Le rideau déchiré
Le 8 décembre 2009
La prestation enflammée de Romain Duris amplifie les qualités du scénario de Patrice Chéreau et fait de Persécution une œuvre juste et approfondie sur la construction de l’identité de l’homme.
- Réalisateur : Patrice Chéreau
- Acteurs : Romain Duris, Jean-Hugues Anglade , Charlotte Gainsbourg, Michel Duchaussoy, Tsilla Chelton, Hiam Abbass, Gilles Cohen, Alex Descas, Corinne Masiero
- Genre : Drame
- Nationalité : Français
- Date de sortie : 9 décembre 2009
– Durée : 1h40mn
– Entretien avec Patrice Chéreau
La prestation enflammée de Romain Duris amplifie les qualités du scénario de Patrice Chéreau et fait de Persécution une œuvre juste et approfondie sur la construction de l’identité de l’homme.
L’argument : Un inconnu s’introduit dans l’appartement de Daniel, un homme très occupé mais solitaire, qui entretient une liaison orageuse avec une jemme femme. Les visites à répétition de ce désaxé mettent en péril l’histoire d’amour de Daniel et Sonia...
Notre avis : Persécuter ou être persécuté, telle pourrait être la question. Le long-métrage s’ouvre sur une séquence dans un métro, à heure de pointe. Une sans domicile fixe quémande quelques pièces de monnaie, dans l’indifférence générale. Indignée, elle gifle une femme et personne ne réagit là non plus. Daniel, le personnage incarné par Romain Duris, présent dans la rame, rattrape sur le quai la personne agressée et, au lieu de la réconforter, la questionne sur les défauts de sa personnalité qui ont pu provoquer la colère de son agresseur ! Le héros fonctionne ainsi : très entier, il croit aux vertus de l’honnêteté et se permet de refaire le portrait de tout le monde, avec une acidité parfois effrayante. Toute vérité est bonne à dire, selon Daniel. Néanmoins, l’intransigeance avec laquelle il juge autrui est valable pour lui également et le pousse régulièrement à se remettre en cause, le rendant pour le moins malheureux.
- © Mars Distribution
Cet exigeant personnage est confronté à un homme qui le harcèle et lui assure qu’il l’aime. Même une fois la frayeur passée de l’intrusion de cet individu chez lui, il refuse de créer le moindre lien avec lui. Bien que l’intrus soit légèrement dérangé, on constate vite qu’il n’est pas agressif, seulement en recherche de compagnie pour combler sa solitude et c’est Daniel qu’il a choisi. Ce dernier accepte seulement de se trouver dans la même pièce que lui mais n’envisage pas de proximité autre, aucune sympathie. Le personnage de Romain Duris refuse de prendre l’amour là où il se trouve, même auprès de Sonia, sa compagne, car il est incapable de le rendre.
Le fou disparaît assez vite, et ne réapparaît que ponctuellement ; on finit par l’oublier. Mais, dans le fond, il est toujours là, il veille. Cet homme dérange Daniel car il lui pose les vraies questions ; il souhaite comprendre pourquoi il ne veut pas le serrer dans ses bras, ce que signifient ce refus d’attachement, cette intolérance au bonheur. Le fou apparaît en définitive lorsque ces questions dépassent complètement le personnage principal. On peut distinguer deux individualités, le fou et Daniel, mais ils ne forment en fin de compte qu’une seule et même personne. Ils fonctionnent sur un principe dual : le fou conteste Daniel et n’a de raison d’être que par rapport à lui.
- © Mars Distribution
Le héros de Persécution est ainsi un personnage complexe. L’interprétation de Romain Duris est troublante dans la mesure où il incarne un homme obsessionnel et pourtant parfaitement « normal ». Sans excès, l’acteur offre au rôle une réelle profondeur et étoffe la personnalité de Daniel, en le laissant paraître toujours au bord de la colère, même lorsqu’il pourrait être heureux. Son double, Jean-Hugues Anglade, constitue un homme étrange, que le comédien réussit à rendre attachant, presque risible par ses gestes maladroits et ses yeux si naïfs, en opposition avec son visage qui commence à être marqué par l’âge. Patrice Chéreau dirige ses acteurs avec précision et obtient d’eux des prestations saisissantes. A noter, la présence d’Alex Descas incarnant le seul personnage « stable » du film, qui apporte une douceur lumineuse à l’ensemble, et dont les échanges avec Charlotte Gainsbourg sont un mélange de lucidité et de calme.
- © Mars Distribution
Persécution est un film fort où les interrogations et les angoisses de chacun placent le long-métrage dans une réalité étrange, à la lisière du fantastique mais qui n’évoque finalement que les questionnements inhérents à la construction de l’identité de tout individu. Le héros se croit persécuté, mais ce n’est qu’une impression, une sensation liée à son attachement à maîtriser totalement son environnement - ce qui l’empêche d’appréhender les réactions imprévues de son entourage qu’il perçoit dès lors comme une atteinte personnelle. Doté d’un scénario très écrit, Persécution expose des protagonistes dont les personnalités sincères sont approfondies et apportent un vrai regard sur l’homme d’aujourd’hui.
- © Mars Distribution
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Norman06 12 décembre 2009
Persécution - la critique
Qu’est-il arrivé au brillant Patrice Chéreau ? Rien à sauver dans cette œuvre manquée, mal écrite, mal filmée, avec de bons acteurs mal dirigés, et qui tourne en rond depuis le pré-générique. On aurait aimé de la flamme dans ce récit au synopsis prometteur. Ce n’est qu’un feu de paille. Quel gâchis !
Frédéric Mignard 10 avril 2010
Persécution - la critique
La complexité des rapports humains vu par Chéreau dans un film austère, mais souvent passionnant.