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Le 16 mai 2006


Au Nord, au Sud et au bout du monde pour trouver un sens à celui-ci.
Au Nord, au Sud et au bout du monde pour trouver un sens à celui-ci.
Dans une lettre à son confrère écrivain-pérégrin, Nicolas Bouvier disait se réjouir de retrouver dans chaque texte de Kenneth White ce qu’il souhaitait : "Ni gloses ni commentaires, une écriture de primesaut, précise et turbulente, un DA SEIN , une saisie de l’instant, si piteux soit-il, quasi inconditionnelle, et du sel sur la langue" [1]. On ne saurait mieux résumer l’esprit du Rôdeur des confins, nouveau récit de pérégrinations, nouvelle dérive à la recherche d’une présence au monde, attitude salutaire en un temps qui semble à l’auteur avoir atteint son terme ("D’où le désarroi de nos sociétés et une série d’attitudes allant du cynisme le plus vulgaire au spiritualisme le plus vaporeux").
Parti pour le Nord (les Orcades, la Scandinavie, le Maine), le rôdeur poursuit sa route au Sud (Corse, Portugal, Andalousie, Maroc) avant de s’en aller en Polynésie, "dans le Grand Océan, aux confins du monde et de l’être". Pourquoi cet itinéraire ? "Il n’y a pas de programme prévu à l’avance. Il y a un certain remuement dans les profondeurs de l’être, et puis ("Je ne peins pas l’être, je peins le passage", dit Montaigne) le remuement se fait mouvement."
La géographie ne saurait toutefois suffire pour rendre compte du projet de l’Ecossais installé désormais en Bretagne. Aux lieux se superposent les livres, qui sont partout (Segalen, Melville, Shakespeare, Pessoa, Rousseau constitutionnaliste pour la Corse), et s’ajoutent les rencontres, réelles ou imaginaires, l’écrivain visitant le sud de l’Espagne avec Salomon Ibn Gabirol, philosophe du XIe siècle. Une époque où lorsqu’un corbeau croassait en Irak, on l’entendait jusqu’en Andalousie... Il faut aujourd’hui que des bombes y tombent pour que les bruits de ce pays nous parviennent, semble nous dire Kenneth White, à sa façon, entre les lignes. Sans s’appesantir et en donnant envie, toujours, d’aller voir plus loin.
Kenneth White, Le rôdeur des confins (traduit de l’anglais par Marie-Claude White), Albin Michel, 2006, 344 pages, 20 €
[1] Nicolas Bouvier, L’échappée belle, éloge de quelques pérégrins, éd. Metropolis