Irréversibilité
Le 20 décembre 2006
Ozon à son meilleur décortique ses obsessions avec une générosité souveraine.
- Réalisateur : François Ozon
- Acteurs : Jeanne Moreau, Daniel Duval, Valeria Bruni Tedeschi, Melvil Poupaud, Marie Rivière
- Genre : Drame, LGBTQIA+
- Nationalité : Français
- Distributeur : Mars Distribution
- Editeur vidéo : Fox Pathé Europa
- Durée : 1h25mn
- Festival : Festival de Cannes 2005
Résumé : Romain, un jeune photographe de trente ans, apprend brutalement qu’il n’a plus que quelques mois à vivre.
Critique : Dans son court métrage La petite mort, François Ozon plongeait dans les arcanes psychologiques d’un jeune homo qui passait son temps à prendre en photo des hommes en train de se masturber. Sous le vernis provocateur, un drame bouleversant sur la relation père-fils, sur la mélancolie qui presse l’âme, sur l’homosexualité et sur la difficulté d’aimer et d’être aimé en retour. Étonnants parallélismes avec son nouveau film Le temps qui reste, dans lequel Romain (Melvil Poupaud, superbe) est photographe, gay, arrogant, cynique avec son entourage parce qu’il cache un mal-être qui le ronge. Le jeune trentenaire est atteint d’une tumeur incurable et prépare silencieusement son testament en apprenant à profiter des derniers moments de sa vie. Cheminement cliché qui ressemble à une succession de jérémiades complaisantes ? Tout faux. Ozon filme ce long trajet mortifère sans céder à la putasserie, en le jalonnant d’instants de grâce qui sonnent juste et profond (la scène de triolisme, le pardon au téléphone, l’assaut des réminiscences...).
Le temps qui reste épouse un retour aux sources inattendu et s’impose comme la symbiose adéquate entre sa première période "trash" et sa seconde, plus sage. Comme souvent chez Ozon, le film doit beaucoup à ses interprètes, tous impeccables, qui se distinguent dans des situations très sensibles. Mélange de candeur et de provocation, de rudesse et de sensibilité, cet édifice très personnel permet au cinéaste de signer son meilleur opus. Sa réussite vient certainement du fait qu’Ozon joue sur l’identification et plaque ses expériences sur celles du spectateur. Le réalisateur en profite pour décortiquer en creux ses obsessions de toujours avec une générosité souveraine, avec des références explicites aux cinémas de Rohmer (Melvil Poupaud, Marie Rivière...) et de Noé (si 5x2 possédait l’irréversibilité d’Irréversible, Le temps qui reste démontre lui aussi que le temps détruit tout). La façon dont il laisse parler ses angoisses face à la mort, face au sexe, est prodigieuse. Grand tohu-bohu.
Le DVD
Le(s) supplément(s) à ne pas rater : À la lecture des bonus, on se dit que le cahier des charges va, encore une fois, être timidement rempli, que l’aspect promotionnel va prendre le dessus. Le doigt dans l’œil ! Le making of, les scènes coupées, ainsi que les commentaires audio de François Ozon et Melvil Poupaud sont tout simplement superbes. Grâce à leur intérêt et leur sincérité, on se glisse avec plaisir dans les coulisses de ce petit bijou d’émotions. Durant plus d’une heure en effet, on suit le tournage chronologique de cette histoire de renoncement et l’on découvre qu’il faut de la patience avec un bébé et avec la météo, qu’Ozon aime bien chercher avec ses comédiens le jour de la prise, que tourner un fist fucking ne s’improvise pas (description clinique des étapes - hilarant !), qu’un comédien ne doit pas s’arracher les croûtes du nez sous peine de faire flipper la maquilleuse, et qu’un trou dans une porte peut mettre à mal le calme d’un réalisateur. Bref, ce document se regarde avec une évidente jubilation et démontre que le cinéma est un gigantesque bordel confinant parfois à la magie pure. Les scènes coupées, très belles, très douces, complètent le portrait de ce jeune homme en perdition. Enfin, François Ozon et son comédien principal s’en donnent à cœur joie, dans une bonne humeur communicative, pour expliquer les choix artistiques retenus ; on comprend que le montage tient une place importante dans sa conception structurelle du film.
Image & son : Édition parfaite en tous points avec une excellente définition. Même si ce film ne requiert pas des prouesses techniques, il remplit toutes les conditions pour un bon visionnage : couleurs naturelles et chaudes (surtout sur la fin), Dolby Digital 5.1 impeccable qui met en avant les dialogues.
