Le meilleur et le pire du cinéma en 2016

Sous bien des aspects, l’année 2016 laisse un goût amer. Se faisant l’écho des horreurs d’une autre année sombre - 2015 -, elle en restitue malgré elle les gimmicks tel un retour du refoulé. Parmi ses reliquats les plus affligeants : des réfugiés condamnés à l’errance, l’hécatombe du 14 juillet, la débâcle politique globale, le Brexit ou encore Donald Trump. Aux quatre coins de monde, une forme de déliquescence qui s’élève par-dessus les cendres de la raison. Une atmosphère sinistre avérée jusque dans les disparitions d’innombrables symboles d’insoumission : côté musique avec David Bowie, Prince, Leonard Cohen, Maurice White, Greg Lake... pour ne citer qu’eux. Côté cinéma avec d’éternels chantres de la dissidence : Ettore Scola, Jacques Rivette, Abbas Kiarostami, Michael Cimino, Pierre Etaix, Andrzej Wajda, Ronit Elkabetz ou encore Raoul Coutard.

David Bowie dans Twin Peaks : Fire Walk With Me - Copyright New Line Cinema

Copyright Paul Darling

Manière au fond de conjurer ce cataclysme, le cinéma en 2016 a su pourtant tenir bon. D’une richesse et d’une profondeur inouïes, les intrigues ont agi comme des révélateurs : Aquarius en réglant son compte aux crapules, Toni Erdmann en se moquant des entreprises et de leurs valeurs qui parasitent jusqu’à l’intime, Rester vertical en déjouant la tournure dangereuse prise par nos sociétés, Ma Loute en dévoilant la comédie larvée dans nos rituels tragiques. Mais c’est à ses héroïnes que le septième art en 2016 doit aussi ses fulgurances : outre Ines dans Toni Erdmann, les frondeuses se nommaient Michèle (Elle) ou encore Clara (Aquarius).

Copyright SBS Distribution

Aux déboires amoureux des amantes Carol Aird et Therese Belivet dans Carol, ou de Julieta dans Julieta, répond la voracité de Jesse dans The Neon Demon. Où chaque fois des femmes s’emparent des premiers rôles pour notre plus grand plaisir. Dommage qu’il n’en ait pas été davantage de même derrière la caméra, exception faite de l’Allemande Maren Ade (Toni Erdmann). Dans une moindre mesure, Moi, Daniel Blake et Merci Patron ! ont eux aussi joué leur rôle dans ce combat.

Copyright The jokers

Demeurent ainsi des cinéastes qui ne font que confirmer tout leur talent : Kleber Mendonça Filho, Nicholas Winding Refn (qui parachève sa mutation initiée avec Drive), Alain Guiraudie, Bruno Dumont, et d’autres vétérans qui reviennent au devant de la scène : Pedro Almodovar ou encore Paul Verhoeven, au firmament entre Elle et les réhabilitations Showgirls/Spetters.

Copyright SBS Distribution

Sur un plan plus latent, le cinéma en 2016 aura su aussi exorciser le présent en nous replongeant dans nos souvenirs. Bien que sorti fin 2015, Star Wars - Le Réveil de la Force incarne le signe le plus tonitruant de cette nécessité. Dans son sillage, très vite débarqua la série des frères Duffer, Stranger Things, compilation anthologique - entre autres - des films phares d’Amblin Entertainment. De quoi remettre en selle (de BMX) l’enfant spielbergien qui sommeille en nous.

© Netflix

Ce spleen incantatoire, il s’avère également de mise dans le carpenterien en diable Midnight Special de Jeff Nichols, mais aussi étrangement dans Paterson. Où Adam Driver convoque tout un pan du XXème siècle, d’Allen Ginsberg à William Carlos Williams en passant par Sam and Dave.

Copyright 2016 Window Frame Films Inc. Photo by Mary Cybulski

Même processus avec la mère Lucia dans Aquarius , qui ne vit le présent qu’au travers du passé : voir la séquence du repas en famille où, alors que ses proches la célèbrent, elle se remémore en flashback ses ébats sexuels d’antan. Sentiment de nostalgie le plus étrange enfin car assez contradictoire avec sa forme ultra-contemporaine : The Neon Demon , qui s’en remet à Mulholland Drive comme le film de Lynch s’en remettait hors-champ au cinéma classique hollywoodien (Gilda, Boulevard du crépuscule…). Amnésique et sans passé, Jesse laisse par sa mort tout un univers informe. Cette absence créée malgré elle nécessairement un vide mélancolique.

