Le 9 décembre 2015
Nous avons vu le Rebel Heart Tour à Prague et le spectacle s’est avéré l’un des plus explosifs et des plus chaleureux de l’illustre carrière de Madonna.
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Nous avons vu le Rebel Heart Tour à Prague et le spectacle s’est avéré l’un des plus explosifs et des plus chaleureux de l’illustre carrière de Madonna.
Oubliez les concerts réfrigérants du Drowned World ou du Reinvention Tour. Exit la morbidité spectaculaire du MDNA Tour. Si Madonna n’arrive pas à la toute-puissance de son Confessions Tour, à jamais l’une des meilleurs tournées pop dance jamais orchestrées, avec le Rebel Heart Tour, la star impose sa majesté avec l’aisance d’une diva, sans les caprices, car chaleureuse, accessible, proche de son public, que ce soit dans la communication et les thèmes abordées, elle s’est offerte littéralement à une salle comble en extase.
Pour son premier show à l’02, la première partie urbaine inopportune s’était mal passée, introduisant un froid déconcertant parmi les fans de tous âge, entre jeunes curieux, familles avec mômes et quadra grisonnants. Le rappeur Rejjie Snow, d’origine irlandaise mais à la verve américaine, a eu le malheur de vouloir chauffer la salle auprès d’une audience plus habituée à la fantaisie du dance-floor qu’au dytique Pussy, money ; il s’est attiré les ires d’une salle de spectacle unanime. C’est penaud qu’il dût quitter la scène.
(C) Madonna / Instagram
50mn plus, tard, la fosse s’impatiente, l’interprète de Like a Virgin habituée aux retards monumentaux (elle avait commencé à 22h20 à Cologne lors de son précédent show) fait à peine son apparition. Les écrans apparaissent, moins gigantesques que prévus, mais animés d’un vidéo-clip tourné pour le concept de la tournée, largement supérieur aux trois vidéos proposées pour illustrer les singles de son dernière album, vendu à 820.000 exemplaires dans le monde. Sera-t-il possible de renverser la tendance générale dans la salle qui tourne à l’épuisement et à la lassitude ?
Comptez sur l’énergie d’une artiste qui, déchaînée, le sourire absent le temps d’un titre, brise la cage pour combattre des samouraïs dans une ambiance qui aime emprunter à un classique télévisuel que la madone adore, Game of thrones. Sur Iconic, chanson épique qui impose ses lourdeurs urbaines comme ouverture incontestable, elle ravive le souvenir du Drowned World et de ses péripéties belliqueuses, reprises également dans le MDNA. Moins violent, mais tout aussi percutant. La suite est curieuse, Bitch I’m Madonna, titre étendard de son dernier opus, est joué sans trop de conviction, de façon mécanique, alors que, remixé, il aurait pu conclure la tournée sur un doigt d’honneur. Mais c’était sans compter la volonté de l’artiste d’apaiser les tensions, de détourner les provoc’ égocentriques pour offrir à son audience un spectacle chaud, sensuel et convivial, où le sexe feint n’est pas là pour susciter la controverse, à l’instar du Blond Ambition, ni même d’émoustiller, mais plutôt de célébrer les sens d’une audience débordant de testostérone qui ne va pas s’offusquer des « nonneries », des orgies chorégraphiées dans l’harmonie de toiles de maître (les fonds d’écrans impressionnent), avec toujours cet arrière-fond catholique, totalement inoffensif, mais qui a valu à la foule, dans l’attente, avant même l’entrée dans le dôme, de subir les prêchi-prêcha de quelques extrémistes agités qui manifestaient au nom de Jésus.
