Le 12 avril 2019
Le nouveau pape du gnan-gnan rétro, tendance Amélie Poulain, signe un morceau aussi agaçant qu’une craie qui crisse.


- Chanteur : Gauvain Sers

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Le deuxième album de Gauvain Sers, Les Oubliés, est sorti il y a quelques jours, aussi ennuyeux et prévisible qu’un jour de pluie en Normandie. Le morceau éponyme avait été envoyé en éclaireur, quelques semaines auparavant. Depuis, la ritournelle et son clip ont rencontré un certains succès en ces temps de désertification rurale et de défiance aux couleurs jaunes. Épigone d’un chanteur énervant -en plus aseptisé-, Gauvain Sers le parodie jusqu’au lexique -« bonbec », « « marmot », des mots que les plus de 80 ans utilisent peut-être et dont la version photographique serait un cliché de Doisneau. Sauf que le jeune interprète s’est trompé d’époque. Ça fait trente ans que l’on ne dit plus "instit’", quand bien même le monsieur qui incarne l’enseignant, dans le clip, sosie du personnage principal d’Etre et avoir (Georges Lopez), en serait l’incarnation caricaturale : nanti d’une barbe façon hussard de la République et d’un pull à col roulé, il trace d’une écriture calligraphique la date du jour sur un tableau noir. A l’heure du numérique, ce cliché rance a des accents passéistes qui ombragent le propos. La France qu’on délaisse et que chante l’artiste, est un pays fantasmé à peu de frais, réduit en quelques expressions ("la p’tite boulangère" vs "les cravatés du col", le rat des villes contre le rat des champs, en quelque sorte) . On peut s’indigner de la fermeture des classes, s’en prendre à l’éternelle tradition jacobine de la France, constater l’exode rural avec dépit. On peut aussi le faire avec d’autres manières qu’un Yves Duteil, douceur et bons sentiments à la clef, sans se satisfaire d’une opposition manichéenne que ne désavouerait pas un Jean-Pierre Pernaut des grands jours.