Mulholland Drive - Copyright Bac Films

The Neon Demon - Copyright Koch Media

Et enfin parce qu’il serait épineux de revenir sur les 600 films sortis en salles en 2016, ne conservons parmi les non-cités jusqu’ici qu’une poignée d’éblouissants :

Les Huit Salopards, de Quentin Tarantino
Manchester by the sea, de Kenneth Lonergan - plongée en immersion dans la vie d’êtres qui deviennent chers au spectateur.
Premier Contact, de Denis Villeneuve
Brooklyn Village, de Ira Sachs

Manchester by the Sea - Copyright Claire Folger / Amazon Studios

The Strangers, de Na Hong-jin
Juste la fin du monde, de Xavier Dolan
La Loi de la jungle, d’Antonin Peretjatko
The Assassin, de Hou Hsiao-hsien
Merci Patron !, de François Ruffin
Green Room, de Jeremy Saulnier

Merci Patron ! - Copyright Jour2fête

Un jour avec, un jour sans, de Hong Sang-soo
Moi, Daniel Blake, de Ken Loach
Ave, César, d’Ethan et Joel Cohen
Café Society, de Woody Allen
Rester Vertical, d’Alain Guiraudie
Homeland, Irak année zéro, de Abbas Fahdel

Un jour avec, un jour sans - Copyright Grandfilm

Ce sentiment de l’été, de Mikhaël Hers
No Home Movie, de Chantal Akerman
L’Ornithologue, de João Pedro Rodrigues
Kaili Blues, de Bi Gan
Everybody Wants Some !!, de Richard Linklater
Diamant noir, d’Arthur Harari
Ma vie de Courgette, de Claude Barras
Westworld, HBO
La Tortue rouge, de Michael Dudok de Wit

Copyright Studio Ghibli - Wild Bunch - Why Not Productions - Arte France Cinéma - CN4 Productions - Belvision - Nippon Television Network - Dentsu - Hakuhodo DYMP - Walt Disney Japan - Mitsubishi – Toho

Mimosas, d’Olivier Laxe
Victoria, de Justine Triet
Ta’ang, de Wang Bing
La Mort de Louis XIV, d’Albert Serra
Le Ruisseau, le Pré vert et le doux visage, de Yousry Nasrallah
Nocturama, de Bertrand Bonnello
Evolution, de Lucile Hadzihalilovic
Suburra, de Stefano Sollima
Visite ou Mémoires et confessions, de Manoel de Oliveira

Copyright Epicentre Films

Et parmi les plus navrants :

S.OS. Fantômes en 3D, de Paul Feig
Batman v Superman : L’Aube de la justice
Les Visiteurs : la révolution
Nos Souvenirs, de Gus Van Sant
High Rise, de Ben Wheatley

Copyright Sony Pictures Releasing GmbH

Personal Shopper, d’Olivier Assayas
Suicide Squad, de David Ayer
Independence Day Resurgence, de Roland Emmerich
Amis Publics, d’Édouard Pluvieux
Jem et les Hologrammes, le film, de Jon M. Chu
Ninja Turtles 2, de Dave Green
Ma vie de chat, de Barry Sonnenfeld
...

Copyright Les Films du Losange

Nos attentes pour 2017 :

Silence, de Martin Scorsese
Split, de M. Night Shyamalan
Okja, de Bong Joon-ho
Dovydo akmuo, de Sharunas Bartas
The Other side of Hope, d’Aki Kaurismäki
Dunkerque, de Christopher Nolan
Yourself and Yours, de Hong Sang-soo
Lost City of Z, de James Gray
Alien : Covenant, de Ridley Scott
Les Fantômes d’Ismaël, d’Arnaud Desplechin
L’Amant d’un jour, de Philippe Garrel
Un jour dans la vie de Billy Lynn, de Ang Lee
Orpheline, d’Arnaud des Pallières
La Femme qui est partie, de Lav Diaz
Logan Lucky, de Steven Soderbergh
Wonderstruck, de Todd Haynes
L’Amant d’un jour, de Philippe Garrel
Jeannette, de Bruno Dumont
Zama, de Lucrecia Martel
Happy End, de Michael Haneke
Ex libris, de Frederick Wiseman
La Planète des singes – Suprématie, de Matt Reeves
Blade Runner 2049, de Denis Villeneuve
120 Battements par minute, de Robin Campillo
Madame Hyde, de Serge Bozon
Good Time, de Josh et Bennie Safdie
Star Wars épisode 8, de Rian Johnson

...et on l’espère quelques surprises...

Blade Runner 2049 - Copyright 2016 Sony Pictures Releasing GmbH

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