Cannes 2018 : le palmarès de l’édition 2018, Une Affaire de famille

Alors que Netflix complotait en coulisses pour ringardiser le festival de Cannes (pas un film acheté sur le Marché du film), que les studios américains favorisent désormais les grandes manifestations de rentrée (Venise, Toronto, New York...) pour se rapprocher le plus possible des Oscars afin que les films conservent suffisamment de vivacité dans les esprits pour décrocher des nominations, Cannes a du faire face cette année à des contradictions et des choix décevants.
Des rancœurs féminines contre le peu de nominations de réalisatrices dans un domaine de revendication qui laissait à redouter un palmarès du genre et non de la raison. De nouveaux noms en sélection qui ne donnaient pas l’impression d’être le meilleur du cinéma mondial (le film d’Eva Husson, Les filles du soleil, n’avait pas sa place en compétition), alors que de grands noms dits d’habitués ont été écartés, comme celui de Paolo Sorrentino dont on rêvait de découvrir en sélection le biopic sur Berlusconi, Loro (un diptyque qui vient de sortir en Italie). Et un jury dans lequel on a pu se demander ce que venait faire la sympathique Ava DuVernay, mais dont la contribution en tant que réalisatrice (Selma, Un raccourci dans le temps) était limité dans tous les sens du terme.
L’exaltation cannoise n’a pas été de tous les instants. Cannes coincé par le politiquement correct ? On préfère cette manifestation politique, notamment quand Cate Blanchett rend hommage aux cinéastes absents sur la Croisette (Jafar Panahi, Kirill Serebrennikov). Et quand Asia Argento rentre dans le lard de Harvey Weinstein, l’accusant en direct d’un viol qui aurait eu lieu en 1997, lors du Festival. Une accusation forte, polémique qui va jusqu’à accuser les autres mâles puissants présents dans la salle. L’un des plus grands moments de ces dix derniers jours. Un témoignage formidable et totalement pertinent au vu de la symbolique que représente la Croisette.

Le Palmarès :
Très beau choix de la présidence Cate Blanchett qui n’a pas palmé une œuvre réalisée par une femme pour des raisons de genre et d’égalité. Elle a su trouver un beau compromis pour Capharnaüm qui avait vraiment partagé la Croisette, et dont l’émotion des spectateurs laissait redouter une Palme un peu facile.
Deux absents regrettables dans ce palmarès, En guerre, de Stéphane Brizé, et L’été, de Kirill Serebrennikov, qui étaient les favoris de la critique française : voir le tableau publié par nos confrères du Film Français ci-dessous...

(C) Le Film Français

Palme d’Or
Une affaire de famille

Grand Prix du Jury
BlacKkKlansman, de l’über-cool Spike Lee

Prix du Jury
Capharnaüm, de Nadine Labaki, dont le discours, humble, plein d’humanité, était le plus beau de la soirée. Sa remarque sur les migrants qu’a reçus le Liban, malgré ses peu de moyens, est un beau pied de nez à la France et à l’Europe occidentale.

Palme d’or spéciale
[Une Palme spéciale accordée à la demande de Cate Blanchett par Pierre Lescure
– Le Livre d’image, de Jean Luc Godard

Prix d’interprétation masculine
– Marcello Fonte pour son rôle dans Dogman, de Matteo Garrone

Prix de la Mise en scène
– Pawel Pawlikowski, pour Cold War (Pologne)

Prix du Meilleur scénario
– Heureux comme Lazzaro, de Alice Rohrwacher
– Trois visages de Jafar Panahi

Prix d’interprétation féminine
– Samal Yeslyamova pour son rôle dans Ayka, de Sergey Dvortsevoy (Russie)

Palme d’Or du Meilleur Court Métrage
– Toutes ces créatures, de Charles Williams (Australie)

(C) Diaphana Distribution

La Caméra d’Or

– Girl, de Lukas Dhont (Belgique), récompensé pour sa délicatesse et sa puissance. Le film a aussi obtenu la Queer Palm, le vendredi soir, prix récompensant une œuvre à la thématique LGBT. Diaphana proposera le film en salle le 10 octobre.

Palme d’Or du Meilleur Court Métrage
– Toutes ces créatures, de Charles Williams (Australie)

https://www.avoir-alire.com/cannes-2018-bilan-final-de-la-competition-officielle