L’instant d’après - Éric Maltaite, Zidrou - chronique BD

L’instant d’après plonge le lecteur dans l’atmosphère annoncée dès sa couverture : le personnage principal féminin, cadré en plan rapproché, le regard ailleurs, fume une cigarette en affichant un air distant ou dur, tandis que derrière se tient une voiture, manifestement en train de basculer, dans laquelle se trouve un homme. L’étrangeté qui découle de la situation comme de la composition est renforcée par les partis pris esthétiques : la couleur fait la part belle aux rouges et aux marrons et un effet de trame recouvre en partie le corps de la jeune femme. Le ton est donné : situé à la fin des années 60, L’instant d’après lorgne du côté des polars de ces années-là et de la décennie suivante, en convoquant l’atmosphère comme l’ambiance poisseuse.

Éric Maltaite, Zidrou / Dupuis

Zidrou et Maltaite ne se contentent pas de cela : ils amènent leur histoire sur le terrain du fantastique. Page après page, il est question d’événements qui peuvent tenir du surnaturel sans que celui-ci ne soit avéré. Le récit ne cesse pas de creuser cette incertitude, celle-ci étant accentuée par la narration : la variation du nombre de cases par page, la répétition de certains cadrages… Les deux auteurs prennent visiblement un malin plaisir à déstabiliser le lecteur. Déroutant et excitant, cela témoigne également de leur volonté de ne pas se reposer sur leurs lauriers.

Éric Maltaite, Zidrou / Dupuis

Hasard du calendrier, cet album qui s’attache à des corps qui disparaissent sans crier gare des lieux dans lesquels ils se trouvent est paru au moment où le confinement dû à l’épidémie de Covid-19 s’installait dans la plupart des pays européens, période où bien des personnes aimeraient pouvoir s’échapper de chez elles…