Dryades - La chronique BD

Un soir de pluie Yacha rentre chez elle et son colocataire lui annonce qu’il ne sera pas là durant un mois.
Dépitée, triste et seule, Yacha ouvre un livre duquel s’échappe toute la magie de ce dernier : des arbres foisonnants qui envahissent ses intérieurs.

De retour à la bibliothèque dans laquelle elle travaille, elle décide de sous-louer la chambre de son colocataire.
Rudica se présente, tous cheveux hirsutes. C’est elle… tout simplement… et parce que c’est ainsi. Histoire de connexion subjective et au grand étonnement du patron de Yada, un peu jaloux.

Rudica s’est échappée de la prison dans laquelle un ogre la retenait.
Elle fascine Yacha et au fil des jours, elle enchante son quotidien avec ses histoires, ses légendes et son aura ésotérique.
Telles des nymphes les deux jeunes filles se rendent compte qu’en unissant leurs forces, elles font revivre les plantes desséchées et peuvent soigner les gens. Elles dessinent leur amour de la vie et leur partage sur les murs de Bruxelles, gommant la grisaille de la capitale.

Mais tel un vieil arbre à palabres africains, les cancans feuillus du quartier leur tombent dessus et bientôt elles se retrouvent traquées telles des sorcières.
Rudica et Yacha s’attirent les foudres des "vrais" docteurs - les diplômés - ceux qui appliquent la théorie plutôt que le ressenti.

Sous ce conte poétique un peu "barré" et atypique - premier ouvrage très réussit de la toute jeune et talentueuse Tiffanie vande Ghinste - se cache l’avertissement d’une société du jugement et de l’intolérance.
Le noir, le blanc et ses dégradés de gris, parsemés de touches vertes ou rouges, donnent un ton sobre à ce roman graphique naïf et apaisant, malgré la vivacité et la profondeur abyssale de certaines planches.

C’est une belle histoire hors du temps qui questionne, autorise une respiration, une joie de pouvoir s’évader et espérer une meilleure condition pour les femmes, un meilleur avenir, une meilleure considération d’elles-mêmes et l’espoir d’avoir un jour la confiance naturelle que l’humanité ne leur donne pas naturellement dès leur naissance… juste parce qu’elles naissent filles.