Le vestige des jours
Le 8 avril 2014
Une œuvre intime et exigeante où Duras place l’attente au cœur de son geste cinématographique. Nouvelle sortie à partir du 9 avril 2014.
- Réalisateur : Marguerite Duras
- Acteurs : Gérard Depardieu, Jeanne Moreau, Lucia Bosè
- Genre : Drame, Expérimental
- Nationalité : Français
- Editeur vidéo : Blaq Out
- Durée : 1h23mn
- Date de sortie : 27 septembre 1973
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Une œuvre intime et exigeante où Duras place l’attente au coeur de son geste cinématographique.
L’argument : Une jolie maison au fond d’un parc, dans les Yvelines. Une fois son mari et ses enfants partis, Isabelle y est seule avec son amie et les heures s’écoulent lentement. Elle s’inquiète de la violence que sa fille, Nathalie, manifeste à l’école, mais ne supporte pas l’idée de l’envoyer en pension.
Notre avis : La violence d’un gros plan. Rien de plus explicite, rien de plus évasif. Quelques minutes après le générique, Nathalie Granger démarre comme ça, sur une interrogation : un visage d’enfant impénétrable. Un sens du mystère qui flotte sur tous les plans, bien décidé à tuer la narration à coup de digressions et de lenteurs. Là ou India song répandait son lyrisme mortifère sur les ruines de la colonisation, Nathalie Granger privilégie le statisme, la torpeur d’un après-midi provincial. L’angoisse d’une grande maison vide, comme habitée par des ombres (Jeanne Moreau et Lucia Bosé, admirables d’épures).
© Baba Yaga Films
Pourtant Duras n’invente rien. Antonioni, depuis plus de dix ans, avait commencé à mettre en image la difficulté d’habiter un espace. Si ce Nathalie Granger est remarquable, c’est par sa volonté de s’affronter au quotidien. Dans un plan, les deux femmes débarrassent une table en temps réel. Rien de bien impressionnant, si ce n’est que très peu de films auront eu l’audace de retranscrire à l’écran la banalité des tâches domestiques. En cela, Nathalie Granger, annonce le Jeanne Dielman d’Akerman, autre film fondateur de la modernité cinématographique.
Cette austérité maniaque ne sera troublée qu’à un seul moment : Gérard Depardieu, alors inconnu, s’invite dans le salon de ces deux femmes dans l’espoir de leur vendre une machine à laver. Le discours est balbutiant, semé d’erreurs. A la quasi-absence de dialogues du film répond ce passage où le flot verbal se fait approximatif. Les mots ont définitivement perdu tout leur sens dans cet après-midi sans fin. Finalement, Duras aura tout fait sauf des films d’écrivains. Dans ses livres comme dans ses réalisations, une seule obsession, toujours, la recherche d’un nouveau langage.
Le DVD
Les suppléments : En guise de bonus, deux documentaires. Le premier, à travers le témoignage de trois participants au film (Benoît Jacquot, Luc Moullet et Geneviève Dufour) retrace la préparation, le tournage, puis l’accueil de Nathalie Granger. Ce bonus (quoique relativement court) permet d’en savoir un peu plus sur la méthode Duras, sa manière de s’accommoder des restrictions budgétaires pour stimuler sa créativité et celle de son équipe. Il ne fait ainsi aucun doute que Benoît Jacquot, alors assistant réalisateur, s’est inspiré de cette méthode de travail pour ses propres films. Le deuxième documentaire donne la parole à Madeleine Borgomano, spécialiste de Duras. En un temps relativement court, elle donne quelques pistes quant à la manière de Duras d’envisager le cinéma et l’écriture filmique.
Image & son : La très belle photo en noir et blanc de Ghislain Cloquet ressort parfaitement sur cette édition DVD. Les contrastes sont bien gérés, et si la copie s’avère parfois assez granuleuse, cela ne saurait distraire le spectateur . Une seule piste sonore, un mono étonnamment propre, est offerte. On peut souligner l’effort de l’éditeur de proposer des sous-titres anglais, portugais et même français. Une édition DVD fonctionnelle s’accordant parfaitement avec l’austérité du film.
Galerie photos
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