S’en souviendrait ?
Le 22 novembre 2014
Le Centre Beaubourg nous invite à un voyage dans l’espace-temps singulier du cinéma de Marguerite Duras.
- Réalisateur : Marguerite Duras
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Rétrospective du 28 novembre au 20 décembre 2014
Le Centre Beaubourg nous invite à un voyage dans l’espace-temps singulier du cinéma de Marguerite Duras.
L’événement : Extrait de La marguerite de cinéma, texte de présentation de la rétrospective par Bertrand Bonello : marguerite duras s’approprie le cinéma, invente les règles plus qu’elle ne s’y plie. elle pense le rapport entre les images et les sons. elle pense le cœur du cinéma. des lieux vides que le texte vient habiter, des voix post-synchronisées, non comme si le corps était dissocié de l’âme – définition du diable – mais pour mieux les rassembler. son et image. non l’un contre l’autre, mais l’un avec l’autre, résonance, dissonance, décalage, comment ils avancent ensemble. main dans la main.
Notre avis : Duras cinéaste c’est, comme le dit très bien Bertrand Bonello dans son texte de présentation de la rétrospective, d’abord un traitement très particulier du rapport de l’image et du son.
C’est, surtout à partir de La femme du Gange et du dyptique India Song - Son nom de Venise dans Calcutta désert, une manière singulière de superposer deux espaces, de faire cohabiter un présent déserté, comme hors du temps (ou d’après le temps), et un passé, un ailleurs, que la parole incantatoire fait surgir avec une immédiaté rendue presque palpable par le pouvoir évocateur des mots, mais aussi par une photo atmosphérique (Bruno Nuyten ; Pierre L’Homme ; Nestor Almendros ; Dominique Le Rigoleur) , les accords entêtants de la musique de Carlo d’Alessio, et, dans les deux premiers (La femme du Gange et India Song), un similacre de reconstitution aux allures de répétition fantomatique, que la cinéaste abandonnera par la suite pour ne plus faire résonner l’écho de cet ailleurs immaginaire, tellement réél, que sur des visages de survivants qui s’en souviennent (s’en souviendraient ?) peut-être, sans bien savoir si ces souvenirs sont bien les leurs, ou sur des lieux vides de présence humaine, voire sur l’écran noir de L’homme Atlantique.
En son temps la désarmante simplicité de ce geste cinématographique a suscité l’engouement mais aussi le rejet violent s’armant de sarcasme (au moment de la sortie du camion surtout) , une partie de la profession se sentant mise en danger par le mépris souverain qu’affichait Duras face à toutes les règles du cinéma courant et à la notion même de métier.
On sent pourtant aussi dans ces films un véritable bonheur de la pratique d’une forme d’artisanat humble et superbe à la fois, de la mise en oeuvre concrète d’une poétique qui fait rimer dénuement avec profusion des perceptions sensitives.
On sera sensible enfin à un humour déconcertant, partout présent mais particulièrement à l’oeuvre dans Des journées entières dans les arbres ou Les enfants.
Les dix-neufs films de Marguerite Duras seront projetés à Beaubourg entre le 28 novembre et le 20 décembre 2014 (deux séances par film, sauf pour La musica, le 28 uniquement, en ouverture). Une discussion avec Bulle Ogier est prévue après la projection de Le Navire Night, le 6 décembre à 15h, et l’actrice présentera Agatha le même soir à 20h. D’autres séances seront introduites par Pierre Léon, Luc Moullet, Philippe Azoury, Luc Chessel, Dominique Gonzalez-Foerster, Pierre Eugène, Benoît Jacquot, Stéphane Bouquet, Dominique Auvray, Jean Cléder, Florence de Chalonge, Pierre Lhomme ou Fernando Ganzo.
Cette rétrospective intégrale s’inscrit bien sur dans le cadre des nombreuses manifestations organisées à l’occasion du centenaire de la naissance de Marguerite Duras. Elle est accompagnée d’une exposition (Duras song ; portrait d’une écriture) et de la parution de plusieurs ouvrages : Filmer dit-elle, aux éditions capricci (textes de Philippe Azoury, stéphane Bouquet, Luc Chessel, Pierre Eugène, Fernando Ganzo, Luc Moullet ; entretiens avec Marguerite Duras) ; Duras – Godard ; Dialogues (trois dialogues inédits, introduction, notes et postface de Cyril Béghin ; éd. post-éditions, en co-édition avec le Centre Pompidou) .
Par ailleurs l’INA édite en DVD trois films jusque là inédits sur ce support : La femme du Gange ; Des journées entières dans les arbres et Baxter, Vera Baxter.
- Duras cinéaste à Beaubourg / programme
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