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vilar 1er décembre 2005
Le temps qui reste - François Ozon - critique
Ne manquez pas d’aller voir cet excellent film : les images, les comédiens, le réalisateur vont vous mettre le coeur en charpie et vous offrir une oeuvre dense, dont chaque détail est essentiel et s’incruste en chacun, tel un moment de vie et de mort bouleversant de vérité.
Ce cancer disséminé tragiquement dans le corps d’un homme jeune, François Ozon l’a scénarisé et réalisé avec toute la sensibilité et l’énergie désirées, et son choix des comédiens est absolument exemplaire. On est en droit de ne pas adhérer aux décisions du garçon stigmatisé par la maladie, mais quelle émotion dans ce bouleversant raccourci de vie peuplé de regards désespérés et lucides pourtant, et de cette quête aux souvenirs ressurgis de façon poignante.
"J’ai tous les droits !" annonce ce pauvre héros dans sa recherche ardente de sérénité et d’amours au gré de sa lente destruction, jusqu’à son ultime apaisement que restitue magistralement Melvil Poupaud aux stupéfiants changements physiques.
On le voit totalement investi dans ce rôle implacablement désespéré et douloureux, entouré d’acteurs sérieux, aux filmographies mémorables, tels Jeanne Moreau aux gros plans tragiques et tendres et Valeria Bruni-Tedeschi, grave et belle, aux yeux admirables
esdez 5 décembre 2005
Le temps qui reste - François Ozon - critique
Longue errance de tous les acteurs de ce projet , de François OZON qui n’est pas tombé dans le larmoyant mais est resté aux taquets en ne sachant pas très bien exprimer ce qu’il pouvait faire de cette problématique à Melville POUPEAU qui l’a , lui,très bien restituée en nous faisant partager sa totale incapacité à déterminer quoi que ce soit et en suivant le cours des évènements tracés pour lui.En fait ce film est un non film pour un non évènement l’ensemble étant relaté laconiquement sans dimension humaine.A voir pour les habitués des journaux télévisés qui se sentiront à l’aise avec ce film.
Jeds 21 décembre 2005
Le temps qui reste - François Ozon - critique
Film de Froinçaois Ozon qui est (selon le réalisateur) le second volet d’une trilogie sur le deuil. On y suit le parcours d’un photographe de 30 ans qui vient d’apprendre qu’il n’avait plus que 3 mois à vivre.
Côté réalisation :
François Ozon réalise ici un film très sobre tourné en cinémascope, ce qui permet de découvrir des images différentes, à un certain point de vue, de ses précédents films (car il me semble qu’il n’avait jamais utilisé ce format). La photographie est assez banale, mise à part la scène finale du film (les 5 ou 6 derniers plans) qui sont vraiment splendides. S’il n’y avait qu’une chose à retenir, ça serait ce passage superbe.
Côté scénario :
Le scénario fait avancer le film lentement mais sûrement. On ne tombe jamais dans une impasse et tout, bien qu’étant ultra simple, est intéressant. Ce qui est plaisant, c’est qu’à aucun moment, on entre dans ces catégories de film qui sortent les violons et ne sont fait que pour faire pleurer. Ici, on peut pleurer certes, mais on peut également réfléchir. Comme quoi, les mélodrames avec un mec pour personnage principal, ça existe, et c’est bien.
Côté acteurs/personnages :
Les personnages sont tous vraiment attachants. Ils ne le sont pas tous au même moment, mais ils le sont quand même. Les acteurs quant à eux sont vraiment bien représentatifs des personnages et il n’y a aucune fausse note à déclarer. Melvil Poupaud est très convainquant dans son rôle et le savoir faire de Ozon (que pourtant je n’aime pas) arrive à le rendre vraiment beau et sensuel à l’image.
Mon sentiment en sortant du cinéma :
Je suis allé voir ce film par le plus grand des hasards. C’est limite si je n’ai inscrit le titre sur un bout de papier puis que j’aurai tiré dans un chapeau. Si j’avais su que c’était un film de François Ozon, je n’y serais pas allé car je n’aime pas ce réalisateur. Je trouve ses films ennuyeux au possible. Mais j’y suis allé et honnêtement, même si ça n’est pas un film que je regarderai une prochaine fois, je ne regrette pas du tout de l’avoir vu. C’est un film attachant et finalement, les tous derniers plans du film sont tellement beau que ça me donne une impression générale assez positive.
Voir en ligne : http://swww.dynu.net/shield/index.html