Notre avis : Les gorgerins grimaçants garnis de moustaches touffues protègent les carotides du tranchant des sabres. Des dragons émergeant de casques laquées pointent leurs griffes et leurs crocs vers l’ennemi. Des fleurs de cerisier gravées ornent les plastrons bruns, à la gloire d’un seigneur régional. Des nattes d’écailles de fer, estampées d’héraldisme animalier et flanquées de plumes de paon sur des canevas de soie rouge couronnent les Daimyo.

christophe lambert

Bref...pour ce qu’il y a de plus laid au monde, c’est à dire la guerre, ces objets militaires sont des chefs d’oeuvre. Il faut rendre à Hirohito ce qui est à Hiroito, surtout au palais de Tokyo. Respect ! Avec inclinaison marquée du buste et les yeux rivés au sol.
Leur facture esthétisait l’autorité de ces seigneurs médiévaux... certes... Ce soin de l’apparence, à ce degré, n’a pas son équivalent. Les boîtes de conserve que sont les armures européennes, forgées pour leur seule efficacité, n’ont rien de précieux sinon la brillance de leur blindage. Quelques ciselures et martelages, trois plumes de couleur rouge dépassant de la casserole grinçante, vissée sur la tête du champion de tournois ne peuvent se comparer à ces vagues de tissages, ces masques animaliers, ces jeux de matières... cette combinaison sublime, de formes, de couleurs, d’artisanats.
Pourquoi ? Quelle est la source de ce raffinement ? Qu’avons-nous à apprendre encore aujourd’hui de cette préciosité ?
Kagemushistes, designers en épures, graphistes, sculpteurs, vous qui vous êtes promis d’aller là-bas voir la vague d’Hiroshige à l’assaut du Fujiyama, vous qui aimez les gyosas, les geishas, les yakusas, les yamahas, vous qui vous demandez comment on devient la troisième puissance financière mondiale depuis une île, vous les primo-accédants au musée Guimet qui en profiterez pour découvrir l’Asie et les autres, suivez en ces trois lieux, le parcours passionnant du combattant nippon.