Nous irons tous au paradis
Le 21 février 2006
Ganachaud met de nouveau une parabole au centre de son dernier roman. Il ne s’agit rien de moins que la Cène, avec pour témoins, les fidèles Ganache qui l’emporteront au paradis


- Auteur : Christian Ganachaud
- Editeur : Buchet-Chastel
- Genre : Roman & fiction
- Nationalité : Française

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Une table, un homme et ses douze compagnons... C’est le dîner le plus célèbre de l’histoire de l’humanité. Pour les chrétiens, la Cène est le point d’orgue de la vie du Christ. Un dernier repas avant le sacrifice en faveur des âmes en déshérence, un dernier soir qui illustre l’esprit de communion et de pardon. Pour les autres, la Cène est un sujet de prédilection de l’histoire de l’art, qui s’est prêté au génie de Vinci comme aux facéties de quelques artistes contemporains. Ainsi, récemment, l’artiste britannique Chris Ofili l’a reproduite sous la forme de portraits de singes perdus dans la jungle et accrochés dans une pièce aux allures de chapelle.
A l’heure où l’on s’émeut de toute mise en perspective des croyances, de telles œuvres sont vite perçues comme sacrilèges et certains rigoristes pourraient s’indigner de l’interprétation faite par Christian Ganachaud, un auteur qui ne se prend jamais au sérieux. Pourtant, il fait coup double, capable de réconcilier les amoureux de l’écrit et les croyants avec son Banquet des morts qui tient autant de la leçon de narration (pleine d’humour) que de la leçon de catéchisme (dont il pourrait être une illustration parfaite).
Vieux compagnons de route de Christian Ganachaud, les frères Ganache sont de retour, toujours aussi débiles, toujours aussi fainéants et toujours aussi drôles. On les avaient notamment rencontrés alors qu’ils étaient partis à la recherche de Dieu à la demande de leur vieux père mourant (dans Les aventures des frères Ganache à la recherche de Dieu). Les voici désormais en quête de convives pour un ultime banquet avant que leur pater ne rende l’âme. Le vieux a encore suffisamment de ressort pour exiger de ses fils débiles qu’ils réquisitionnent du monde à sa table. Mais personne ne veut venir, pas même les pauvres. Sans se démonter, les Ganache vont aller déterrer les macchabés dans le cimetière du village pour les mettre à table. Un incroyable banquet de morts-vivants va alors se tenir, étonnante reproduction de la Cène où le vieux va nourrir tout ce beau monde de son sang et de son corps. Mais "pourquoi rendre plus âpre la mort en la centrant comme thème principal de cette histoire, comme sujet obsessionnel de cette sous-vie ?" Ce n’est en effet plus la mort, en dépit de cette atmosphère macabre, qui tient le haut du pavé de cette incroyable histoire, mais l’espoir, le fol espoir d’un absolu et d’un sauvetage des âmes en apparence les plus perdues. Le tout raconté d’une traite, sans détail superflu, et avec pour meilleurs amis, le sourire ironique de Ganachaud et une écriture toujours aussi flamboyante.
Christian Ganachaud, Le banquet des morts, éd. Buchet-Chastel, 2006, 92 pages, 10 €