Le 6 juin 2023
Ce très beau film encore trop méconnu de Satyajit Ray frappe par sa fluidité narrative et visuelle, tout en brossant le portrait d’un pays qui se cherche, entre tradition et modernité.
- Réalisateur : Satyajit Ray
- Acteurs : Anil Chatterjee, Madhabi Mukherjee, Jaya Bhaduri, Haren Chatterjee, Sefalika Devi
- Genre : Drame, Noir et blanc
- Nationalité : Indien
- Distributeur : Les Acacias
- Durée : 2h15mn
- Reprise: 3 décembre 2014
- Titre original : Mahanagar
- Date de sortie : 14 septembre 1983
- Festival : Cinémathèque de Nice, Festival de Berlin 1964
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– Année de production : 1963
Résumé : Subrata Mazumdar, modeste employé de banque à Calcutta, a du mal à subvenir aux besoins de sa famille. Enfreignant les traditions, sa femme Arati se décide à chercher du travail et devient représentante en porte à porte. Son mari accepte mal cette situation.
Critique : La grande ville sortit en Inde le 27 septembre 1963, avant d’être présenté au Festival de Berlin en juin 1964. Le film y obtint l’Ours d’argent de la meilleure réalisation. Le ciné-club d’Antenne 2 de Claude-Jean Philippe le programma en France au début des années 80 et le métrage connut une sortie dans les salles parisiennes le 14 septembre 1983, avant d’être distribué par les Acacias dans une version restaurée le 3 décembre 2014. L’œuvre reste moins célèbre que Pather Panchali (1955) ou Le salon de musique (1958), grands classiques du septième art. Pourtant, il s’agit de l’un des plus beaux films de Satyajit Ray, grand maître du cinéma indien et du cinéma tout court. Celui qui fut l’assistant réalisateur et le disciple de Jean Renoir est ici imprégné de son humanisme et de sa fluidité narrative et visuelle, tout en signant un long métrage cohérent avec son propre univers. Adapté d’un récit de l’écrivain et poète Narendranath Mitra, La grande ville suit le quotidien d’un couple indien de la classe moyenne.
- © Les Acacias
Subrata est comptable dans une nouvelle banque d’affaires, quand son épouse, cultivée mais sans emploi, est occupée au domicile, où vivent les vieux parents de Subrata, la jeune belle-sœur et le petit garçon du couple. Mais les fins de mois sont difficiles. Aussi, Subrata accepte, non sans réticences, que son épouse Arati se mette en quête d’une activité professionnelle, le temps qu’il parvienne à trouver un second emploi. Mais Arati s’épanouit dans le poste de commerciale qu’elle obtient, quand Subrata voit le sien menacé par la spéculation… Satyajit Ray excelle à peindre le dilemme du couple, écartelé entre tradition et modernité, nécessité d’avoir de l’argent et respect des valeurs traditionnelles. La marge de manœuvre du couple est de surcroît limitée par la pression exercée par les anciens et le chantage affectif de l’enfant, mais aussi la nécessité d’avoir un revenu décent pour nourrir et éduquer tout ce petit monde.
- © Les Acacias
Le film est un document passionnant sur l’Inde post-coloniale, avec ses nouveaux riches arrogants (le patron d’Arati), ses intellectuels peinant à survivre (le père de Subrata, vieux professeur contraint de demander l’aide financière de ses anciens élèves, pour ne pas être à la charge de son fils), ou ses Anglo-Indiens restés à Calcutta, et qui se retrouvent souvent en porte-à-faux (Edith, la collègue d’Arati, qui deviendra aussi son amie). Mais nul manichéisme chez Ray dont les personnages sont nuancés et ambigus, même si « chacun a ses raisons » d’agir à sa guise, selon l’expression de Renoir. D’un propos subtilement féministe, et audacieux pour l’époque, surtout dans le contexte de la société indienne des années 60, La grande ville est également un beau portrait de femme, magnifié par l’interprétation de la sublime Madhabi Mukherjee. Le réalisateur la dirigera à nouveau dans Charulata, en 1964.
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