en Irak, le récit s’éveille. Les rôles s’inversent, Michael devient l’étranger. Dans ce voyage sur les traces du vieillard exilé, Petit Oncle, commence une narration dure, forte et exigeante. L’intuition est une douleur, la douleur, un quotidien.
Pour dire l’hermétisme de ces deux mondes qui se regardent sans se comprendre, Sherko Fatah a choisi une langue-scalpel, précise, et froide comme les horreurs qu’il décrit. Regrettable, peut-être, cette froideur exclut l’empathie. Le dégoût remplace toute compassion. Les scènes les plus crues, sont, à l’instar de l’ouverture du livre, souvent des scènes de violence animale. Comme si l’homme était encore plus "bête" et, de ce fait, ne pouvait susciter aucune émotion. Le propos est terrible. Et la lecture rude, non par ennui, mais par effroi. Car le principal sujet n’est autre que la peur, la méchanceté humaine, la cruauté à l’état le plus brut. Et tout l’univers de Petit Oncle n’est qu’un lent, très lent crescendo de violence. Sans espoir.
Sherko Fatah, Petit Oncle (traduit de l’allemand par Olivier Mannoni), Métailié, coll. "Bibliothèque allemande", 2006, 231 pages, 20 €
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