Le 9 juillet 2022
Un film très sage sur un personnage qui l’était moins. Coluche en campagne, c’était tout de même plus rock’n’roll que cet aimable album souvenir.
- Réalisateur : Antoine de Caunes
- Acteurs : Olivier Gourmet, Léa Drucker, François-Xavier Demaison, Jean-Pierre Martins, Laurent Bateau
- Genre : Drame, Biopic, Politique
- Nationalité : Français
- Distributeur : Mars Distribution
- Durée : 1h43mn
- Date télé : 9 juillet 2022 20:50
- Chaîne : Ciné+ Club
- Date de sortie : 15 octobre 2008
Résumé : Automne 1980. Voilà plus de deux ans que Coluche triomphe tous les soirs au Gymnase, et que ses histoires circulent des cours de récréation aux bancs des universités en passant par les usines, les cafés, les salons ou les prisons. Comme un fil invisible qui se faufilerait à travers le fameux tissu social. L’ex-petite frappe de Montrouge fait rire un peu tout le monde, les opprimés de leurs oppresseurs, et certains des oppresseurs d’eux-mêmes. On peut exploiter le pauvre monde et aimer rire...
Critique : Le titre du film est trompeur : le long métrage d’Antoine de Caunes ne prétend pas raconter la vie du célèbre humoriste, mais restituer un épisode de son existence, parmi les plus controversés : sa candidature à l’élection présidentielle de 1981. Coluche ne fut pas le premier à tenter l’aventure. En 1965, Pierre Dac avait eu l’idée d’aller concurrencer le général de Gaulle. Mais c’était un autre temps et, quoiqu’il fût un formidable résistant autant qu’un très estimable pourvoyeur de blagues absurdes, Dac ne prétendait pas emmerder le monde comme le fit Coluche. Alors quelle est l’intention d’Antoine de Caunes à travers ce film ? Montrer à quel point cette époque-là manque, qui voyait chaque soir une faune hétéroclite conviée aux orgies dionysiaques de celui que Desproges (dans une très acide chronique) appela un jour "Rigolo XIV" -en effet, les sauteries du prince sont très présentes dans le film- ? Rappeler que Coluche ne fut pas, de son vivant, une icône intouchable -aujourd’hui Saint Patron d’une association philantropique-, et que sa candidature a alerté l’ensemble de la société sur le vide politique et l’incapacité de nos gouvernants à satisfaire les besoins du peuple (encore aujourd’hui, diront certains gilets jaunes, qui le brandissent comme un étendard) ?
Il témoigne surtout -et c’est ce qui semble son aspect le plus intéressant- du cheminement de Coluche dans sa conscience politique. Sa candidature est un révélateur et lui-même le sait, qui créera quelques années un missile à plus longue portée : les Restos du cœur. Enfin, croyait-il.
En cela, l’épilogue du film saisit intelligemment la signification profonde de cet événement, bien moins rigolo qu’il n’y paraît. On sait que Coluche a dérangé (y compris la gauche). On sait également que cette candidature inaboutie lui permettra de tisser un lien privilégié avec Jacques Attali (Denis Podalydès, impeccable). Mais prétendre que le comique pouvait à lui seul incarner une révolution copernicienne à l’échelle sociétale, c’est faire peu de cas de ce que peut être une véritable pensée politique, et se tromper sur les pouvoirs de l’intuition, aussi géniale soit-elle. Certes, Coluche prend le pouls, des poujadistes (Nicoud) à l’extrême gauche (Goupil), mais finalement il demeure fidèle à ce qu’il sait faire le mieux : du spectacle. Sur scène, dans la vie, quitte à lasser ses proches, sa femme en premier. De Caunes l’accompagne sagement, qui réduit la séquence 80-81 à une sorte de best-of agréable, très zapping Canal+. Demaison porte sur ses épaules un mythe de l’humour, s’en acquitte avec professionnalisme, mais semble intimidé par la charge symbolique, se contentant de singer le coluchisme, gestes et accents à l’appui.
Episode peu connu, qu’il aurait été intéressant de voir dans le film : un jour, l’humoriste se rend avec le dessinateur Cabu pour rencontrer les élèves de l’Ecole Polytechnique. Après deux saillies et trois cabrioles, il quitte assez rapidement la salle, pris de court par des questions politiques auxquelles il s’avère manifestement incapable de répondre.
Vers la fin du biopic, arrive un épisode plutôt connu : ni auxiliaire de la gauche, ni dupe de ses propres insuffisances, le bouffon passe le relais rue de Solférino, tandis que les socialistes triomphants se rassemblent à la Bastille : "Faites pas les cons" avertissait Michel Colucci. Pas sûr qu’il ait été vraiment entendu.
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romaric 26 octobre 2008
Coluche, l’histoire d’un mec - la critique du film
Une réussite
Ce film ambitieux réussit son pari en traitant une partie assez cachée de la vie de Coluche. Je suis fan de l’humoriste mais j’étais malheureusement trop jeune quand il nous a quittés en 1986. Je ne connaissais que des bribes de sa campagne pour les élections présidentielles de 1981. L’œuvre restitue bien cet épisode et la composition de François-Xavier Demaison est excellente. Pour tous ceux à qui Coluche manque beaucoup, le voir revivre pendant une heure quarante cinq est un beau cadeau.
Norman06 19 avril 2009
Coluche, l’histoire d’un mec - la critique du film
Le titre est bien sûr trompeur : ce n’est pas un biopic sur l’humoriste ; ceci dit, sur le papier, cet épisode de sa vie aurait pu faire l’objet d’un regard acerbe sur la société française en transition entre l’ère Giscard et la période Mitterrand. Hélas, le film est d’une pure banalité télévisuelle et accumule les anecdotes, là où le Frears de The Queen ou le Guédiguian du Promeneur du Champ-de-Mars étaient d’une rare acuité.