Le 8 avril 2015
À la frontière entre film noir et comédie, cette rareté mérite largement d’être vue.
- Réalisateur : Alfred E. Green
- Acteurs : William Bendix, Dennis O’Keefe, Barbara Britton, Art Baker, Ann E. Todd
- Genre : Thriller
- Nationalité : Américain
- Editeur vidéo : Sidonis Calysta
- Durée : 1h22mn
- Titre original : Cover up
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– Sortie DVD : le 7 avril 2015
À la frontière entre film noir et comédie, cette rareté mérite largement d’être vue.
L’argument : Détective privé pour une compagnie d’assurances, Sam Donovan reçoit pour mission d’éclaircir les circonstances du suicide de Roger Phillips. "Suicide" ou plutôt meurtre, l’exhumation du corps révélant non pas un impact mortel, mais deux. Donovan se heurte vite à l’hostilité du shérif Larry Best. Désormais, tout le monde ou presque est suspect.
Notre avis : Voici une œuvre curieuse, qui commence comme un film noir, avec un détective cherchant un meurtrier, et se termine comme un conte de Noël à la Capra. Entre les deux, Donovan, le détective en question, qui travaille pour une assurance, nous sert de candide pour découvrir une petite ville américaine, bien sûr apparemment sans histoires. Et la galerie de personnages vaut le détour : un shérif bien décidé à ralentir l’enquête, son adjoint muet, une bonne acariâtre, une famille modèle qui cache une arme, des bijoutiers très soupçonneux … Chacun s’épie et tous font corps contre ce fameux et « indésirable » Donovan. Lui, évidemment, s’entête et visite des intérieurs chaleureux, coquets, à la limite de l’étouffement. Le beau noir et blanc du film met en valeur les surcharges décoratives de ce monde replié sur lui même, dont on ne cesse de nous dire qu’il s’agit d’une « petite ville », ce qui semble justifier un complot. On frise alors le grand film paranoïaque, dans lequel tout le monde est potentiellement dangereux. Sauf, et c’est la vraie surprise, que personne ne l’est. Derrière les secrets, il n’y a que l’esprit de Noël …
Il y a d’autres fausses pistes dans L’indésirable Monsieur Donovan : celle de la critique sociale qui s’appuierait sur la bonne petite ville bourgeoise ; celle de la métaphore sur les lourds secrets de l’Amérique, voire celle d’une anticipation du maccarthysme. Dans notre esprit défilent les films sombres qui ont pris pour thème l’alliance d’une ville contre un personnage : Un Homme est passé, de John Sturges, ou, dans un genre totalement différent, L’invasion des profanateurs de sépultures de Don Siegel. Mais rien de ce que nous attendions ne se produit. Il n’y a d’ailleurs pas trace de violence ici et ce sont les dialogues décalés, souvent savoureux, qui font avancer l’intrigue au gré de répliques dignes d’une comédie. Le premier échange entre le shérif et Donovan est à ce titre une merveille d’humour.
Certes, la fin déçoit. Mais toute l’ambiguïté qui préside à la majeure partie du film est remarquable. Alfred Green, qui avait commencé sa carrière au temps du muet, fait preuve d’un solide métier, jusqu’à une trouvaille visuelle : quand Donovan cherche l’arme du docteur, Anita, sa petite amie, cachée derrière la porte, apparaît nettement par un jeu de reflets. Tout n’est pas de la même eau, mais on peut difficilement faire la fine bouche devant une réalisation efficace et aux cadrages impeccablement travaillés. Le chef opérateur a visiblement soigné l’éclairage des intérieurs, toujours lisibles malgré les surcharges.
On en resterait donc à un honnête divertissement, si un détail ne nous laissait perplexe : dans ce film sur le caché, deux personnages demeurent invisibles. Il s’agit de deux morts, Phillips, la victime, et le Docteur Gerrow, qui meurt d’une crise cardiaque. Or tous deux sont des incarnations, respectivement du Bien et du Mal, deux entités quasi abstraites qu’il nous est interdit de voir. La religion étant absente, n’y a-t-il pas là comme une allusion à un combat quasi métaphysique, hors de notre portée ? En ce cas, les habitants de cette bonne ville, et donc des USA sont du côté du bien, préférant renoncer à de l’argent, passer pour des complices que de se fourvoyer. Nous voilà rassurés ...
Les suppléments :<br
Outre l’inévitable mais très courte galerie de photos, Patrick Brion, tout aussi inévitable, nous offre une mine d’informations sur le film, le réalisateur et les deux acteurs principaux (11 minutes). François Guérif revient également sur Alfred Green, et livre une analyse du film très intéressante (9 minutes).
L’image :
Malgré quelques plans granuleux et des griffures éparses, la copie est remarquable pour un film de 1949. Les nuances du noir et blanc rendent justice au travail du chef opérateur.
Le son :
Une seule piste, Dolby Digital 2.0, sans parasites, avec quelques rares saturations. Là encore, la restauration a fait des miracles.
Galerie photos
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