Le 19 mars 2024
Deux destins examinés par le regard tragique et désabusé d’un Kitano au mieux de sa forme.
- Réalisateur : Takeshi Kitano
- Acteurs : Masanobu Ando, Ken Kaneko, Leo Morimoto
- Genre : Drame, Teen movie, Film de sport
- Nationalité : Japonais
- Distributeur : Swift Distribution
- Editeur vidéo : La Rabbia
- Durée : 1h47mn
- Box-office : 28.000 entrées France / 14.079 entrées Paris Périphérie
- Titre original : Kizzu ritân
- Date de sortie : 16 avril 1997
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Résumé : Masaru et Shinji n’aiment pas le lycée. Ils préfèrent traîner dans les bars, voler et glander. Mais un jour, les deux adolescents reviennent accompagnés d’un ami boxeur qui met Masaru KO. Ce dernier décide alors de se mettre au Noble Art, rapidement suivi par Shinji, lequel va se révéler bien meilleur boxeur. Dépité, Masaru va tenter sa chance du côté de la pègre locale…
Critique : Sixième film de Kitano, Kids Return suit le parcours de deux petites frappes sans envergure, promises dès le lycée à l’échec par des profs qui les traitent de « crétins », parcours dont le caractère autobiographique a été souvent souligné. D’où une tendresse manifeste pour ces perdants, comme pour d’autres figures secondaires, dont l’amoureux transi d’une serveuse. Kitano dessine un portrait assez sombre d’une jeunesse sans idéal, dans un monde lui-même bâti sur des rapports de force et le mépris. Pas grand-chose à sauver de ce monde qu’il cadre le plus souvent de manière étroite et dans des lieux clos.
- Copyright La Rabbia
Mais ce qui frappe ici, comme souvent chez Kitano, c’est un rythme singulier, fait de moments creux, de séquences trop longues ou d’ellipses brutales. Ainsi des errances des deux jeunes, baignées par la musique entêtante de Joe Hisaishi, ou des combats dont sont montrés essentiellement l’avant (l’attente) ou l’après (les commentaires). Il prend son temps, détaillant les entraînements avec minutie (et un tempo très maîtrisé), multiplie les scènes de bar sans se répéter, et déchaîne sa violence dans des moments aussi courts qu’abrupts.
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Des deux garçons, Shinji est le plus influençable : il veut boxer parce que Masaru boxe, mais est prêt à renoncer bien qu’il soit doué sitôt que son compère abandonne. Sans aucune lucidité, il suit les mauvais conseils d’un autre boxeur, comme il suivait Masaru dans des rackets minables. Au fond, tous deux sont inadaptés à une société qui ne valorise que l’obéissance ; velléitaires, incapables de se tenir à un projet, ils vivotent et ne savent pas se saisir de leur chance. Car de chance, il n’y en a qu’une (la boxe pour l’un, la mafia pour l’autre), et si l’espoir les porte un temps, il s’effondre tout de même, comme si un mauvais génie s’acharnait à leur perte. Sauf que Kitano ne les déresponsabilise pas ; ils restent les artisans de leur chute. Avec leurs maximes ridicules (« soit tu es fort, sois tu ne l’es pas » ; « si tu veux rendre ta femme heureuse, tu dois bosser dur »), les autres les guident mal ou sont inefficaces.
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Mais ce qui nous attache particulièrement à ce film, c’est le sentiment de l’inéluctable : les personnages sont des perdants, à l’exception d’un duo comique qui semble réussir ; à l’âge où tout se décide, ces jeunes garçons (peu de femmes, et elles jouent un rôle mineur) ont tiré les mauvais numéros d’une loterie injuste et dans l’indifférence générale des parents absents et des professeurs prompts à juger, ils chutent lentement. Même si le tragique n’est présent que par l’accident suicide du jeune amoureux qui court après le travail et l’argent, la défaite est globalement cinglante et sans appel. Ne reste qu’une amitié inaltérable, qui fait se retrouver les deux protagonistes régulièrement, et qui colore d’une légèreté intermittente ce beau film sombre et mélancolique.
Les suppléments :
Outre la bande-annonce de 2017, le Blu-ray propose un making of des plus classiques, avec voix off explicative, mais révélateur des méthodes de tournage de Kitano (22mn).
- Copyright La Rabbia
L’image :
Sans être somptueuse, la copie est bien définie et propre. Les choix esthétiques sont respectés, les couleurs impeccables. Une belle restauration, en un mot.
Le son :
Si les dialogues sont limpides, c’est dans les nappes musicales que se dévoilent la beauté d’une piste DTS-HD 2.0. La VF existe, mais elle paraît bien curieuse et décalée.
– Sortie combo Blu-ray + DVD : 4 juillet 2018
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