Seize longs métrages pour porter un regard singulier sur l’Amérique d’aujourd’hui.
Gus Van Sant est né en juillet 1952 à Louisville, dans le Kentucky. En raison des obligations professionnelles d’un père représentant de commerce, il voyage beaucoup alors qu’il est enfant. Très tôt, il s’intéresse à la peinture mais aussi à ce qui touche à l’image grâce à la découverte de la caméra Super 8. Alors qu’il est encore à l’école, il réalise, pour des budgets dérisoires, des petits films à l’aspect très autobiographique. C’est à la Rhode Island School of Design qu’il entre en 1970. Il fait la rencontre de David Byrne, l’un des futurs membres du groupe Talking Heads. Dans cette école, il reçoit une formation au cinéma d’avant-garde et au travail de réalisateurs comme Stan Brakhage ou Jonas Mekas. C’est décidé, il abandonne définitivement la peinture pour se consacrer pleinement au cinéma.
Il voyage en Europe puis, en 1976, travaille à Los Angeles comme assistant de production pour Ken Shapiro. Toutes les frustations liées à cette entrée dans la profession sont exposées dans Alice in Hollywood (1981), son premier court métrage, où il évoque l’arrivée d’une jeune actrice dans la jungle d’Hollywood, qui finit par renoncer à ses idéaux. Durant cette époque, Van Sant a le temps d’observer le monde qui l’entoure, principalement la population délaissée de Los Angeles, pour laquelle il se prendd’affection. Le réalisateur comprend mal comment une société peut abandonner une certaine catégorie sociale dans une ville où règne le diktat de l’argent. Son premier long métrage, Mala noche (1985), évoquera ce paradoxe.
C’est grâce à un emploi dans une agence de pub qu’il parvient à financer ce premier film. Entre-temps, Van Sant est parti à New York et a réussi à mettre de l’argent de côté. Mala noche est adapté d’un roman de Walt Curtis et parle d’un amour fou entre un employé homosexuel et une immigrée mexicaine en situation irrégulière. Entièrement filmé en noir et blanc, Mala noche reçoit le prix du meilleur film indépendant décerné par le Los Angeles Times. A compter de ce moment, Van Sant est courtisé par Universal. Mais ce rapprochement sera de courte durée. Les projets du réalisateur (parmi lesquels les futurs Drugstore cowboy et My own private Idaho) sont loin de faire l’unanimité et n’intéressent pas les studios.
Van Sant part alors à Portland pour concrétiser ses projets. Il tourne, aidé par Avenue, une société de production indépendante, Drugstore cowboy (1989), long métrage traitant de la toxicomanie. Van Sant devient un réalisateur sur lequel le cinéma doit compter. Et Matt Dillon, grâce à son rôle de junkie repenti, relance sa carrière... Plusieurs prix couronnent le travail du réalisateur. River Phoenix et Keanu Reeves sont à l’affiche de My own private Idaho (1991) et jouent deux amants partis sur les routes de l’Ouest américain. Les préoccupations du réalisateur sont restées similaires à celles de ses débuts : l’aliénation, mais surtout un certain concept de la famille. Le scénario reçoit l’Independent Spirit Award.
En 1994, Van Sant adapte le roman de Tom Robbins Even cowgirls get the blues (Même les cowgirls ont du vague à l’âme). Ce film, tant du point de vue de la critique que du public, reçoit un accueil plutôt froid. Le budget investi est pourtant lourd et le casting de bonne qualité (Uma Thurman, John Hurt, Keanu Reeves).
To die for (Prête à tout), en 1995, va quelque peu redorer le blason de Van Sant. Il s’agit de l’adaptation d’un roman de Joyce Maynard, une comédie noire, avec Nicole Kidman et Matt Dillon. La même année, Van Sant produit Kids, un film de Larry Clark. En 1997, il fait appel aux services de Matt Damon, Robin Williams et Ben Affleck pour la réalisation de Good will hunting, film au budget faramineux. Ce film recevra une avalanche de nominations dans plusieurs festivals et quelques prix, dont le Golden Globe du meilleur film. Le remake du Psychose d’Hitchcock en 1998 connaîtra un succès mitigé. Van Sant publie un roman peu après, Pink. Il réalise parallèlement quelques clips pour des artistes comme David Bowie ou les Red Hot Chili Peppers. Finding Forrester (A la recherche de Forrester) (2000), avec Sean Connery, raconte la rencontre entre un lycéen et un écrivain célèbre. Même si certains critiques reprochent à Van Sant de réutiliser les mêmes ficelles que dans Good will hunting, le succès du film est considérable.
Gerry (2002) est l’occasion pour le réalisateur de retrouver l’acteur Matt Damon. Elephant (2003) reçoit la Palme d’or et le prix de la mise en scène 2003 au festival de Cannes. En 2005, Van Sant est à nouveau présent sur la croisette avec Last days. Ces trois films, dans l’esprit du cinéaste, sont reliés entre eux. Il est vrai qu’on y trouve un même état d’esprit... et les mêmes tics. Mais ne faisons pas la fine bouche et constatons qu’ils propulsent Gus Van Sant au rang d’auteur majeur que le festival de Cannes récompensera en lui attribuant le prix du 60e anniversaire alors qu’une fois de plus un de ses films - et non des moindres - Paranoid Park faisait partie de la sélection officielle.
Filmographie
– Mala noche (1985)
– My new friend (1987)
– Five ways to kill yourself (1987)
– Drugstore cowboy (1989)
– My own private Idaho (1991)
– Even cowgirls get the blues (1993)
– Prête à tout (To die for) (1995)
– Ballad of the skeletons (1996)
– Will hunting (Good will hunting) (1997)
– Psycho (1998)
– A la rencontre de Forrester (Finding Forrester) (2000)
– Gerry (2002)
– Elephant (2003)
– Last days (2005)
– Paris je t’aime (Le Marais) (2006)
– Paranoid Park (2007)
– Harvey Milk (Milk, 2009)