Du drame de posséder deux moitiés de corps
Le 25 juin 2002
Humour et férocité galopent à un train d’enfer pour narrer l’atroce et désopilante histoire de Médard de Terralba
- Auteur : Italo Calvino
- Editeur : Le livre de poche
- Genre : Roman & fiction
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Peste et disette ! Avec Calvino humour et férocité galopent à un train d’enfer pour narrer l’atroce et désopilante histoire de Médard de Terralba, revenu de guerre littéralement dimezzato. Coupé en deux par le milieu. De haut en bas.
"C’est la mauvaise moitié de Médard qui est revenue", constate laconiquement la nourrice Sébastienne. Le vicomte, ou plus exactement la moitié droite de son corps mutilé, fulmine, terrorise, incendie, pendigouille et marque son passage en sectionnant à grands coups de sabre escargots, papillons, hirondelles, poulpes et fleurs des champs dans un enchaînement de monstrueuses atrocités. Mais voilà qu’entre en scène sa moitié gauche qui tente de recoller et de rafistoler tout ce que la droite a brisé et anéanti. D’un côté, les idées perverses s’enchevêtrent "comme une nichée de serpents", de l’autre éclosent "tous les lis de la renonciation et de l’abnégation". Est-ce la noirceur la plus abominable ou la bonté frisant la niaiserie qui aura le dessus, étant donné que chaque moitié du vicomte a jeté son dévolu sur la grassouillette Paméla ?
Ainsi va la fable du Vicomte pourfendu [1] que Calvino égrène d’une plume trempée dans un jus de champignons vénéneux, semant un chapelet de perles acides et hilarantes, entraînant le lecteur dans une chevauchée de "tragiques conjonctures" à travers la campagne ligure.
Médard de Terralba, double nature, atteint à la quintessence de la schizophrénie. Sous la farce germe une réflexion sur le yin et le yang qui somnole en chaque être humain. Une fois ses deux parties réconciliées, le vicomte redeviendra "un homme entier, ni méchant ni bon, mélangé de bonté et de méchanceté". C’est-à-dire ni plus ni moins bon que vous et moi...
Morale de cette histoire à hurler de rire debout : "Il ne suffit pas qu’un vicomte soit complet pour que le monde entier soit complet." Une morale à la Queneau qui était l’ami d’Italo Calvino. Comme le monde est petit, peste et disette !
Italo Calvino, Le vicomte pourfendu (Il visconte dimezzato), traduit de l’italien par Juliette Bertrand, Le livre de poche, coll. "Biblio", 123 pages, 3,50 €
Italo Calvino, le site très complet de Frank Pajares (en anglais)
[1] Second opus de la trilogie Nos ancêtres, comprenant également Le baron perché et Le chevalier invisible, rééditée en un seul volume aux éditions du Seuil en 2001
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