Coup de poing
Le 23 avril 2003
Le troisième film du jeune acteur-réalisateur. Sombre et dérangeant.

- Réalisateur : Gaël Morel
- Acteurs : Amira Casar, Nicolas Cazalé
- Genre : Drame, LGBTQIA+
- Nationalité : Français, Algérien

L'a vu
Veut le voir
– Durée : 1h18mn
Révélé comme acteur dans Loin et Les roseaux sauvages d’André Techiné, le jeune Gaël Morel passe une troisième fois derrière la caméra pour réaliser Les chemins de l’oued, un film sombre et dérangeant.
Pour échapper à la justice française, Samy, jeune franco-algérien est contraint de fuir chez son grand père dans les montagnes de Kabylie. Il découvre un pays dont il ne connaît ni la culture ni la langue. Tous les membres de sa famille lui sont étrangers. Il y a Nadine, sa cousine, veuve et enceinte, détestée par son autre cousin, Issam, revenu en Algérie après s’être fait expulser de France. Entre eux, le grand père, rescapé de la guerre qui vit dans le souvenir d’une terre fertile qui ne produit aujourd’hui plus rien. Muet jusqu’au bout sur le motif de son séjour, Samy est rapidement rongé par le climat oppressant d’un pays qui ne fait que raviver le chaos qui est en lui.
Voilà un film coup de poing parfois difficile à décrypter. Ça commence à toute vitesse par un crime que le spectateur devine. Un "non-vu" qui illustre bien le sujet du film : le "non-dit". Car tout le long de son chemin, Gaël Morel ne veut pas trop en dire. Il préfère laisser au spectateur le soin d’interpréter ses images lourdes de symboles en suivant la fuite en avant du personnage principal incarné avec conviction par Nicolas Cazalé. Toute la beauté du film réside dans l’expression de la culpabilité de Samy à travers des scènes muettes et très sensuelles où, en gros plan, l’acteur frappe sa tête contre un mur, donne des coups de pioches jusqu’à se cloquer les mains, peine à se masturber... Le montage, la musique et les sons suffisent à rendre toute la dimension de cette tourmente.
Puis se greffent les images de l’Algérie. Le réalisateur montre un pays meurtri et traumatisé par une décennie de massacres. Le parallèle entre le sombre destin de Samy et celui de cette région est certes éloquent, mais plonge le spectateur dans une sorte de confusion. C’est d’ailleurs la principale faiblesse du film, une superposition maladroite de deux thèmes : le voyage initiatique (le retour aux sources de Samy) et le portrait sociopolitique de l’Algérie. L’auteur nous égare sans jamais apporter de réponse claire. C’est sans doute la raison pour laquelle le film s’achève brutalement dans un cul-de-sac.