Lequel des trois ?
Le 3 janvier 2015
Cette admirable comédie aux multiples personnages est peu à peu envahie par la gravité. Du Gosho de la meilleure veine.
- Réalisateur : Heinosuke Gosho
- Acteurs : Tatsuo Saitō, Chishū Ryū, Kinuyo Tanaka, Hideko Takamine, Shuji Sano, Shin Tokudaiji, Reikô Tani, Fumiko Okamura, Reikichi Kawamura, Yaeko Izumo
- Genre : Comédie dramatique
- Nationalité : Japonais
- Durée : 1h10mn
- Titre original : 花籠の歌
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– Production : Shochiku
– scénario : Kougo Noda et Goshotei (Heinosuke Gosho) d’après un roman de Fumitaka Iwasaki
– photo : Masao Saito
– sortie au Japon : 14 janvier 1937
Cette admirable comédie aux multiples personnages est peu à peu envahie par la gravité. Du Gosho de la meilleure veine.
L’argument : Dans le quartier de Ginza à Tokyo le petit restaurant de Keizo et de sa fille Yoko est toujours bondé. Le jeune cuisinier chinois, monsieur Li, est secrètement amoureux de Yoko. Mais celle-ci est également courtisée par deux étudiants, Ono et son ami Hotta.
Notre avis : De ses débuts comme réalisateur, en 1925, jusqu’à ce Hana-kago no uta sorti en janvier 1937, Heinosuke Gosho n’a pas chômé : d’après la JMDB il s’agit déjà de son soixante-huitième film. Il ne pourra d’ailleurs pas soutenir plus longtemps ce rythme effrené et devra faire une pause de trois ans avant de reprendre sa carrière en 1940 pour ajouter encore trente deux titres à une vaste filmographie qui comporte quelques oeuvres célèbres comme La danseuse d’Izu (1933), Le fardeau de la vie (1935), La femme des brumes (1936) ou encore D’où l’on voit les quatre cheminées (1953) mais qui reste moins connue hors du japon que celles d’Ozu, Naruse ou, désormais, Shimizu.
Le film s’ouvre par un panoramique sur un quartier moderne de Tokyo tandis qu’on entend une chanson entraînante à l’orchestration jazz. La grande ville restera très présente par les enseignes au néon vues des fenêtres du premier étage et par quelques séquences en extérieur, en particulier celle, magnifique, où l’on verra le cuisinier en pleurs, parfaite image de la détresse, assis au bord d’une rivière à côté du chevalet d’un peintre et regardant tristement passer un train.
- HANAKAGO NO UTA (1937) Heinosuke Gosho - Shochiku
- HANAKAGO NO UTA (1937) Heinosuke Gosho - Shochiku
Mais l’essentiel du film se passe dans ce petit restaurant populaire où règne le plus souvent une joyeuse animation dont Gosho sait admirablement orchestrer le désordre fait de palabres, de beuveries, de tâches ménagères (ranger les chaises sur les tables ou les en redescendre) et adopte le ton léger, enjoué, qu’annonçait la chanson initiale.
Les épisodes comiques se succèdent donc, certains proches de la farce, comme celui où l’étudiant Hotta (Chishu Ryû), déguisé en faux moine, officie dans une parodie de cérémonie domestique avant de s’étirer dans le couloir, et permettent à une troupe d’acteurs en verve de dessiner une galerie de personnages que le film sait nous rendre proches et sympathiques sans jamais céder à la complaisance.
- HANAKAGO NO UTA (1937) Heinosuke Gosho - Shochiku
- Chishu Ryû dans HANAKAGO NO UTA (1937) Heinosuke Gosho - Shochiku
On remarquera quelques seconds rôles bien campés, tels que la tante Okiku (Fumiko Okamura) et son mari (Reikô Tani), la petite soeur jouée par une Hideko Takamine de douze ans mais moins gamine que la plupart des adultes qui l’entourent, ou encore Tatsuo Saito apparaissant brièvement en commissaire de police intraitable venu arrêter l’étudiant accusé de meurtre.
Les vedettes s’en donnent elles aussi à coeur joie, s’aventurant parfois au bord du cabotinage (mais juste au bord) comme Kinuyo Tanaka (Yoko) qui, boudant, exécute une véritable pantomime (s’asseyant sur la chaise, se laissant glisser par terre … avant de découvrir son jeu par une remarque malicieuse), Shuji Sano (Ono) exhibant généreusement son fameux sourire à pleines dents, Chishu Ryû déchaîné dans ses numéros d’ivresse ou Shin Tokudaiji (Li) qui donne progressivement une dimension pathétique à son personnage d’abord esquissé sous le masque d’un quasi demeuré au begaiement comique.
- Kinuyo Tanaka dans HANAKAGO NO UTA (1937) Heinosuke Gosho - Shochiku
- Shin Tokudaiji dans HANAKAGO NO UTA (1937) Heinosuke Gosho - Shochiku
Car des touches de gravité viennent plus d’une fois assombrir ce joyeux tableau, notamment lors de la séquence de l’arrestation (le client qui observe tout d’un air quelque peu goguenard ; le masque qu’on donne au prisonnier menotté, peut-être pour qu’il ne soit pas reconnu dans la rue) et ce sont elles qui dominent au final dans l’impresion que laisse ce film plus modeste en apparence que le sublime La femme des brumes mais non moins admirable et qui jusqu’au bout refuse de se laisser cataloguer dans un genre trop restrictif en s’achevant par une conversation autour d’un chou de dimensions respectables précédant une non-fin audacieuse et joliment déconcertante (le remue-ménage en contre-jour, à peine discernable, de la jeune femme dans la chambre seulement éclairée par les lumières de la ville venant de la baie vitrée occupant tout l’arrière du champ) .
- HANAKAGO NO UTA (1937) Heinosuke Gosho - Shochiku
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