Effacement progressif
Le 21 mars 2011
Pour son premier long-métrage à la grâce burlesque et au tragique à peine effleuré Aurélia Georges a trouvé une économie poétique en totale adéquation avec son sujet.
- Réalisateur : Aurélia Georges
- Acteurs : Mireille Perrier, Florence Loiret-Caille, Judith Henry, César Sarachu, John Arnold
- Genre : Drame
- Nationalité : Français
- Editeur vidéo : Épicentre Films Éditions
- Date de sortie : 9 janvier 2008
- Plus d'informations : http://www.epicentrefilms.com/fiche...
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– Durée : 1h 22mn
– Sortie vidéo : le 3 mai 2011
Pour son premier long-métrage à la grâce burlesque et au tragique à peine effleuré Aurélia Georges a trouvé une économie poétique en totale adéquation avec son sujet.
L’argument : Milieu des années 70 : Un photographe fait la connaissance d’un homme émacié et ténébreux, au visage d’oiseau de proie. L’homme s’appelle Viktor Atemian. C’est l’histoire de cet homme, qui s’improvise écrivain, rencontre le succès, puis traverse le désert pour finir à la rue. Un film sur le temps qui passe, les renoncements, les sauts dans le vide.
Notre avis : Le premier long-métrage d’Aurélia Georges s’inspire de la vie de Vladimir Slepian (1930-1998), émigré politique russe qui connut une certaine notoriété d’abord comme peintre, puis comme écrivain avant de disparaître dans l’anonymat jusqu’à ce qu’on le retrouve mort de faim sur un trottoir de Saint-Germain des Prés.
La cinéaste a trouvé en César Sarachu un presque sosie de Slepian et les points communs entre Viktor Atemian, le protagoniste de L’homme qui marche, et son modèle sont nombreux : comme lui, il décide un beau jour de changer de nom et le texte dont il lit un extrait dans les premières scènes est bien le Fils de chien publié dans la revue Minuit de janvier 1974.
Mais le titre choisi pour le film fait apparaître sans ambigüité possible que ce n’est pas l’aspect biographique qui a intéressé Aurélia Georges, pas plus que la reconstitution du Paris des années 74 à 98, même si un souci d’exactitude historique est perceptible dans les détails : prix d’un café-croissant, couleurs et coupes des vêtements, vocabulaire et tournures de phrases d’époque.
Aidée, si on peut dire, par l’exigüité de son budget, la cinéaste a adopté une économie esthétique minimaliste en parfait accord avec son sujet : l’histoire d’un homme qui se rétracte dès que les autres menacent d’avoir la moindre prise sur lui et qui coupe peu à peu les attaches ténues le reliant au monde qui l’environne.
Les chapitres signalés par des indications de dates (1974, 1978, ...) sont de fragiles blocs temporels extraits de l’oubli et correspondent aux réapparitions, à intervalles plus ou moins longs, dans la vie des autres, de ce personnage, fantôme en devenir finissant par s’évaporer totalement.
C’est avec un véritable génie burlesque, mais comme retenu, et une grâce de danseur que l’étonnant acteur espagnol César Sarachu, exécute sa subtile chorégraphie d’oiseau farouche et d’arpenteur des rues de la capitale. Là aussi c’est par la soustraction, la minimisation des effets, qu’est obtenue l’intensité maximale et c’est dans la légèreté enjouée qu’affleure sans cesse le tragique.
Observant sans ostentation une ligne morale et esthétique exemplaire, la mise en scène d’Aurélia Georges, qui revendique l’influence de Bresson, se signale par la précision des cadrages et l’attention aux couleurs. Elle fait effectivement penser aux Quatre nuits d’un rêveur plutôt qu’à L’homme qui dort de Queysanne et Pérec, dont le thème est pourtant proche.
La force poétique de ce film admirable est directement proportionnelle à son refus de tout épanchement lyrique.
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Le DVD
Une édition DVD exemplaire du film par Epicentre films sera disponible le 3 mai 2011
Les suppléments
Ce sont de vrais suppléments, qui apportent des éclairages précieux sur ce film singulier :
– Dans le très beau court-métrage en Beta Il y aurait produit par la FEMIS en 2000, Aurélia Georges lit en voix-off des extraits du roman de Georges Pérec Les choses en filmant le quartier de Strasbourg-Saint Denis : enseignes de magasins, passants et livreurs, travail d’un pressing chinois, néons dans la nuit.
– Au cours d’un entretien de 23 minutes la cinéaste, répondant aux questions bien ciblées de Bernard Bénoliel, explique avec clarté et simplicité ses choix de mise en scène et nous met l’eau à la bouche en parlant de son projet de comédie à multiples personnages.
– César Sarachu, interviewé au Havre entre les prises de vues d’un film qu’il y tournait en février 2011, insiste sur sa proximité avec le personnage et sur l’aspect technique, quasi chorégraphique, de son interprétation longuement préparée avec la réalisatrice avant le début du tournage.
– Une filmographie succincte, la bande-annonce et une galerie photos complètent le programme.
– Des sous-titres anglais sont proposés en option.
Image
Franchise des couleurs, parfaite définition, compression irréprochable : toutes les conditions sont réunies pour nous permettre d’apprécier la grande beauté visuelle de ce film dont le sens est indissociable de son projet esthétique .
Son
La captation de l’environnement sonore urbain dans lequel est plongé le protagoniste a fait l’objet d’une attention toute particulière auquel le report en DVD, en Dolby Digital Stereo, rend parfaitement justice. Là aussi, le résultat est irréprochable.
Galerie Photos
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