Le 3 septembre 2015
Un conte cruel de la jeunesse, désespéré et plein d’énergie.
- Réalisateur : Ivan I. Tverdovsky
- Acteurs : Nikita Kukushkin, Filipp Avdeev, Masha Poezhaeva
- Genre : Drame
- Nationalité : Allemand, Russe
- Durée : 1h25mn
- Date de sortie : 23 septembre 2015
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Un conte cruel de la jeunesse, désespéré et plein d’énergie.
L’argument : Lena est une adolescente brillante, pressée de retourner sur les bancs de l’école après des années de déscolarisation. Elle rejoint une classe adaptée aux élèves atteints de troubles physiques ou mentaux. La jeune fille s’intègre à la vie de l’école, mais le bonheur qu’elle affiche avec Anton, l’un de ses camarades de classe, n’est pas du goût de tout le monde. Ni sans conséquences.
Notre avis : Une femme pousse le fauteuil roulant de sa fille vers un lycée ; leur chemin est interrompu par un barrage, un jeune homme étant mort sur la voie ferrée. Elles parviennent à l’école, très vite victime du mépris des autres, et en particulier de la responsable. Voilà le début, fulgurant, noir et cruel du film. Et, malgré quelques trouées lumineuses, ce chemin réel comme symbolique ne conduit qu’à plus d’enfermement et de noirceur.
L’enfermement se manifeste d’abord par ce lycée froid, véritable prison aux murs lépreux, que la caméra arpente sans cesse. Les professeurs s’y ennuient, bradant un savoir enfantin et organisant des séances ridicules de gymnastique ou d’éducation sexuelle. Partout les élèves sont dévalorisés et épiés ; le réconfort que la jeune Lena trouve dans le groupe d’ « anormaux » est précaire et se désagrège vite. Quant aux autres, le personnel comme les lycéens, ils sont aveuglés de certitudes et condamnent sans appel. Lena a beau être forte, elle sera broyée autant par un système abstrait que par ses représentants réels.
© Arizona Films
Avec ce film qui s’inspire du Dogme95, Ivan Tverdovsky, dont c’est la première fiction, entendait s’attaquer au scandale de ces classes d’adaptation, qui abaissent les adolescents et manquent cruellement de moyens. Mais il dépasse le film à thèse, et heureusement, en englobant le cercle familial (l’épouvantable mère d’ Anton), et en s’attachant à ce groupe de marginaux qui trouve près de la voie ferrée, avec des jeux dangereux et sous la menace de la police, un havre de paix. Ce sont des moments heureux, de partage misérable. La caméra portée fait alors comme les adolescents preuve d’une énergie folle, virevoltant sans cesse, saisissant des mouvements ou des expressions fugaces. Mais, comme un pendant inversé, ce lieu sinistre deviendra le champ de l’une des séquences les plus dures du film, après que le groupe se sera ligué contre Lena.
À la manière de Roméo et Juliette contemporains, les deux adolescents amoureux voient se dresser contre eux le monde entier, sans cesse surveillés, interrompus et calomniés. Si la jalousie de Misha peut se comprendre, l’hostilité des adultes est d’une dureté éprouvante, et l’on n’ oubliera pas le conseil qui décide froidement de l’avenir de Lena en mettant en avant sa maladie incurable.
Le monde que le cinéaste met en scène est inhumain. La dernière scène, dans laquelle la mère s’humilie devant la femme de ménage en donne la clé (« Il est où, notre couloir à nous ? » hurle-t-elle) : il n’y a pas de place pour les anticonformistes, et Lena, trop intelligente, trop belle, trop confiante, vit son chemin de croix jusqu’au miracle final. En filmant ces êtres à part, somptueusement interprétés, Tverdovsky réalise une œuvre dérangeante, désespérée, et procure au spectateur un malaise tenace. Sa vision noire, peut-être trop par moments, atteint l’émotion sans jouer le lacrymal, sans violons (la musique est peu présente), sans effets. Elle n’en est évidemment que plus forte.
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