Le boxeur silencieux
Le 23 mai 2013
Deux ans après l’excellent Drive, Nicolas Winding Refn retrouve Ryan Gosling pour Only God Forgives, polar noir, violent et amoral se déroulant à Bangkok. L’occasion pour le cinéaste danois de renouer avec son cinéma le plus radical.
- Réalisateur : Nicolas Winding Refn
- Acteurs : Kristin Scott Thomas, Ryan Gosling
- Genre : Drame, Thriller
- Nationalité : Danois
- Durée : 1h30mn
- Date de sortie : 22 mai 2013
- Festival : Festival de Cannes 2013
Deux ans après l’excellent Drive, Nicolas Winding Refn retrouve Ryan Gosling pour Only God Forgives, polar noir, violent et amoral se déroulant à Bangkok. L’occasion pour le cinéaste danois de renouer avec son cinéma le plus radical.
L’argument : À Bangkok, Julian, qui a fui la justice américaine, dirige un club de boxe thaïlandaise servant de couverture à son trafic de drogue.
Sa mère, chef d’une vaste organisation criminelle, débarque des États-Unis afin de rapatrier le corps de son fils préféré, Billy : le frère de Julian vient en effet de se faire tuer pour avoir sauvagement massacré une jeune prostituée. Ivre de rage et de vengeance, elle exige de Julian la tête des meurtriers.
Julian devra alors affronter Chang, un étrange policier à la retraite, adulé par les autres flics …
Notre avis : Comme pour annoncer les drames qui se profilent, Only God Forgives débute par des gongs, qui ne cesseront de résonner tout au long de son déroulement. Nous sommes à Bangkok. Des enfants combattent sur l’unique et imposant ring de la salle de boxe. Julian et Billy les regardent, attendent le vainqueur pour lui donner sa récompense, une liasse de billets. Bientôt, Billy se fera sauvagement massacrer pour avoir tué une prostituée. Le film raconte alors une histoire mince, celle d’un homme à la recherche de l’assassin de son frère, qui ne constitue finalement qu’un prétexte à la conception d’une matière explosive et colorée.
Beaucoup réduiront, à tort, Only God Forgives à un unique exercice de style. Son scénario, il est vrai métaphorique comme tous les films de Refn, dispose d’une véritable profondeur. Mysticisme, traditions et frustration sexuelle constituent les principaux ingrédients de ce shoot d’adrénaline où les hommes n’ont leur place que dans l’adversité. L’arrivée de Crystal, mère de Julian interprétée par l’excellente Kristin Scott Thomas, ne fera qu’accentuer le sentiment d’assister au déploiement des plus bas instincts - la femme est une manipulatrice incestueuse qui consume ses fils en les comparant par la taille de leur sexe. Pas étonnant alors de voir en Julian l’homme châtré à qui la pénétration est refusée.
Only God Forgives est une thérapie, un moyen pour son cinéaste d’exprimer avec radicalité sa profonde fascination pour une violence qu’il n’a jamais cessé de mettre en scène. Ici, la violence est partout, dans les regards, les poings, les sexes, les attitudes, et s’exprime en accord avec une musique tout aussi coléreuse. Ce sont les coups qui dirigent les personnages, la sauvagerie qui justifie leur existence. Les longs couloirs sont filmés comme d’immenses cercueils colorés, théâtres de terribles atrocités, tandis que les salles de spectacle donnent l’occasion aux personnages d’exposer leur talent dans l’élaboration de terribles mises à mort.
Si le film dispose de scènes lentes et très descriptives, à la limite de l’abstraction, son rythme reste des plus soutenus. Les nombreuses ellipses y sont pour quelque chose, elles qui forment la base d’une narration cérébrale tissée sur le va-et-vient incessant des personnages. Les bas-fonds de Bangkok sont en effet filmés à la manière d’un corps humain gorgé de sang où l’immense dragon qui domine le club de boxe s’apparente au cœur d’un organisme meurtri par les coups, alors que les travellings latéraux poussent, littéralement parlant, les personnages à l’action.
Inutile de préciser que Nicolas Winding Refn renoue clairement avec son cinéma le plus radical, celui qui a forgé sa réputation de cinéaste choc. Drive était la manifestation chez lui d’un traumatisme heureux, qui permit de juxtaposer à son style caractéristique la trame d’une romance aux multiples aspects. Only God Forgives, lui, renoue avec Le Guerrier Silencieux, qui faisait de ses images des outils au service d’une idée, d’une abstraction. En ce sens, il ne fait aucun doute que le film divisera. Difficile cependant de ne pas prendre un plaisir malsain à contempler cette violence subjuguée par une mise en scène stylisée à l’extrême.
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Pierre Vedral 25 mai 2013
Only God Forgives : critique du nouveau film choc de Nicolas Winding Refn
Only God Forgives dégage une force incroyable en terme d’image. Orchestré autour de personnages mutiques et énigmatiques, l’expérience s’avère être un pur moment de cinéma, radical et hypnotique dont le scénario aussi mince que la lame d’un sabre n’est au final qu’accessoire.
roger w 28 mai 2013
Only God Forgives : critique du nouveau film choc de Nicolas Winding Refn
Aucun scénario, aucune psychologie et des personnages de truands tous plus détestables les uns que les autres. Vous voilà prévenus : Only God Forgives est uniquement un exercice de style visuel qui réserve bien entendu son lot de scènes superbes sur le plan esthétique, mais dans un but qui nous reste obscur. Exaltant une violence graphique parfois insoutenable, on cherche encore la dimension mystique vantée par le cinéaste. Heureusement, Kristin Scott Thomas vient égayer la projection en mère incestueuse pouffiasse. Et puis quoi d’autre ? Bah, c’est tout. Je précise que j’avais adoré Drive qui est d’un tout autre calibre.