Les tableaux se succèdent avec une cohérence qui fascine. Des provocations rock (Burning Up, où plus personne ne se demande ce que fait Madonna avec une guitare tant elle paraît à sa place dans ses mains), un mash-up capiteux entre Holy Water et Vogue… la tournée se permet de légitimer les titres les plus faibles de son dernier album : Body Shop, ou S.E.X. figurent au listing quand on regrette l’absence d’un Wash all over me qui ne cesse d’amplifier le sentiment d’un différend entre Madonna et Avicii, dont elle efface le plus possible les traces, pour ne garder surtout que le titre éponyme de son album, Rebel Heart qui conclut le tableau consacré à la musique latine et gitane. Cette séquence, la troisième du show, peut-être la plus redoutée tant elle paraissait banale sur le papier, s’avère celle de la communion avec les fans, d’une euphorie totale, où la star s’amuse à plaisanter avec le public, entre des versions remixées de ces classiques (Dress You Up) ou accompagnées d’arrangement à la guitare, en solo, comme sur Secret, qui, pour célébrer le mysticisme de la capitale de République tchèque et ses mystères, a remplacé Who’s that girl, normalement prévu au programme. Le titre a été suivi de Ghosttown, un extra sur la liste, offrande proposée gracieusement pour compenser l’attente qu’elle justifie auprès d’un public conquis, et honteux d’avoir douteux, comme nécessaire pour lui offrir la perfection qu’il mérite. Le titre lui demande plus d’efforts vocaux, on reconnaît sur le refrain l’aide des choristes. On comprend donc que la chanson ne soit pas systématiquement interprétée lors d’un show qui a la bougeotte, et forcément éreintant. Allez, l’attente est oubliée. Que le show continue.
La dernière partie introduite par Illuminati, un interlude spectaculaire, vertigineux, chorégraphié à 6 mètres de haut par des danseurs aériens qui s’éprennent des choristes demeurées au sol, est sûrement le plus élégant, le plus grisant. Le remix de Music, couplé avec Get Stupid, est un hommage aux années folles, à Gabsy le Magnifique et au Montparnasse des années 20. Plus que jamais la star conjure le mauvais sort, efface les injures subies sur les réseaux sociaux et les critiques vives sur le jeunisme qu’elle nourrit : il n’en sera jamais question dans le show. Intemporelle, revisitant les époques et les cultures, et trente-trois années de répertoire passé au patrimoine de la pop américaine, la star impose un rythme et des attitudes qu’aucunes de ses jeunes concurrentes n’est capable de s’accaparer, malgré leur déférence mesquine à vouloir reprendre le flambeau qu’elle ne lâchera pas ce soir-là, sans même chercher à le conserver. La relève est déjà là dans les ventes de disques et le nombres de vues sur YouTube, mais aucune n’arrive au tempérament et à la transcendance d’une artiste au sommet de son art, qui malgré ses 57 ans, s’assume, impériale avec son public, sans le mépriser, lui proposant essentiellement de pur moments de live, comme sur sa reprise acoustique de La Vie en Rose ou l’association brillante de Love don’t live anymore et Heartbreak city.
Petit cadeau, à l’instar de certains shows de ses précédentes tournées, Madonna s’amuse à inviter des vedettes à la rejoindre. Ce soir-là à Prague, elle déchaîne Jessica Chastain lors de l’interprétation reggae du très convivial Unapologetic Bitch ; elle fait monter sur scène la rouquine irrésistible de Zero Dark City et Crimson Peak qui s’amuse à lui donner la fessée. Très Hanky Panky dans l’âme.
Si l’on regrette un final court et peu mémorable, sur la chanson Holiday, que l’on a que trop entendue, et qui n’arrive pas à la cheville des conclusions de ces 3 précédentes tournées, on retiendra l’excellence de Deeper and Deeper, Love don’t live here anymore, Living For love et Music. Des moments forts qui nous ont rapprochés, plus que jamais, d’une star interstellaire, devenue humaine, radieuse de ses sourires partagés.
Madonna sera à Paris Bercy (désolé, on ne connaît pas d’autre nom pour cette salle mythique parisienne !) les 9 et 10 décembre prochains. C’est complet.
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