Le 20 juillet 2019
- Date de sortie : 5 juillet 2019
- Durée : 19mn
Avec Mercutio, Sean donne raison à toutes les attentes que l’on pouvait avoir sur lui. Ce premier projet est un concentré de mélancolie, à la fois aérien et dur.
- Copyright : Sean
Notre avis : Jusque-là on pensait Sean très à l’aise avec l’art de la communication ; on s’était peut-être trompé. Pourtant, en seulement deux clips, le discret rappeur parisien avait provoqué la surprise, pour la qualité des sons bien évidemment, mais également pour l’imagerie déployée via les deux vidéos et la manière dont se mettait en scène le rookie. De la discrétion sur les réseaux engendrait la curiosité, ainsi qu’une attente pour chaque nouveau son et surtout pour un premier projet. Un premier EP était annoncé, sans date pendant un temps. Alors on attendait, on attendait, on attendait, sans nouvelles depuis Mauvaise Nouvelle. Et qu’est-ce que l’on voit sur l’agenda Genius le 4 juillet ? Entre Mister You et Shotas, se trouve Sean avec son projet Mercutio. La date ? LE 5 JUILLET ! La discrétion comme pilier de la communication est un choix que l’on respecte et que l’on apprécie beaucoup, mais en début de carrière, faut pas non plus faire son Nekfeu post-Cyborg, s’il y a une volonté de se faire une petite place dans le rap français. Pour l’instant, le projet ne semble profiter d’aucune réelle visibilité, alors qu’avec ce Mercutio, Sean écrit avec une grande assurance son identité atypique et déjà incomparable (à notre connaissance) avec une autre personnalité du rap français (j’ai lu un gars le comparer à Roms, c’est non).
- Copyright : Sean
Fidèle à ce qu’il avait déjà fait avec Mercutio (le morceau) et Mauvaise Nouvelle, Sean déploie sa mélancolie maladive sur un court format, moins de vingt minutes, Six morceaux, suffisants pour servir de carte de visite et immerger l’auditeur dans un univers d’une maîtrise déjà folle. Travaillant la question de l’affect sous le prisme de l’abstraction, le rappeur parisien étonne dans son jeu d’équilibriste constant, scrutant de loin la surenchère bouffonne dans laquelle il aurait pu facilement tomber. Musicalement, ce Mercutio impressionne par sa maturité et sa puissance, véhicule des émotions, si évocatrices que Sean peut se permettre d’altérer sa voix, de mâcher ses mots, de bouffer de la purée brûlante devant le micro ; autant dire qu’il ne faut pas s’attendre à tout comprendre. L’artiste joue souvent avec le feu sans jamais se cramer, comme s’il avait perfectionné son style en secret, avant de dévoiler quoi que ce soit publiquement (ce qui est sûrement le cas). Avec cet EP, on ressent plus qu’on ne comprend, même si tout n’est pas obscur dans les paroles du rappeur. Certaines rimes peuvent nous parler, nous toucher et même si le rap de Sean n’est pas orienté vers la punchline, on peut y reconnaître un sens de la concision parfois percutant.
- Copyright : Sean
Avec ce premier projet, le jeune rappeur parisien fait regretter à l’auditeur qu’il n’y ait que six morceaux à se mettre sous la dent, autant qu’il le satisfait d’avoir écouté un condensé aussi nourri musicalement et qu’un morceau de plus aurait pu gâcher. C’est la contradiction de ce Mercutio ; avec vingt minutes Sean introduit son univers sans prendre le risque de se montrer balourd, probablement le danger majeur lorsque l’on propose une forme musicale aussi ésotérique, profondément dépressive et nihiliste. Si les sonorités varient, avec une voix rendue totalement protéiforme par un mixage exemplaire (ainsi que par le travail de l’artiste, bien évidemment), le ton reste solidement identique tout au long de l’EP. Sean y parle surtout d’amour et de la merditude des choses, avec une écriture poétique aussi crue qu’elle peut sonner vraie, sans vraiment laisser une lueur d’espoir quelconque ou modérer son propos. Le concentré nervous breakdown marque l’esprit et l’EP se conclut au moment opportun, même si Pourquoi n’est pas le meilleur morceau de Mercutio et qu’il tease trop soudainement la suite (c’est pas le MCU là, fais pas de morceau post-générique). La pilule agit, elle qui fait léviter l’auditeur dans un environnement baignée par une noirceur, dont on ne sort qu’une fois l’album terminé. Avant de le relancer.
- Copyright : Nice Prod / Bendo Music
Galerie Photos
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