Le 15 novembre 2016
- Scénariste : Takiji Kobayashi >
- Dessinateur : Go Fujio
- Genre : Chronique sociale
- Editeur : AKATA
- Famille : Manga
- Date de sortie : 8 septembre 2016
Une œuvre dénonciatrice débarque en manga avec grand fracas.
Dans les lignées des Démons de Dostoïevski et de Germinal de Zola, le Japon a également son ouvrage référence dans la lutte contre l’asservissement des classes ouvrières par le capitalisme sauvage. Dans l’île nippone, c’est forcément sur un bateau que la lutte des classes va s’engager : le roman de Takiji Kobayashi est un classique de la littérature, et son adaptation en manga devrait lui permettre de rayonner encore un bon siècle. Il est facile d’entrer dans l’histoire : embarquer aux cotés d’étudiants pauvres, de mineurs désabusés et de paysans ruinés pour un voyage de plusieurs mois dans les eaux russes du Kamtchatka. La vie à bord est difficile, pour ne pas dire exécrable et digne du Moyen-Âge, avec son quotidien de repas, de pêche et surtout de sanctions. Si les futurs leaders de la grève sont rapidement distingués, le vrai personnage central est l’intendant. Figure haïssable, il est davantage insulte et coup qu’humain, véritable point d’ancrage pour toute l’histoire. L’’auteur va en effet passer en revue les différentes méthodes de management, poussées évidemment à l’extrême, qui animent les journées de dur labeur : le bâton et la carotte, la concurrence, jusqu’aux menaces physiques... Zone de non-droit, les eaux disputées entre la Russie soviétique et le Japon impérialiste sont l’occasion pour les entreprises de tirer le maximum de leurs ouvriers, quitte à en perdre quelques-uns à cause des tempêtes et des maladies. La vie humaine ne vaut rien face au profit, une leçon qui vaut encore de nos jours.
© Akata
Au premier abord, le dessin paraît enfantin, avec des moues plutôt comiques dans un sujet tragique. Mais très vite, les formes prennent : le bateau devient familier, les mines se creusent mais les liens avec les personnages se tissent au fur et à mesure de l’avancée dans le temps. On apprend à connaître les risques de la météo et à suivre l’évolution des sautes d’humeur de l’intendant. Chaque détail compte pour comprendre que la tension augmente, que la pêche se fait plus mauvaise, que la grève se profile, avec forcément ses conséquences. Pour le coup, le noir et blanc est parfait : il colle à l’ambiance du début du XXème siècle, il fait ressentir cette misère à bord du bateau, et les figures adoptent finalement une certaine gravité, loin du ton satirique du début de l’album.
© Akata
Engagé, fort et poignant, Le Bateau usine est une œuvre que l’on souhaite lire en roman, et qui s’apprécie délicieusement à la sauce manga. Une réussite et une belle œuvre de combat, à recommander pour son témoignage humain et sa force idéologique.
© Akata
185 pages - 7,95€
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Galerie photos
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