Du 10 au 27 août 2023 au Palais-Royal à Paris
Le 24 août 2023
Quand un célèbre espace public parisien, en l’occurrence le Palais-Royal, se transforme en une scène de théâtre immersive, cela donne une œuvre enchanteresse et fascinante, au plus près de l’émotion du spectateur directement immergé au cœur de la pièce.
- Acteurs : David Legras, Roch-Antoine Albaladéjo, Thalie Amossé, Jean-Baptiste Barbier-Arribe, Dominique Bastien, Maxime Chartier, Zazie Delem, Camille Delpech, Marjorie Dubus, Thomas Gendronneau, Jean-Loup Horwitz, Laurent Labruyère, Justine Marçais, Drys Penthier, Jacques Poix-Terrier, Jérôme Ragon
- Metteur en scène : Léonard Matton
- Genre : Théâtre (spectacles), Performance théâtrale
- Plus d'informations : Le site de la compagnie
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Résumé : La compagnie Emersiøn crée, en 2023, une nouvelle pièce immersive : "Le Fléau, Mesure pour mesure". Après Helsingør, château d’Hamlet, Léonard Matton traduit et adapte une autre pièce de Shakespeare pour le théâtre immersif : "Mesure pour mesure". Le spectacle, créé "site specific" au Domaine national du Palais-Royal, au pied du ministère de la Culture, du Conseil d’État et du Conseil Constitutionnel, est présenté du 10 au 27 août 2023 pour 15 représentations exceptionnelles. Dans une atmosphère hors du temps, sensuelle et subversive, rythmée par une musique inspirée de la Renaissance mêlant acoustique et électronique, les 17 artistes mettent en corps, voix et musiques cette « pièce-ville » immersive, devant un public intime d’environ 175 personnes.
Critique : Rentrer dans l’adaptation de Shakespeare par Léonard Matton, c’est d’abord prendre place au milieu de la place du Palais Royal, percée de ses fameuses colonnes de Buren. Le spectateur est équipé d’un masque qui le plonge directement dans les tourments de la ville de Vienne qui subit le fléau de la peste. Les comédiens, vêtus de costumes d’une grande beauté, évoluent entre les badauds venus assister au spectacle. L’un tire les carte du tarot, un autre lit un traité public qui interdit la diffusion du théâtre. Il faut dire que l’occasion est trop bonne pour les pouvoirs publics de fermer les cabarets et de proscrire le plaisir, sous couvert de prévention face à l’épidémie de peste. La radicalité réactionnaire est le maître-mot de cette période troublée qui engage une véritable chasse aux sorcières contre la frivolité amoureuse et sexuelle.
- © Matthieu Camille Colin
Indéniablement, la mise en scène et l’adaptation de Léonard Matton est totalement ingénieuse. Les spectateurs sont d’abord partagés en plusieurs groupes à partir de la couleur du masque dont ils sont équipés. Ils sont invités à suivre des personnages de la pièce qui les entraînent dans un récit sombre où les couples illégitimes sont condamnés à mourir. Selon le groupe où malgré lui le spectateur est confiné, les points de vue du récit se multiplient, au risque dans un premier temps de perdre le fil de la narration, habillé de dialogues denses, baroques et follement modernes. Mais ce risque est vite écarté. Par la magie de la mise en scène, l’implication des comédiens, et la clarté du récit, la fragmentation des points de vue se centralise autour des tourments d’une jeune religieuse, Isabelle, qui doit tout faire pour sauver la vie de son frère, emprisonné pour avoir eu le malheur de tomber amoureux d’une femme hors mariage.
- © Matthieu Camille Colin
Le Fléau n’est pas une simple adaptation d’un texte de Shakespeare. C’est une œuvre profondément moderne où résonne le combat pour le droit des femmes à leur intégrité sociale, physique et morale. Le spectateur compose à sa façon ce récit en errant d’un espace à l’autre de la Place Royale où les comédiens donnent vie à l’effroi du totalitarisme religieux et politique. Le propos est évidemment politique, les femmes étant réduites à des objets sexuels au service de ces mêmes hommes qui écrivent l’ordre moral et font appliquer les lois. L’immersion est totale pour le spectateur qui doit rassembler les fils d’un récit composite, où le drame éternel de l’amour interdit et de la lutte pour une émancipation des femmes se joue devant ses yeux.
- © Matthieu Camille Colin
Le Fléau est sans doute le meilleur spectacle de cet été 2023 à Paris. Heureusement, d’autres dates sont annoncées au printemps 2024. Au-delà de l’intérêt en soi du spectacle, voilà une occasion formidable pour les spectateurs les plus éloignés de l’art théâtral de se laisser embarquer sans crainte dans un spectacle vivant, infiniment contemporain. La musique baroque est convoquée aux côtés de textes lumineux et passionnés dans un espace public, le Palais-Royal, que peuple magnifiquement la troupe de comédiens.
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