Le 16 mars 2021
Une jeune femme indépendante est poussée à se marier par tout son entourage. Yasujirõ Ozu propose une nouvelle variation de sa description de la famille japonaise, autour du projet de mariage de son héroïne.
- Réalisateur : Yasujirō Ozu
- Acteurs : Chishū Ryū, Setsuko Hara, Chikage Awashima, Kuniko Miyake, Ichirō Sugai
- Genre : Comédie dramatique, Noir et blanc
- Nationalité : Japonais
- Distributeur : Shochīku
- Durée : 2h04min
- Titre original : Bakushū
- Date de sortie : 3 octobre 1951
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Résumé : En banlieue de Tokyo, Noriko (Setsuko Hara), célibataire de vingt-huit ans vit avec toute sa famille dans la même maison : il y a ses parents Shukichi (Ishiro Sugai) et Shige (Chieko Higashiyama), son frère médecin Koichi (Chishū Ryū), sa femme Fumiko (Kuniko Miyake) et leurs deux garçonnets. Libre et indépendante, elle travaille comme dactylo dans une entreprise de Tokyo. Toujours gaie et insouciante, elle s’entend avec tout le monde, et sort avec ses nombreuses amies. Seulement, on lui rappelle souvent qu’à son âge, elle devrait songer à se marier.
Critique : Yasujirõ Ozu reprend un thème similaire à celui de Printemps tardif ("Banshun", 1949) : celui d’une femme proche de la trentaine, qui est sommée, ou presque, de se marier par son entourage. Bien que ce ne soit pas strictement le même personnage, c’est la même actrice, Setsuko Hara, qui en est l’héroïne principale et porte le même prénom : Noriko. On la retrouvera une troisième fois dans Voyage à Tokyo ("Tõkyõ monogatari", 1953) où elle interprète une veuve de guerre. Ces trois films seront qualifiés de "Noriko trilogy".
Dès les premières images, le cinéaste met en place sa petite musique inimitable : un long plan fixe sur une plage vide, puis l’intérieur, d’abord sans mouvement, d’une maison au petit matin, qui va peu à peu se réveiller, avec le grand-père, passionné de botanique, les deux garçonnets un peu espiègles, légèrement en retard pour partir à l’école. Le fils aîné, lui, semble préoccupé par le cas d’un patient et a la tête ailleurs. Il va partir en premier. Sa femme s’affaire en cuisine avec sa belle-mère pour assurer le petit-déjeuner. Noriko, toute pimpante et tout sourire, après avoir tranquillement déjeuné, va elle aussi suivre le même chemin que son frère : le train de banlieue jusqu’à Tokyo.
La période de la guerre pèse encore : on se souvient de petits événements survenus durant cette période et la grand-mère espère toujours discrètement le retour de son autre fils, pourtant toujours porté disparu.
Noriko représente la nouvelle femme japonaise : indépendante, salariée et ne voulant pas d’un mariage imposé. D’ailleurs, même si elle le fait tout en douceur, elle ne donnera pas suite au mariage arrangé que lui a proposé son patron avec l’un de ses anciens camarades de classe.
Les enfants eux, casquette de base-ball rivée sur la tête, représentent la nouvelle génération prête à la consommation et un tantinet rebelle à l’autorité.
Le récit, à la fois gai et triste, observe, à travers la vie de cette famille, les mutations de la société japonaise d’après-guerre, prise entre tradition et modernité et montre le mariage comme seule issue pour une femme, si elle veut réussir son existence.
On peut imaginer que Noriko aurait pu continuer de vivre joyeusement sa situation plutôt facile de célibataire, si la pression de sa famille, de ses amies, et même de ses collègues ne la poussait pas en permanence vers un mariage, fût-il un peu forcé. Même son responsable, au demeurant plutôt sympathique, lui laisse entendre à un moment qu’elle est peut-être homosexuelle, en refusant ainsi le mariage.
Filmé à "hauteur de tatami", avec de longs plans fixes, parfois vides de toute présence humaine, le film nous donne le sentiment du temps qui passe avec une douce nostalgie : le grand-père effectue une promenade à pied jusqu’au passage à niveau, Noriko et sa belle-sœur vont avoir une discussion apaisée sur la plage ;
les deux gamins, qui courent sur la jetée, sont vexés d’un cadeau qu’ils jugent inapproprié.
Ce très beau film continue à tisser la même toile du cinéaste (c’est ce que lui reproche ses détracteurs) : la chronique douce-amère de la famille japonaise.
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