Le 27 avril 2017
Alexandru Belc signe un documentaire soigné qui, partant de la situation d’un homme et du cinéma en Roumanie, évolue vers un questionnement universel.
- Réalisateur : Alexandru Belc
- Genre : Documentaire
- Nationalité : Roumain, Tchèque
- Distributeur : Outplay Distribution
- Durée : 1h10mn
- Date de sortie : 17 mai 2017
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– Festival du Film de Trieste (Italie) – Prix de la Résistance Culturelle ; DocuArt Film Festival (Roumanie) – Prix du Meilleur Montage ; Festival International du Documentaire de Création de La Rochelle – Mention Spéciale
Résumé : En 1989, il y avait plus de 400 cinémas en Roumanie. Aujourd’hui, il en reste moins de 30. C’est l’histoire d’un combat. Celui de Victor, directeur de cinéma depuis plus de 40 ans et cinéphile militant, qui se bat au quotidien avec ses deux employées pour tenter de sauver sa salle, l’une des dernières de Roumanie. Baigné entre nostalgie et rêves d’avenir, Victor tente de résister avec passion.
Notre avis : Cinéma, mon amour est un documentaire sans voix off explicative,, chiffres ou graphiques, et qui parle pourtant, à travers un personnage omniprésent, de la situation du cinéma en Roumanie et, partant, qui se transforme en une réflexion beaucoup plus générale ; les salles roumaines sont toujours propriétés de l’État, qui s’en désintéresse et les laisse péricliter : on verra dans le film leur désagrégation progressive (le froid, les rats, les problèmes techniques, les murs qui s’effritent…). Certes, à Bucarest, une responsable dit que les choses évolueront, mais ses promesses vagues, assorties d’un « Dieu nous aidera à trouver la solution » ne sont pas très engageantes.
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Victor lui-même, le directeur de la salle, alterne espoirs et découragements ; il fait tout, répare, peint, rénove, se transforme en Indiana Jones du pauvre pour inspecter, torche à la main les sous-sols de terre battue. Avec ses deux employées, il donne surtout l’impression de s’ennuyer en attendant les clients, de plus en plus rares, et se perd dans des souvenirs d’une époque glorieuse, du temps où il était accueilli « comme un roi » quand il débarquait du bus avec les bobines. Mais il n’y a plus de bobines, sauf celles avec lesquelles les enfants jouent au début, ou celle de Rio Bravo, retrouvée par hasard. Fétichisme mélancolique, symbole du temps qui passe. Si Victor fait un parallèle constant entre le cinéma et la vie, il évoque également ce qui rapproche la salle désertée de sa propre existence et toujours la même plainte, en mineur, celle d’un homme seul qui poursuit un combat. Mais hormis les deux femmes qui l’accompagnent, ce combat n’intéresse personne et au fond le film nous parle de solitude : sa famille est ailleurs, en Italie, et ce Don Quichotte insomniaque pense souvent à abandonner, à déserter. Émise plusieurs fois, cette idée teinte le documentaire d’une tristesse prégnante, contamine les quelques moments heureux, essentiellement dus à la musique.
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Alexandru Belc choisit de filmer sans intervenir : il reste à distance, comme frappé de respect face à cet homme à qui le cinéma « a pris 20 à 30 ans de la vie » ; il l’observe méticuleusement, le suit en Allemagne ou dans cette salle qui fait partie de lui, fragmentant cette observation en moments bruts. On peut trouver le temps un peu long, mais la droiture du projet, son absence de concessions, voire son militantisme transforment des épisodes anecdotiques en une leçon de sagesse. Si l’on s’interroge constamment sur les motivations de Victor, on est surtout emporté par ses interrogations sur le sens de la vie, sur la vanité d’une lutte inégale. C’est sans doute ce qui fait le prix de ce petit film, à la douce musique entêtante.
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